Clémence DesRochers ne voulait plus donner de spectacles, mais la scène lui manquait. Elle a trouvé la solution: une série de rencontres avec son public devant lequel elle se raconte en toute liberté.

Une dizaine de fois depuis le début de cette année, Clémence s'est pointée sur une scène, seule avec son amie Danielle Bombardier, pour se raconter à sa manière comme elle le fera encore ce soir au Gesù. Des rencontres où les poèmes, les chansons, les monologues, les observations et anecdotes de toutes sortes s'entremêlent pour donner quelque chose qui ne peut être que du Clémence.

«Je dis aux gens qu'ils me manquent et je découvre toujours qu'il y en a plusieurs qui ne m'ont jamais vue: «Mais qu'est-ce que vous attendiez pour venir me voir? J'ai 76 ans, j'achève, j'ai presque fini ma vie! Vous vouliez me voir morte ou quoi?»» dit-elle avec toute l'autodérision qu'on lui connaît, dans les locaux des Impatients, l'organisme qui offre des ateliers d'expression artistique aux personnes atteintes de problèmes de santé mentale, et dont elle est la porte-parole de longue date.

Clémence est resplendissante. Ces rencontres pas comme les autres la comblent: «Ce que j'aime dans cette formule-là, c'est que je suis entièrement libre. Dans un spectacle, il y a nécessairement une chanson, une lumière qui s'allume, un pacing. Alors que là, c'est ma vraie nature: je pars de mes débuts et je fais des grands détours là où je veux. Je peux faire des extraits de classiques appris au Conservatoire, citer un bout de Baudelaire parce que c'est l'automne, raconter mon entrée à Radio-Canada, la dure époque des clubs et ce que j'ai pris de toutes ces expériences de vie. Je raconte ce que c'est que d'être l'enfant d'un père poète, je fais chanter aux gens Le réveil rural qu'ils connaissent tous sans savoir que ce sont des paroles d'Alfred DesRochers: C'est le réveil de la nature...»

Elle raconte aussi combien elle a détesté l'école des religieuses, mais prend beaucoup de plaisir à «rappeler toute cette époque de religion et de scapulaires.» Et s'il y a dans la salle des spectateurs plus jeunes qui ne possèdent pas ces références, elle leur suggère «d'aller voir sur l'internet» ! En une heure et quart, une heure et demie, tout y passe, y compris des monologues qu'elle refait en entier ou en partie selon l'humeur du moment. «Je suis le Luchini du Québec!» dit-elle en pouffant de rire.

S'amuse-t-elle autant que dans un spectacle? «Mais c'est un show! répond-elle aussitôt. Et j'ai plus de plaisir parce que j'ai moins le trac. C'est tellement basé sur ce que je suis, comme si j'étais dans une soirée d'amis où je ferais la folle. Je peux prendre du temps, je peux jouer, personne ne me bouscule. Parfois, dans un spectacle de variétés, tu chantes une chanson douce et tu perds ton monde. Mais de la façon que je le fais, je ne les perds jamais et si je sens que je suis en train de les perdre, je coupe.»

L'autre avantage de cette formule souple, c'est qu'elle n'exige pas de Clémence plusieurs soirées de travail d'affilée et de longs déplacements comme en tournée. Plus tôt cette année, elle a donné son spectacle trois fois en autant de soirs et a aussitôt fait savoir à qui de droit que ça ne se répéterait plus.

«C'est Clémence qui se donne en pâture, mais c'est moi le maître à bord», insiste-t-elle. Mais la présence de sa complice Danielle Bombardier, qui l'invite dès le départ à parler de son enfance, est importante: «Elle me ramène et peut même me couper: «Bon, c'est assez de parler de tes ventes de garage!»»

Clémence relance justement son coffret Vente de garage, dont elle avait écoulé les 2400 exemplaires l'an dernier, et auquel elle a ajouté deux émissions de Bernard Faucher sur Les femmes de Clémence, diffusées discrètement sur la Première chaîne de Radio-Canada. Ces deux CD remplacent ceux enregistrés en spectacle qui recoupaient un peu les autres CD et DVD du coffret.

Par ailleurs, Clémence sera de la soirée en lecture et en chanson de la tournée Mille Mots d'amour, au profit de la Fondation des Impatients, le 18 novembre à L'Étoile de Brossard. Aux côtés de Danielle Oddera, Isabelle Cyr, Sophie Faucher, Louis Champagne, Marc Béland, Louis Labonté, les Impatients ainsi que Caroline Bleau et Étienne Dupuis de l'Opéra de Montréal. Clémence y lira une lettre inédite de son père et une lettre d'amour de Claudine Mercier.

Clémence DesRochers, au Gesù, ce soir et le 1er décembre.