Les colons défrichent les spas des téléréalités québécoises depuis 2003, une année charnière où Occupation double : Blainville a recruté ses premiers spécimens d’hommes rustres et simplets, toujours 100 % fébriles à l’idée d’explorer le territoire non cédé du tout-inclus.

Il en passe, des colons, dans une saison d’OD, du plus mal dégrossi à l’arriéré attachant dans son ignorance. Et la cuvée martiniquaise de Noovo a été particulièrement foisonnante en matière de mâles peu éduqués, des M. Big qui se pompent le biceps davantage qu’ils ne labourent leur matière grise.

Le colon mis en vedette dans l’excellente téléréalité Le lot du diable de la chaîne Historia, qui démarre vendredi à 20 h en simultané sur Séries Plus, relève d’une catégorie pas mal plus réjouissante que celle propulsée par OD.

Privé d’eau courante et d’électricité, le colon du Lot du diable survit grâce à sa débrouillardise, sa ruse et quelques dollars du Dominion.

Il isole les murs de sa cabane au Canada avec de la sphaigne fraîchement arrachée du tronc d’arbre. Il sait comment enfumer la tanière d’un porc-épic pour le capturer et l’embrocher par la suite. Et il ne se plaint pas de dormir directement sur le sol froid et humide, entre deux racines de conifères et trois grosses roches pointues.

Après la forêt abitibienne de la Grande Dépression, la populaire téléréalité d’Historia, qui a fracassé des records d’écoute en 2017, recrée un banc de pêche de Paspébiac, en 1934. Les 16 braves concurrents de la deuxième saison du Lot du diable : la conquête de la mer y vivent comme à cette dure époque où les « zarzais » — les Anglo-Normands de l’île de Jersey — contrôlaient le commerce de la morue en Gaspésie.

Le premier épisode présente rondement les « personnages » qui bûcheront pour récolter le grand prix de 100 000 $. Ces 16 concurrents proviennent de partout au Québec et pratiquent des métiers pas nécessairement associés au survivalisme en forêt : coiffeuse, antiquaire, fonctionnaire, éducatrice spécialisée, enseignante, apicultrice, pompier, kinésiologue, chercheur ou infirmier. Évidemment, les candidats qui ont tâté de la charpenterie-menuiserie partent avec une longueur d’avance dans cette production à mi-chemin entre Survivor et Les filles de Caleb.

Mais au Lot du diable, comme dans toute téléréalité axée sur la compétition, les grosses têtes risquent la décapitation et les maillons faibles passent à la trappe. Rapidement dans le jeu, on se met à détester des colons aux fortes personnalités, dont une au caractère de « petite Germaine » et un autre franchement désagréable et impulsif, qui râle contre la génétique de « mange marde » de son équipe. Pas le plus sympathique, mettons.

On peste aussi contre les fainéants qui se reposent près du feu de camp au lieu de monter les murs de leur « cook room », une maisonnette typiquement gaspésienne qui sert de cuisine et de dortoir aux participants-pêcheurs.

PHOTO LAURENCE LABAT, FOURNIE PAR HISTORIA

Louis Champagne dans son rôle d’inspecteur de la colonie

Comme dans le premier chapitre du Lot du diable, le comédien Louis Champagne reprend son rôle d’inspecteur de la colonie. C’est lui qui supervise le progrès des 16 colons, séparés en deux factions distinctes, celle du rocher et celle de la falaise. Notre inspecteur-animateur est juste assez sévère pendant les assemblées du conseil, où se déroulent les éliminations, entre misère, mer et morue.

Non seulement Le lot du diable nous replonge dans l’histoire du Québec rural, mais, en plus, il installe une captivante dynamique d’alliances et de stratégies pour rafler le magot. C’est très bien exécuté. La scène d’ouverture, tournée sous forme de plan séquence, évoque même Les pays d’en haut.

La propriétaire du magasin général, Marguerite Turgeon, renoue également avec son boulot en ouvrant un comptoir près de Port-Daniel. Café, clous, macaroni, hameçons et farine, ces précieux articles coûtent cher, et Marguerite ne les brade pas en échange d’une paire d’yeux doux.

Conseil de pro, ici : programmez et enregistrez les dix épisodes du Lot du diable, quitte à les visionner plus tard. Parce que les méthodes de rattrapage d’Historia ou de Séries Plus n’atteignent vraiment pas l’efficacité d’un Crave ou d’un Tou.TV, disons-le.

Le gala de l’ADISQ ressuscite

De 677 000 téléspectateurs esseulés en 2021, l’audience du gala de l’ADISQ de Radio-Canada est remontée à 1 010 000 personnes dimanche soir. Cette hausse appréciable a ramené la fête de la musique québécoise aux niveaux mesurés en 2020 (1 015 000) et 2019 (1 230 000).

Avec une salle pleine galvanisée, des artisans crinqués, un Louis-José Houde en grande forme et la disparition des mesures de distanciation, les astres étaient alignés pour que la cérémonie décolle. L’avant-gala copiloté par Isabelle Racicot et Nicolas Ouellet (comprendre : le tapis rouge) a retenu l’attention de 609 000 mélomanes de salon.

Par contre, deux émissions canons de TVA ont été plus populaires que le gala de l’ADISQ dimanche, soit Chanteurs masqués (1 650 000) et Révolution (1 207 000). Chez Noovo, le dernier épisode d’Occupation double Martinique a été vu par 461 000 fans, qui retrouveront leur quotidienne d’OD à partir du 14 novembre. Vous sentez-vous « bousculés » d’émotion comme Clémence, alias Robe bleue, alias Jinx ?