Après avoir tourmenté George W. Bush pendant des années, le cinéaste, comédien et auteur Michael Moore a décidé d'être une épine (de plus) dans le pied de Donald Trump. Son premier spectacle à Broadway n'a pas encore provoqué de tweet intempestif du nouveau président, mais cela ne saurait tarder...

Donald Trump ne le sait peut-être pas encore, mais il a une « invitation ouverte » au nouveau spectacle de Michael Moore. Tous les soirs, une loge est réservée au président et à sa femme au théâtre Belasco de New York. Il s'agit des deux seuls sièges vides dans la salle où ce spectacle est présenté à guichets fermés depuis ses débuts, vendredi dernier.

Intitulé Michael Moore on Broadway : The Terms of My Surrender (« les conditions de ma capitulation »), le spectacle n'a rien d'une comédie musicale. Michael Moore ne sait ni danser ni vraiment chanter, mais il sait raconter des histoires. Des histoires parfois drôles, parfois poignantes et, bien souvent, révoltantes, particulièrement pour ceux dont les opinions politiques sont à gauche de l'échiquier.

S'il est surtout connu pour ses documentaires, notamment Bowling for Columbine, Michael Moore n'est pas totalement étranger aux planches. En 2002, il avait présenté un monologue post-11-Septembre à Londres et, l'automne dernier, il a présenté un spectacle juste avant l'élection américaine dans plusieurs théâtres de l'Ohio afin de convaincre les partisans de Trump de changer leur opinion.

LES ÉTATS DÉSUNIS D'AMÉRIQUE

Rare personnalité à avoir prédit - à contrecoeur - la victoire de Donald Trump, Michael Moore est immédiatement entré en mode résistance au lendemain de l'élection. « Je refuse de vivre dans un pays où Donald Trump est président et je ne compte pas partir. Alors, quelque chose doit changer », répète-t-il depuis, chaque fois qu'il en a l'occasion.

Son spectacle se veut donc une manière de répondre à ce problème insoluble, afin de s'assurer que l'actuel locataire de la Maison-Blanche quitte les lieux au plus tard en 2020.

S'il y pourfend les politiques et les opinions de Trump, Michael Moore cherche surtout à galvaniser ses concitoyens. Puisant dans ses souvenirs, de sa jeunesse au Michigan à un de ses coups d'éclat contre Reagan en 1984 en Allemagne, le comédien militant oscille entre l'analyse politique, le militantisme et l'humour cinglant.

Ceux qui connaissent bien le travail du cinéaste ne seront pas surpris. Les autres doivent s'attendre à des ruptures de ton radicales.

Son chapitre sur les dérives extrémistes d'une partie de l'Amérique et des médias de droite est particulièrement poignant. Faisant jouer un extrait de Glenn Beck (vedette médiatique de la droite américaine) confiant vouloir assassiner le cinéaste, Michael Moore rappelle avoir été victime de plus d'une demi-douzaine d'attaques pour ses positions politiques anti-Bush.

Son garde du corps a été poignardé, et un désaxé a même tenté de faire exploser sa demeure au Michigan. Tout ça en raison de ses positions diabolisées par l'extrême droite. Bienvenue aux États désunis d'Amérique...

Et si la plupart de ses concitoyens sont désormais au courant de la tragédie de Flint, au Michigan - où une bonne partie de la population a été empoisonnée par de l'eau contaminée -, Michael Moore explique en détail le rôle du gouverneur républicain dans ce drame, suscitant stupeur et indignation dans la salle.

APPEL À L'ENGAGEMENT

Loin de vouloir décourager ses spectateurs, Moore tente surtout d'instiller un désir d'engagement, de fronde. Après avoir tenté de convaincre les pro-Trump de changer d'avis avant l'élection, il cherche cette fois à convaincre les siens, les démocrates, de l'importance de se retrousser les manches.

S'il ne les invite pas à se munir de fourches et à prendre d'assaut la Maison-Blanche, il les exhorte à faire des gestes concrets, tout en se moquant d'un président qui ne supporte pas que l'on se moque de lui. Bref, il les exhorte à ne capituler sous aucun prétexte.

The Terms of My Surrender est présenté au Belasco Theatre de New York jusqu'au 22 octobre.

PHOTO EDUARDO MUNOZ, ARCHIVES REUTERS

En novembre dernier, tout juste après la victoire de Donald Trump à l'élection présidentielle, Michael Moore s'est rendu à la Trump Tower, à New York, pour tenter de le rencontrer.