C’est décidément l’hiver des hommes fuckés à la télé québécoise. Après le collectionneur de cordons de Doute raisonnable et le pervers narcissique dans L’empereur, voici le tueur de l’Ouest d’Indéfendable, un détraqué qui fume du crack et qui trippe sur les cierges, toujours bien alignés sur sa table de chevet.

Agent de sécurité de nuit dans un immeuble de condos, chasseur de proies en plein jour, le tueur de l’Ouest, joué par Stéphane Demers, attaque des femmes dans la quarantaine jolies, émancipées et riches.

Depuis son arrivée à TVA la semaine dernière, le psychopathe à casquette noire a assassiné une esthéticienne de Mont-Royal et une souriante agente d’immeubles. Ce meurtrier asocial, qui s’appelle Daniel Raynaud, se confectionne même un scrapbook avec les photos de ses victimes, qu’il feuillette en s’enfonçant dans des « délires cabalistiques ».

Oui, il s’agit d’un personnage extragratiné qui coche toutes les cases – et même davantage – du terrifiant maniaque qui ferait l’objet d’une minisérie de « true crime » de HBO dans quelques années.

C’est la première fois qu’Indéfendable s’avance sur le territoire des tueurs en série et mettons que les auteurs y vont au fond, Léon, tant qu’il reste du bouillon.

IMAGE TIRÉE DE LA SÉRIE

Indéfendable

Le tueur de l’Ouest arbore des tatouages sur ses jointures. Il vit dans un appartement crasseux, qu’il partage avec un coloc bizarre (Patrick Lauzon), accro aux jeux de casino sur sa tablette. Niveau de déviance : extrême.

Dans cette intrigue qui siérait mieux à Doute raisonnable qu’à une quotidienne logée à 19 h, l’assassin pique ses victimes à la seringue, les ligote, les torture, les brûle et leur grave un symbole d’oméga sur la peau, à la pointe d’un couteau. Il ne les viole pas, mais les frappe avec une barre à clous, qu’il abandonne ensuite sur la scène du crime.

Cette histoire glauque et sordide, qui se poursuit cette semaine, a quand même eu un effet positif sur Indéfendable : elle a ramené dans les épisodes la sergente-détective Maryse St-Gelais (Marilou Morin), une policière attachante, brillante et dévouée, que l’on ne voit pas assez.

Je dirais la même chose à propos de la détective privée Claude Gagnon (Nathalie Madore) : utilisez-la plus souvent, parce qu’elle est vraiment payante à l’écran.

La dernière victime du tueur de l’Ouest, Évelyne Cardin (Noémie Yelle), une gestionnaire de portefeuille de 40 ans, a vécu l’horreur dans l’angoissante chambre à coucher du fou furieux, bâillonnée et attachée à une chaise de bureau.

De série judiciaire, Indéfendable a basculé dans le film d’horreur. Le désaxé Daniel Raynaud, gelé comme une bine, a parlé du sexe de la femme comme d’un temple sacré. Son trip ? Faire écrire ses victimes dans un cahier, se délecter de leur agonie, puis observer la vie quitter leurs yeux.

Puis, le malade mental a hurlé : « Glorieux transfert d’énergie vitale. Force. Jouissance. Orgasme métaphysique ! ». Comme dirait Pierre Poilievre à propos du fiasco d’ArriveCAN : WTF.

À côté de ce tueur de l’Ouest complètement sauté, inspiré du vrai tueur de l’avenue Laurier, Agostinho Ferreira, l’influenceuse kidnappeuse Mylène Kirouac (Rebecca Vachon) est un modèle d’équilibre psychologique.

Autre dossier d’Indéfendable dont il faut discuter, celui du facteur agresseur Jérémie Martel (Lucien Ratio). Épinglé pour le viol d’Amina Hamadou (Madeline Sarr), il a nié et juré à son avocate Kim Nolin (Julie Trépanier) qu’il n’avait jamais, au grand jamais, touché à cette femme, malgré une incriminante preuve d’ADN déposée contre lui.

Ç’aurait pu être plausible. Car ce même Jérémie Martel, sosie de l’écrivain David Goudreault, a été soupçonné de l’enlèvement d’Inès Saïd (Nour Belkhiria), dans lequel il n’avait pas trempé. Mais, entre deux épisodes, pouf, Jérémie Martel a tout avoué et plaidé coupable à l’agression d’Amina, comme s’il avait été traversé par une illumination divine. Se pourrait-il qu’il nous manque une pièce du puzzle pour mieux comprendre cette volte-face soudaine ?

À la liste des personnages intrigants d’Indéfendable, j’ajoute Jessica Renaud (Émilie Lajoie), ancienne maîtresse de MLegrand (Martin-David Peters), qui a été promue au rôle de conjointe officielle.

Elle est rusée, cette Jessica Renaud. Elle manipule clairement Frédéric Legrand pour utiliser son bureau du cabinet Lapointe, Macdonald et Desjardins, que les policiers ne peuvent mettre sous écoute. La discussion codée entre Jessica et son père emprisonné expliquait clairement le plan visant à enfirouaper MLegrand.

Maintenant, réglons une dernière question brûlante : l’avocate Marie-Anne Desjardins (Anne-Élisabeth Bossé) renfilera-t-elle sa toge de criminaliste ou prolongera-t-elle, de façon indéterminée, son séjour de ressourcement au Costa Rica ?

Mon hypothèse ? Marie-Anne, qui se remet d’une dépression, reviendra faire un saut de puce à Montréal, mais disparaîtra graduellement des scénarios d’Indéfendable.

On constate depuis quelques semaines que l’ancienne stagiaire Kim Nolin prend du galon, qu’elle hérite de grosses causes et que ce n’est qu’une question de temps avant qu’elle ne s’installe définitivement dans le même espace que Léo Macdonald (Sébastien Delorme).

Cela me semble aussi évident et flagrant que la découverte récente, par les réalisateurs du feuilleton, du drone pour filmer les scènes de transition entre deux histoires.