(Londres) Les mémoires du prince exilé Harry sont arrivés mardi dans les rayons des librairies, avec son grand déballage d’attaques contre la famille royale britannique qui rendent improbable une réconciliation avec son père Charles III, à peine monté sur le trône, et son frère William.

Les extraits les plus fracassants du livre – où William est qualifié dès le premier chapitre de « frère bien-aimé (et) meilleur ennemi » à l’occasion d’une dispute en 2021 – avaient déjà été éventés dans la presse. Ils ont encore plombé, au Royaume-Uni, la popularité du fils cadet du roi, exilé depuis 2020 en Californie avec son épouse Meghan, accusé de salir à des fins mercantiles une institution pour beaucoup sacrée.

Chez le libraire WHSmith de la gare londonienne de Victoria, les exemplaires de Spare (Le Suppléant) ont quitté leur emballage de plastique noir dès minuit, sous les objectifs de journalistes plus nombreux que les clients.

Premier à attendre, Chris Imafidon, président d’une association dans l’éducation, est reparti avec trois exemplaires du livre où le duc de Sussex raconte la douleur du souvenir de sa mère Diana, avoir tué 25 talibans en Afghanistan, mais aussi avoir pris de la cocaïne ou avoir perdu sa virginité avec une femme plus âgée que lui.

« Je veux vraiment être en mesure de voir quelle est sa perspective », a-t-il déclaré à l’AFP.

« Je vais le lire et voir ce qui s’y passe, puis je me ferai ma propre opinion », a dit Elisabeth Stang, une neurothérapeute norvégienne de 53 ans, qui a acheté l’ouvrage mardi matin lors d’un passage à Londres.

« Kidnappé par Meghan »

L’ouvrage est édité dans 16 langues. Il avait déjà été placé par erreur quelques heures jeudi dans des rayons de librairies en Espagne la semaine dernière, éventant ses principales révélations.

Les divisions au sein de la royauté britannique y apparaissent au grand jour, donnant une image peu reluisante de cette institution à peine quatre mois après la mort de la très populaire Élisabeth II et à quatre mois du couronnement de Charles III.

William, l’héritier du trône, est sa principale cible ; on y apprend ses colères contre son cadet, jeté une fois au sol, mais aussi son père, tandis qu’est évoquée son « inquiétante calvitie ». Le roi Charles III, chef d’État de 15 pays, apparaît « pas très démonstratif » et soucieux surtout de son image. Ne sont épargnées ni Kate, l’épouse de William, ni Camilla, la reine consort, qui est décrite comme manigançant pour obtenir la couronne à l’aide d’un conseiller en communication prêt à tous les coups bas.

Buckingham Palace n’a pas réagi aux déclarations du prince de 38 ans, mais des sources « proches de la famille royale » ont fait savoir leur mécontentement dans la presse, très hostile aux « Sussex ».

L’une de ces sources a dit à The Independent que selon le roi, Camilla et William, la situation ne pourra pas s’améliorer, car Harry a été « kidnappé par un culte de la psychothérapie et par Meghan ».  

Impopularité record

Dans The Sun, une source affirme que même si « Harry a épargné son père », « cela n’a que peu d’importance pour Charles, car il s’en est pris à Camilla », une « ligne rouge ».  

Le prince a donné plusieurs interviews télévisées pour promouvoir et défendre son livre, depuis la Californie où il s’est exilé en 2020 avec son épouse Meghan. Il a assuré vouloir « se réapproprier » son histoire, mais ne vouloir « blesser » personne.

Dans un entretien au magazine People publié mardi, il décrit son livre et ses « vérités » comme s’inscrivant « dans la continuité de (son) cheminement en matière de santé mentale ».

« C’est une description sans fard de ma vie – le positif, le négatif et tout ce qu’il y a entre les deux », confie-t-il.

Mais les Britanniques semblent lassés de ce feuilleton princier. Selon un sondage YouGov, 64 % des Britanniques ont une image négative de Harry, même si la sympathie est plus forte parmi les jeunes.  

« Ce livre montre qu’Harry est très tourmenté », explique à l’AFP Pauline Maclaran, professeure de marketing à la Royal Holloway University of London et co-autrice d’un livre sur la monarchie dans la culture populaire. « On voit comment le passé, en particulier la mort de sa mère (en 1997, NDLR), l’a abîmé ».

La professeure semble en revanche peu inquiète des répercussions sur la famille royale : « La monarchie a traversé de nombreuses autres menaces et d’une certaine manière, les turbulences des années 1990 et les scandales étaient alors bien plus grands ».