Carrefour des cultures autochtones, le Festival Innu Nikamu présente à partir de mardi une variété d’artistes issus de différentes nations, dont Florent Vollant, Beatrice Deer et Aysanabee. Son nouveau coordonnateur a aussi convié Richard Séguin, Roxane Bruneau, Loud et même… les Gipsy Kings à Mani-Utenam !

(Mani-Utenam) Le printemps dernier, quelques jours avant le dévoilement de la programmation du 39e Festival Innu Nikamu, certains observateurs avisés ont remarqué que les noms des invités apparaissaient déjà sur des affiches placardées dans différentes villes du Québec. La plus imposante de toutes occupait l’un des énormes panneaux publicitaires qui donnent sur le pont Jacques-Cartier.

Retrouver la fierté

Normand Junior Thirnish, coordonnateur de l’évènement, n’a pas fait cette offensive en pensant vendre des milliers de laissez-passer. Il l’a fait pour susciter un sentiment de fierté. « Un Québécois qui voit son drapeau flotter à l’étranger va tout de suite ressentir un sentiment d’appartenance, il va reconnaître son drapeau et ressentir de la fierté. Le logo d’Innu Nikamu, c’est la même chose. Tout le monde le connaît », dit-il, citant notamment les Innus, les Cris, les Attikameks et les Wendats.

La fierté, c’est important. On nous l’a enlevée et on veut la récupérer. On veut pouvoir être fiers de nos langues, de nos cultures, de nos artistes et de notre festival.

Normand Junior Thirnish, coordonnateur du Festival Innu Nikamu

Florant Vollant est, avec son ami Richard Séguin, la tête d’affiche de la soirée de ce mardi. Parmi les dizaines d’autres qui fouleront la scène installée sur le site de l’ancien pensionnat de Mani-Utenam au cours des prochains jours, citons notamment Aysanabee, Roxane Bruneau, Émile Bilodeau (qui a bien des amis chez les Innus), Claude McKenzie, Violent Ground, Loud, Kanen, Natasha Kanapé Fontaine (dont le mini-album est tout chaud) et les Gipsy Kings.

Normand Junior Thirnish exerce son rôle avec l’envie de marcher dans les traces de ses prédécesseurs. « Innu Nikamu a été rêvé par d’autres gens avant moi, dit-il. Réginald Vollant et Kim Fontaine ont fait venir Simple Plan. Ç’a donné envie aux gens d’avoir d’autres artistes comme ça, ici. C’est ressenti comme un honneur quand des artistes comme ça viennent dans notre communauté. C’est comme si on était vus et entendus. »

PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Hommage aux enfants près du terrain de l’ancien pensionnat pour Autochtones

De la GRC à la musique

Le coordonnateur d’Innu Nikamu n’en est qu’à son deuxième festival. Ses emplois précédents ne le préparaient pas particulièrement à occuper un tel poste. En effet, il a d’abord été policier, notamment au sein de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), où il a appris à mettre sur pied et à gérer des projets. « La GRC croit beaucoup à la police communautaire, explique Normand Junior Thirnish, et c’est là que j’ai développé cette envie de faire plaisir aux jeunes. »

Des jeunes, il en a vu souffrir pendant les années où il a été agent de la GRC sur la Côte-Nord. « Des suicides de jeunes, j’en ai vu », explique-t-il. Et un jour, il y en a eu un de trop pour lui. C’était à Pakuashipi, loin sur la Côte-Nord. « Ça faisait longtemps que je me disais qu’il fallait que je fasse du bien, cette fois-là, je l’ai fait », raconte-t-il.

Puisque le hockey « est comme une religion » dans les communautés autochtones, il a concrétisé un partenariat avec l’Association des joueurs de la LNH, qui a offert 25 équipements de joueurs et 2 de gardiens à la communauté de Pakuashipi. « Les parents, les enfants, le personnel de l’école, tout le monde était content qu’on pense à eux », se rappelle-t-il.

Son travail au festival s’inscrit dans cette volonté de faire du bien et de se rapprocher de sa communauté. « Quand on est policier, on dirait qu’il y a un mur entre toi et la population que tu es censé servir et protéger », observe-t-il. Maintenant, il a le sentiment de faire de nouveau partie d’une collectivité qu’il souhaite divertir et dynamiser.

Peu à peu, Innu Nikamu va devenir une grande vitrine musicale. Les directeurs des autres festivals vont peut-être venir ici et découvrir des artistes autochtones. Ce qu’on veut, c’est rendre ces artistes et ces musiques accessibles.

Normand Junior Thirnish, coordonnateur du Festival Innu Nikamu

Et porter le rêve de Réginald Vollant (regretté frère de Florent) et Kim Fontaine (du groupe Maten) plus loin encore. « On voit dans les commentaires sur Facebook que les gens veulent les Gipsy Kings, Shania Twain ou Bryan Adams. Est-ce qu’on peut se le permettre ? demande l’organisateur, sans répondre à sa propre question. On est rendu là. On a le droit de rêver d’avoir ça dans notre communauté. »

Le Festival Innu Nikame se tient jusqu’à dimanche à Mani-Utenam

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