L’encre sympathique, c’est cette « encre qui, incolore quand on l’emploie, noircit à l’action d’une substance déterminée », nous dit le narrateur à la page 91. C’est aussi la métaphore qui structure ce roman de Patrick Modiano, Prix Nobel de littérature en 2014.

L’écrivain met en scène son alter ego, Jean Eyben, qui reprend une vieille affaire abandonnée lorsqu’il était jeune détective à l’agence Hutte, soit la disparition d’une jeune femme qui a laissé un mystérieux carnet derrière elle. Son « enquête » le mène à Annecy puis à Rome, sur les traces de l’insaisissable Noëlle Lefebvre.

Les fans de Modiano seront en terrain connu. On y retrouve plusieurs clins d’œil à ses précédents romans, mais, surtout, on retrouve le style indissociable de l’écrivain aujourd’hui âgé de 74 ans : rêveur, poétique, un peu hors du temps.

Au fil des pages, et des déambulations du narrateur dans les rues de Paris, on rassemble les morceaux du casse-tête de la disparition, tout en sachant que ce n’est pas vraiment le but de ce roman.

Encre sympathique est avant tout une réflexion sur la mémoire, sur les « blancs » de notre existence. Un rappel qu’il n’est peut-être pas nécessaire de se souvenir de tout. C’est aussi un bel exercice de style dans lequel Modiano nous rappelle qu’il demeurera toujours fidèle à lui-même.

★★★

Encre sympathique, Patrick Modiano, Gallimard, 144 pages.