Retiré dans un ancien pensionnat pour Autochtones, Jeremiah Camp passe ses journées à arracher les croix de bois anonymes qui marquent les tombes d’enfants morts. Il les remplace par des pierres qu’il burine à leurs noms parce que « les enfants enterrés ici méritent mieux qu’une tombe marquée par un symbole du culte qui les a assassinés ».

Son passé d’analyste dans le monde des affaires vient cependant le rattraper. Des milliardaires, dont les noms figurent sur une liste qu’il a autrefois dressée pour un richissime employeur, meurent les uns après les autres. La nouvelle dirigeante de la firme qui l’employait veut le tirer de sa retraite pour faire la lumière sur la situation.

Jeremiah Camp se trouve ainsi écartelé entre deux mondes, entre une riche élite et une petite communauté autochtone dépossédée.

Le propos semble sérieux. Il l’est. Mais Thomas King insuffle une bonne dose d’humour dans le récit. L’auteur canadien d’origine cherokee crée une galerie de personnages pittoresques et attachants, à commencer par l’aïeule Nutty Moosonee, les Trois Ours (un trio inséparable formé par le chef de la Première Nation Cradle River Louis Bear, sa fille Enola et son neveu Wapi) et, bien sûr, Lala, la petite-fille de Nutty, qui prend en affection l’austère Jeremiah Camp et le baptise Pop-Up.

Il faut bien sûr ajouter les méchants, dont le maire de la ville voisine de Gleaming, Bob Loomis, qui veut déplacer la communauté de Cradle River pour installer à la place un gros projet immobilier.

Dans le passé, Thomas King a écrit des romans policiers ainsi que des essais marquants sur la situation des Premières Nations. Dans Seuil de tolérance, sous le couvert d’un thriller intrigant, il réussit à dépeindre les conditions de vie terribles, mais aussi la résilience d’une communauté.

Seuil de tolérance

Seuil de tolérance

Mémoire d’encrier

410 pages

7/10