En activité depuis cinq ans déjà, le théâtre Aux Écuries rouvre vendredi prochain aux termes d'importants travaux. Pour les cinq compagnies qui participent au projet, il ne s'agit pas d'une réouverture après rénovations, mais de l'avènement d'un nouveau théâtre ouvert à des pratiques diverses et animé par un désir concret de s'inscrire dans une communauté.

Q: Aux Écuries fonctionne depuis des années déjà. En quoi la présente saison constitue-t-elle un acte de naissance?

R: L'aboutissement du projet sur lequel on travaille depuis 2005, c'est le lieu tel qu'il va l'être le 14 octobre. Avant, on occupait l'espace de création du Théâtre des Deux mondes. Ce qui va changer, c'est qu'il va y avoir la salle qui existe déjà, un café, une billetterie, une aire d'accueil digne de ce nom, un studio de 100 places, trois salles de répétition, des bureaux et un entrepôt. Les gens étaient invités depuis cinq ans dans un lieu où on était en train de rêver. Là, le rêve se réalise.

Q: Les salles se multiplient à Montréal, alors qu'on tend à dire que les billets ne se vendent pas forcément bien. Qu'est-ce qui justifie l'ouverture d'un nouveau théâtre?

R: On avait besoin d'un nouveau lieu pour accueillir des pratiques qui se multiplient et se diversifient. Le public va se multiplier et se diversifier avec elles. (...) Des spectacles présentés dans des salles comme La Chapelle, Espace libre et La Licorne affichent souvent complet. Quand un spectacle est bon, la salle est pleine et on regrette de ne pouvoir faire que 20 ou 30 représentations. Faisons du bon théâtre et il y aura du monde dans les salles.

Q: Comment définir l'identité du théâtre Aux Écuries?

R: D'abord par sa direction artistique à sept têtes, ce qui existe peu ailleurs. Et c'est vraiment sept têtes, en ce sens qu'elles peuvent aller dans des directions différentes, voire opposées, sur le plan artistique. Aux Écuries permet de réunir ces gens-là sous un même toit, puisque ce lieu est un espace de création et de diffusion pour nous, mais c'est aussi un lieu qu'on souhaite ouvert aux autres pratiques et aux autres compagnies. Ces sept directions-là vont aller chercher des projets et des esthétiques qui vont aussi aller dans des directions différentes. [...] Ce ne sera pas un théâtre de consensus.

Q: Qu'est-ce qui vous réunit?

R: Un esprit de communauté et de partage. Ce qui est à la base du projet, c'est du monde qui se dit: on a besoin d'un local de répétition, d'administration, d'un photocopieur... On a jugé qu'il était plus profitable de partager tout ça. Le constat de base, c'est qu'une société individualiste a ses limites et on les a vécues. On est dans un retour collectivement et pas juste notre génération. Il y a une envie de retrouver un esprit communautaire. L'esprit fondateur d'Aux Écuries ne passe pas par de grandes idées, mais par des choses très concrètes.

Q: Villeray est un quartier plus pauvre et plus diversifié que d'autres à Montréal. Est-ce que le théâtre se sent une responsabilité de faire écho à cette réalité?

R: Je pense que cette présence et les échanges qu'on va avoir vont influencer certains projets. Mon ambition est éventuellement de faire des projets directement avec le voisinage. [...] Le rapport au voisinage, pour moi, c'est tout sauf celui d'une machine à faire des spectacles qui veut vendre des billets. Le rapport à ce qu'est le spectateur, c'est tout sauf celui à un consommateur qui va consommer un produit culturel entre 20h et 22h et rentrer chez lui. L'idée, c'est de sortir de ce discours marchand.

La direction artistique du théâtre Aux Écuries est composée de sept personnes qui représentent cinq compagnies: Sylvain Bélanger (Théâtre du Grand Jour), Olivier Ducas et Michel Monty (La pire espèce), Marilyn Perreault et Annie Ranger (Théâtre I.N.K.), Marcelle Dubois (Les porteuses d'aromates et Festival du Jamais Lu) et Olivier Choinière (L'ACTIVITÉ).

Nuit blanche aux Écuries

17h à 19h: manifeste

Un BBQ aura lieu devant le théâtre (7285, rue Chabot) au terme de processions qui auront visité les 13 autres théâtres montréalais. Les sept directeurs artistiques d'Aux Écuries en profiteront pour lire un manifeste.

20h: JustFakeIt

Première de la première pièce présentée dans le nouveau théâtre Aux Écuries. L'honneur revient à la compagnie Joe Jack et John et à sa pièce Just Fake It, où il est question des arrangements qu'on prend avec la vérité dans l'espoir de vivre plus heureux...

22h: insurrection

Le 28 septembre dernier, en marge de la présentation de Chante avec moi au Théâtre français du CNA, des membres de la «cellule invisible» ont manifesté devant le parlement affublés de masques à l'effigie de Stephen Harper. Le passage à l'action se poursuivra avec la première réunion publique de cette entité dont le but est de «passer à l'action artistique» dans l'espace public de manière spontanée. Et pas seulement pour défendre les artistes.

Minuit à 6h: la première fois

Titiller avec un clin d'oeil coquin, tout le monde le fait et Aux Écuries aussi. Le théâtre perdra sa «virginité» avec la présentation de trois cabarets d'une heure sur le thème de la première fois auxquels participeront Sophie Cadieux, Fabien Cloutier, Stéphane Crête, Olivier Morin, Monia Chokri et plusieurs autres. Pour aller jusqu'au bout de cette nuit-là, il y aura aussi, entre autres, de la musique des DJ.

9h: Christian Bégin aux fourneaux

Comédien, auteur, animateur, gourmand et président du conseil d'administration des Écuries, Christian Bégin sera aux commandes d'un petit déjeuner de lendemain de veille: lecture de nouvelles érotiques et «possiblement» un verre de vino...

14h: jardin pas secret

Après avoir passé des mois à rencontrer le voisinage du théâtre, l'artiste Cathy Gordon va dévoiler l'installation faite avec les plantes des gens du quartier Villeray, qui se chargeront de les arroser.