Une fata morgana est une sorte de mirage. Une illusion. Comme celle qui a poussé Sisi, une jeune Nigériane, à quitter son pays et ses parents pour l’Europe, faute d’avoir pu trouver un emploi malgré son diplôme universitaire.

C’est ainsi qu’elle accepte la seule porte de sortie qui lui est accessible : un aller simple pour la Belgique, où elle devra travailler dans le quartier rouge d’Anvers jusqu’à ce qu’elle ait remboursé sa dette et soit enfin libre de poursuivre ses rêves. Mais Sisi n’y vivra que huit mois avant d’être tuée. Son meurtre rapproche alors ses trois colocataires, de jeunes femmes qui, comme elle, ont dû quitter le Nigeria dans les mêmes conditions. Leurs rapports jusque-là superficiels se resserrent, les poussant à raconter chacune leur terrible histoire, qu’on découvrira en alternance avec celle de Sisi.

Ce deuxième roman de Chika Unigwe (le premier traduit en français) donne une voix inédite à ces migrantes africaines contraintes à la prostitution en Occident – un rare portrait troublant de vérité et issu des rencontres de l’autrice avec des travailleuses du sexe nigérianes lorsqu’elle vivait en Belgique. C’est également une fenêtre sur Lagos, l’une des villes les plus densément peuplées d’Afrique, où se confrontent désir de modernité et attachement aux traditions, faisant de l’autrice l’une des quelques plumes féminines à émerger du continent avec Chimamanda Ngozi Adichie (bien que toutes deux résident désormais aux États-Unis). Un roman à lire pour découvrir les facettes d’un autre monde par la voie de la littérature, et un nom à retenir qu’on espère pouvoir relire.

Fata morgana

Fata morgana

Globe

304 pages

8/10