Se faire déclarer obèse morbide par un médecin. Se faire parler de son poids quand on consulte pour un simple mal de gorge. Voyager, quand les sièges d’avion sont tout sauf adaptés à sa stature. Composer avec les maladresses et les préjugés.

Tout ça (et bien plus) fait partie de la vie des personnes grosses. Plutôt que d’en pleurer, le spectacle F*ck ta grossophobie, qui sera présenté au ZooFest les 14 et 16 juillet, propose au contraire d’en rire.

« Tout devient moins malaisant une fois qu’on en a ri. C’est comme si on nommait l’éléphant dans la pièce », résume l’humoriste et chroniqueuse Josiane Aubuchon, lors d’une entrevue en visioconférence en compagnie de l’autrice et humoriste Marie-Hélène Racine-Lacroix – qui animera les deux soirées – et de la photographe Julie Artacho.

PHOTO ÉMILIE LAPOINTE, FOURNIE PAR LE ZOOFEST

Marie-Hélène Racine-Lacroix, en juin 2022

Rire des choses ridicules qu’on s’est fait dire, c’est aussi de souligner que ce n’est pas notre faute, qu’on ne mérite pas de se faire traiter comme ça.

Marie-Hélène Racine-Lacroix

Au programme : leurs deux numéros, celui de la chroniqueuse et autrice Catherine Éthier (qui abordera les maladresses de l’amie mince), et ceux de deux personnalités qui ne sont pas humoristes : l’artiste burlesque Rosie Bourgeoisie et la photographe Julie Artacho.

Militer par l’humour

Selon Julie Artacho, rire permet de dédramatiser les choses. « Il y a plein d’expériences hyper universelles liées aux corps gros, dit-elle. La grossophobie, la discrimination, ce n’est pas le fun, mais être gros, ce n’est pas grave. Je pense qu’en rire, ça peut un peu amener ça aussi. »

Julie Artacho a accepté volontiers de relever le défi du stand up. Les messages militants, dit-elle, passent beaucoup mieux quand il y a de l’humour. Elle semble à l’aise de le faire. « Je pense qu’on a tous un sens de l’autodérision qu’on a développé pour se protéger. » Son numéro, explique-t-elle, portera sur l’accessibilité. L’accessibilité dans les transports (« pour moi, voyager, c’est super terrifiant », l’accessibilité dans les sports (« il n’y a aucune machine adaptée pour faire du sport et il y a tout le temps des limites de poids ! »).

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

La photographe Julie Artacho

Josiane Aubuchon, pour sa part, abordera la grossophobie qu’elle a vécue dans un cadre médical. Quand un médecin l’a officiellement déclarée obèse morbide, ça a ouvert une boîte de Pandore chez elle. « Je me disais, voyons donc, obèse morbide, je suis active ! Il n’y aurait pas moyen de changer les mots et d’appeler ça, je sais ne sais pas moi, chubby ou rondoudou ? », questionne Josiane Aubuchon, déclenchant le rire des autres filles.

Marie-Hélène Racine-Lacroix parlera pour sa part des « niaiseries » qu’elle a entendues quand elle fréquentait des hommes, mais elle en aurait aussi long à dire sur le volet médical. « Un médecin a déjà repris ma pression plusieurs fois parce qu’il ne croyait pas que j’avais une bonne pression », raconte-t-elle.

« Ça concerne tout le monde »

Il s’agira des septième et huitième représentations du spectacle F*ck ta grossophobie. Le premier a eu lieu l’été dernier, au Minifest. Et chaque fois, disent les artistes, il se forme une belle complicité entre les humoristes et le public, déjà sensibilisé aux codes. Julie Artacho, qui faisait partie du public l’an dernier, le confirme. « C’est le fun d’entendre parler de notre réalité par des gens qui la vivent vraiment, et pas par des gens qui se l’imaginent dans une espèce de fantaisie grotesque. »

Cela dit, insiste le trio, le spectacle est ouvert à tous, il est « méga-inclusif », et n’a rien de moralisateur. Dans la description, on invite même les spectateurs à « amener [leurs] ami.e.s minces ».

« J’aime dire que, même si on voulait empêcher les minces de venir, ils sont tellement filiformes qu’ils pourraient se faufiler, de toute façon ! », lance Marie-Hélène Racine-Lacroix en riant.

Et la grossophobie, ça concerne tout le monde, estime Julie Artacho, qui souligne que pas mal tout le monde a peur de prendre du poids.

« C’est avant tout un show d’humour le fun, un show drôle, qui peut faire du bien à tout le monde », conclut Marie-Hélène Racine-Lacroix.

Le cabaret F*ck ta grossophobie sera présenté le 14 juillet à 22 h 15 et le 16 juillet à 17 h 30 au Théâtre Sainte-Catherine.

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