La célèbre rivalité (remise en cause par les historiens) entre Mozart et Salieri est connue ; mais qu’en est-il de celle, également montée en épingle, entre les cantatrices Maria Callas et Renata Tebladi ?

Ce n’est pourtant pas cette dernière qu’Eric-Emmanuel Schmitt dépeint dans son court opus La rivale, braquant plutôt le projecteur sur une drôle de vieille femme, Carlotta Berlumi. Tous (même Google !) ont oublié cette ancienne chanteuse d’opéra, qui se confie à un jeune guide touristique féru de la discipline, déroulant sa vie, rongée par l’aigreur. Elle se présente comme la véritable concurrente de La Callas, laquelle aurait tout fait pour miner sa carrière, comploter à ses dépens et lui ravir la lumière qui lui revenait de plein droit. À moins qu’il ne s’agisse que d’une illusion empreinte de venin ? Quand La Presse a rencontré M. Schmitt au Salon du livre de Montréal l’an passé, l’écrivain avait confié travailler sur un livre ayant la musique pour thème. On soupçonne que La rivale en soit l’aboutissement. Grâce au personnage acide de Berlumi et à la moralité implicite du récit, on retrouve non sans plaisir les écrits qui, à notre avis, siéent le mieux à l’auteur, c’est-à-dire un format court où interviennent des figures fortes et touchantes, malgré leurs défauts. La nouveauté est assez vite dévorée, mais le thème et l’accessibilité du portrait, qui peut être mis entre de nombreuses mains, nous convient à passer quelques instants de qualité, surtout lorsqu’elle est lue avec un air de musique classique en trame de fond.

La rivale

La rivale

Albin Michel

136 pages

7,5/10