Le Cabaret insupportable, créé en 2007 pour les 16 ans de la compagnie Transthéâtre, est une expérience limite, qui défonce le quatrième mur au théâtre en utilisant souvent l'humour au premier degré. Profitez-en, car ce troisième cabaret sera le dernier, puisque selon ses créateurs, Brigitte Poupart et Michel Monty, «le succès, c'est insupportable»...

Faut-il être un peu masochiste pour assister au Cabaret insupportable? Quand on vous accueille avec un air bête au guichet (en anglais seulement), qu'un clown vous agresse avec ses chansons stridentes pendant 10 minutes, qu'un acteur de théâtre expérimental, tout nu, vous pleure dessus? Ce ne sont que quelques exemples de ce que l'on a pu subir dans ce cabaret qui porte bien son nom. Mais comme le chante Jean Leloup: «Les gens aiment bien quand ça fait mal, et y'a pas de mal à se faire du bien.»

 

Le Cabaret insupportable ne ressemble à rien de connu et on vient y chercher n'importe quoi sauf du convenu. Cela a toutes les apparences et les qualités d'un show populaire, mais sans l'idée de la performance et du consensus. Dans ce cabaret, on a le droit d'être poche, c'est même très recommandé.

D'une certaine façon, ses artisans sont eux aussi un peu masos, puisqu'il s'agit d'un happening de comédiens rompus à toutes les exigences du métier. Par exemple Didier Lucien, qui a beaucoup souffert en récitant sur scène, mot à mot, le monologue d'un humoriste. Ou Brigitte Poupart qui a lu un verbatim d'un épisode de Loft Story. «D'une certaine façon, je teste jusqu'où je suis prêt à aller comme acteur» résume Lucien. Cette année, il va parler de la porno, non pour la dénoncer, mais pour exiger du public qu'il assume sa consommation...

Sortir de sa zone de confort

Malaises, exaspérations, rires jaunes, provocation. Le Cabaret insupportable est un ticket pas trop cher pour sortir de sa zone de confort - à 25$ le billet pour le nombre de numéros, ils ne font pas vraiment d'argent. «Mais cela répond à un besoin du public, croit Michel Monty. C'est un public très diversifié d'ailleurs. Ce n'est pas destiné seulement à un petit cercle fermé. Disons que c'est une catharsis, ce que précisément on vient chercher au théâtre.»

On sort de sa zone de confort avec les risques que cela suppose. Michel Monty a déjà vu un couple se chicaner et quitter la salle pour ne plus y revenir. C'est que la frontière entre la scène et le public est en effet assez floue, puisque le spectacle commence dès qu'on met le pied au Lion d'or. Ils ont beaucoup ri l'an dernier en voyant la docilité du public qui évitait les tables affichant l'étiquette «réservé». Le problème, c'est qu'elles en avaient toutes! «Ce spectacle attaque l'aspect conventionnel de nos vies, explique Christian Bégin. Ce n'est pas délibérément humoristique, on ne fait pas un gag pour le gag. Le rire vient du malaise.» Cette année, il proposera un numéro inspiré des grands voyageurs et des coachs de vie qui font des conférences. Son personnage commentera un diaporama de son voyage au métro de Longueuil...

C'est une première pour Jacques L'Heureux, qui sera à l'animation. Chacun des participants - et ils sont nombreux - a peaufiné son numéro dans son coin, il aura la responsabilité d'organiser la liaison entre eux. «Je ferai un peu de discipline, mais je ne dissiperai pas les malaises, dit-il. En fait, dans ce cabaret, on trouve un humour qui ne passerait pas ailleurs. L'humour permet de dire tout, mais pas n'importe quoi!». Et, fait à noter, les numéros seront soumis «au ballotage», question d'explorer la notion de concours et d'élimination de la téléréalité, phénomène que d'aucuns trouvent insupportable. Ça, et les enfants vedettes, les vendeurs de cossins, les sondeurs d'opinions inutiles, entre autres irritants pénibles de l'existence.

Dérision et autodérision sont les maîtres mots de l'esprit de ce cabaret, selon Brigitte Poupart. «On ne rit pas seulement des travers de notre société, mais aussi de nous, conclut-elle.

Bonne nouvelle, ce troisième et ultime Cabaret Insupportable ne présentera que des numéros 100% nouveaux, commis par François Bernier, Enrica Boucher, Emmanuel Bilodeau, Édith Cochrane, Patrice Coquereau, Stéphane Crête, Martine Francke, Geneviève Laroche, François Patenaude, André Robitaille et de nombreux autres. Les participations varient selon les soirs, et il faut noter aussi qu'on aura droit cette année à des prestations musicales de Marie-Jo Thério, Yann Perreau, Florence K. et Urbain Desbois.

Le Cabaret insupportable III, au Lion d'or, du 26 avril au 15 juin, les lundis et mardis.