Les adeptes de littérature sportive, c’est l’évidence, écrivent moins sur le sport que sur la vie. Avec Faux rebonds, son troisième livre, James Hyndman célèbre certes la beauté même du tennis, ce sport qu’il affectionne depuis l’enfance, mais s’en sert aussi comme d’une métaphore féconde. Et soudainement, le tennis n’est plus seulement qu’une affaire de raquette et de balles, mais de filiation, d’amour, de courage et d’orgueil.

Un joueur se trouve face à une balle, lui permettant d’achever pour de bon son adversaire. « Tu t’avances vers elle, tu la vois qui s’offre à toi comme une fleur, et voilà que les muscles se contractent, que ta course, de fluide qu’elle était, devient lourde et encombrée », écrit le populaire comédien dans une chronique (« Conclure ») qui parle autant, sinon davantage, de la fugacité de tout et la fragilité de nos certitudes que de sport.

Après Océans (2018) et Une vie d’adulte (2020), James Hyndman signe donc ici son livre le plus joliment singulier et peut-être le plus personnel. Liste de souvenirs, réflexions sur la paternité, saynètes dialoguées, monologue comique : l’acteur révèle la polyvalence de son jeu à travers quelque 25 textes brefs, dont plusieurs ont déjà paru entre les pages de Tennis-mag, auquel il collabore depuis 2015.

Et si certains de ces chapitres relèvent davantage du registre du commentaire sportif, et que d’autres ne méritaient pas forcément d’être immortalisés dans un livre (des textes sur la pandémie, notamment), l’auteur joue bel et bien sur ce court que l’on appelle la littérature, celui où l’intime et l’universel se télescopent, quand il se remémore son oncle qui a un jour été arbitre à Wimbledon grâce à un fascinant alignement de planètes (« Drobny »), ou lorsqu’il raconte le courroux de son père devant la domination de son fils sur le terrain (« Bilan »).

Son hommage à un de ses entraîneurs (« Photo perdue ») encapsule parfaitement cet équilibre entre humour, perspicacité du regard et mélancolie douce avec lequel l’auteur emploie le tennis comme prisme à travers lequel cette joute parfois un peu brouillonne qu’est l’existence trouve momentanément son sens et sa cohérence. Chez Hyndman, l’écriture et le sport sont tous les deux, à leur manière, des écoles de la vie.

Livre d’une finesse qui pourra ravir les néophytes de la balle jaune, Faux rebonds sonne pourtant vrai, comme si James Hyndman s’abandonnait enfin complètement au match de l’écriture. Et un jour, « [s]ans crier gare, le tennis prend un autre sens, son vrai sens peut-être. Il devient un rythme, une respiration, un flux auquel m’accorder. [...] Un espace libre où chaque coup, chaque course, chaque surprise invite à improviser, à créer, à s’exprimer ».

Faux rebonds

Faux rebonds

XYZ

144 pages

7/10