L'excentrique et inclassable humoriste Réal Béland, que les médias dépeignent généralement, et non sans raison, en éternel ado baveux et fatigant, avait pris un grand et beau risque en offrant ces spectacles à demi improvisés...

Simplicité volontaire est fait de sketches laboratoires, de mauvais coups téléphoniques en direct et d'interactions bizarres avec le public: on espère que Béland assume la vague débandade de son spectacle donné jeudi au Gesù. Il saura sans doute se reprendre. On ne parlera pas de ce show comme d'un fiasco total, il y a eu de bons moments, et la foule était d'avance conquise et tout à fait avenante. Mais si ce n'a pas été un fiasco, ce n'a pas été la fiesta non plus.

 

Béland est un excellent communicateur, un animateur de foule, un ami des gens: son spectacle repose d'ailleurs essentiellement sur la participation du public, lequel se prête au jeu avec générosité. Après un numéro de stand-up assez médiocre en ouverture, le foufou reprend son personnage de l'achalant Monsieur Latreille, homme d'âge mûr qui appelle des gens pour rien (façon Insolences d'un téléphone) pour notre bonheur. L'ennui: les appelés ne sont pas toujours dupes, connaissent ce personnage, et les canulars ne sont donc pas forcément réussis. Qu'importe, Béland s'en tire facilement grâce à son sens de la répartie, et la foule s'amuse.

Les segments «interactifs» de ce happening sont aussi les seuls moments forts. Quand Béland se mêle de faire dans le monologue ou, pire, dans la chanson comique, il s'égare et perd une partie de son auditoire. Béland devra aussi revoir ce sketch, prometteur, issu d'une excellente idée, où il se fait thérapeute de l'ordinaire, invitant des spectateurs volontaires à confier tel ou tel problème banal qu'il promet de régler en deux minutes en appelant une «personne ressource».

Clou du spectacle: un délire parfaitement puéril et jouissif mettant en vedette cet insolite personnage du Président de la Fédération des stickers d'avertissement. Béland ressort aussi son King des ados, sérieux! Mais le numéro n'a pas fait mouche et nous a laissés déçus: imiter un ado des années 90 ne fait rire ni les jeunes ni les vieux. Ce personnage est obsolète, mais récupérable. Le comique termine la soirée avec des chansons humoristiques sous la coiffure punk d'une fausse idole polonaise, autre personnage connu des fans de Béland. Chansons rock et niaiseuses qui ne déplairaient pas au groupe Les Trois Accords mais qui, à notre humble avis, gâchait le climax de ce show expérimental, cet «essai» plus ou moins réussi où fusent trop abondamment les gags de pénis (une vingtaine d'allusions péniennes en tout, ça fait beaucoup).

Simplicité volontaire, de Réal Béland, ce soir, 20h, au Gesù.