Alors que des artistes s'engagent pour aider Haïti et que d'autres se portent à la défense de l'environnement, les Zapartistes ont décidé de s'engager dans une cause syndicale qui est loin de faire l'unanimité au sein de la population: l'importance et le maintien de la fonction publique québécoise.

«Souvent, on prend les causes que les artistes délaissent parce que ce n'est pas glamour, mentionne François Patenaude, l'un des membres du groupe, au cours d'un entretien téléphonique. Il n'y a aucun plan de marketing là-dedans. Ce qu'il y avait d'intéressant, ce n'était pas tant de s'allier à la CSN (Confédération des syndicats nationaux), mais de défendre la fonction publique. Nous on trouve que c'est important pour la société québécoise.»

Depuis le 10 février, le cinglant groupe d'humoristes formé de François Parenteau, François Patenaude, Brigitte Poupart et Christian Vanasse réalise différentes capsules - portant sur les services publics - mises en ligne sur le site canalzap.tv, un portail lancé par la CSN à l'occasion des négociations qui ont présentement cours entre les employés de l'État et le gouvernement du Québec.

Les capsules - présentées à la manière «zapartiste» - mettent notamment en scène une infirmière cachée derrière son masque, sorte de parodie d'une publicité réalisée pour Urgence médicale code bleu, une agence privée de placement. «Sous ce masque, il y a une infirmière. Sous ce masque, il y a une employée qui est obligée de se taper un horaire de marde le soir, les fins de semaine, à temps partiel et sur appel», lance une voix hors champ.

Une autre vidéo montre un homme avec un visage de clown, clin d'oeil à la ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais, qui a financé l'embauche de clowns pour divertir les personnes âgées dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée du Québec.

«Sous ce masque, il y a un entrepreneur qui paie ses employés au moins 9 % plus cher que le réseau public, peut-on alors entendre. Sous ce masque, il y a un parasite du système de santé dont nous aurions moins besoin si les employés syndiqués étaient mieux payés et que les postes d'infirmière étaient plus attrayants pour la relève.»

Risques

Visiblement, l'idée de ramer à contre-courant en s'associant à une cause qui n'a pas nécessairement la faveur populaire n'effraie pas les Zapartistes. Ils voyaient là un véritable défi pour tenter de changer les perceptions. «Défendre la fonction publique aujourd'hui, c'est comme pas évident», admet François Patenaude. Il ajoute du même souffle que les travailleurs de l'État sont souvent perçus comme des «parasites», des «paresseux».

Mais avant d'accepter la proposition de la CSN, les Zapartistes se sont toutefois assurés d'avoir une totale liberté dans leurs propos. Exit la censure. «Si parfois, pour défendre la fonction publique, on a besoin de jouer par exemple sur le cliché du syndiqué qui se pogne le cul, on veut se permettre de pouvoir aller là.»

Le risque est également assumé de la part de la CSN, assure le vice-président Louis Roy, qui dit apprécier «l'humour libre» des Zapartistes. La Centrale a décidé de faire appel à eux parce qu'ils adoptent un discours loin de la langue de bois. Du coup, ils peuvent espérer rallier une plus grande proportion de gens.

«Chacun prend des risques de son côté, soutient-il. Eux, ils prennent le risque d'être associés indéfiniment à la CSN et nous, on prend le risque de se faire critiquer pour avoir permis aux Zapartistes (d'avoir mis en relief certains préjugés).»

«Dans 90 % du temps, nos esprits se rencontrent et le 10 %, on le gère. Les gens ont le droit s'exprimer», mentionne M. Roy.

De nouvelles capsules seront mises en ligne tous les premiers et troisièmes lundis du mois jusqu'au 31 mars, date prévue pour la fin des négociations entre les syndicats et le gouvernement du Québec.