Chantre du territoire nordique, le poète et essayiste Jean Désy allie, à l'image de Jacques Ferron, la pratique des lettres et de la médecine. C'est que l'auteur d'Ô Nord mon amour (Feu Loup de gouttière) arpente le Grand Nord, serment d'Hippocrate en bandoulière. Voici qu'il choisit cette fois de poser un regard sur sa pratique par le truchement de la littérature en livrant un recueil de nouvelles et de récits tirés d'anecdotes, s'inspirant de poésie, frôlant parfois la trame narrative fictive pour mieux rebondir dans l'horreur du réel.

Dans cet inclassable petite plaquette entre l'essai et la nouvelle, Désy cherche un sens à la maladie qui frappe à l'aveugle, traînant la mort derrière elle. Ce «Mal» qui prend plusieurs formes obsède le praticien, qui profite de l'écriture pour mettre au clair ses sombres idées. On y dresse ça et là les échecs de notre système de santé défaillant, terrifiante loi de la jungle où l'amour et l'humilité perdent souvent au profit de la gloire et de l'argent. On se retrouve aussi en Afrique, en Asie, devant la misère crue, la mort dénudée.

 

Or, il semble que pour la première fois, la sensibilité de l'auteur l'empêche de traduire clairement son malaise, sa pensée glissant dans plusieurs directions. On se surprend à imaginer la portée d'un ouvrage qui aurait su traiter plus en profondeur de cette formidable idée selon laquelle «il semble exister un baume pour chaque plaie du monde et ce baume est très souvent un langage». Une prochaine fois, peut-être?

Entre le chaos et l'insignifiance

Jean Désy

XYZ

105 pages, 18$

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