Les Artis ont coulé, les prix Iris ont sombré, mais Louis-José Houde a sauvé dimanche soir le gala de l’ADISQ de l’extinction.

Même à son 17e tour de piste consécutif, jamais nous n’avons senti l’humoriste-animateur blasé, en panne d’idées ou sur le pilote automatique. Il a encore servi un monologue d’ouverture brillant, précis et rempli de perles d’humour. Ça paraît quand un maître de cérémonie aime son sujet — la musique québécoise – et qu’il injecte cœur et énergie dans l’écriture de ses textes, ciselés à la perfection.

Chacune des présences de Louis-José Houde, qui attrapait habilement les perches tendues par les vedettes, a déclenché des rires dans la foule, réactive, bruyante et allumée. Enfin. Ça fait une méchante différence de présenter une fête devant une salle Wilfrid-Pelletier remplie à craquer, plutôt que dans un studio de télé vide et froid.

La première partie de ce gala de plus de 2 h 15 min a été pratiquement impeccable, en excluant la bourde de Ginette Reno, qui a remis un Félix à la chanson « Capitole Funky avec Jay Scøtt » au lieu de la chanson Copilote de FouKi et Jay Scøtt. Cette grande dame du showbiz québécois aurait dû porter ses lunettes de lecture. C’est dommage qu’elle ait semé ce type de confusion (non nécessaire) au parterre.

Cela dit, excellente idée que de partir le bal des Félix en remettant un gros trophée. Peu de temps après, gigantesque numéro de Mario Pelchat et Bruno Pelletier, qui ont pigé dans le répertoire de l’un et l’autre pour nous offrir le meilleur segment du gala. Autre temps fort : le jumelage de Lisa LeBlanc et Édith Butler. Le plafond de la Place des Arts a quasiment levé.

PHOTO DENIS GERMAIN, COLLABORATION SPÉCIALE

Bruno Pelletier, lors de son numéro avec Mario Pelchat

Le rythme effréné a ralenti en deuxième portion avec une prestation assez pénible de Corneille. Ce fut également la portion où Hubert Lenoir, la star du 44e gala de l’ADISQ, a montré le meilleur et le pire de ce qu’il peut faire. Le mieux : quand il a rendu hommage au romantisme et quand il a parlé du refus de l’inertie et des conventions. Le pire : quand il a poivré chacune de ses interventions d’une « fucking » bonne soirée, d’un « shut the fuck up », de « c’est fucking nice » ou d’un « crissez-moi patience, ça va prendre plus que 42 secondes ». Hubert Lenoir avait l’air de jouer dans un mauvais film d’ado ou dans des retailles de Watatatow.

Cet auteur-compositeur-interprète de 28 ans a assez de talent pour ne pas s’abaisser à la provocation de bas étage. Il fournit ainsi des munitions gratuites à tous ses détracteurs.

Seulement 10 statuettes — contre 12 en 2021 — ont été décernées dimanche soir à Radio-Canada. C’est très peu pour un gala relayé en heure de grande écoute. Heureusement, les numéros musicaux ont été bien plus intéressants et pertinents que les remerciements.

En conclusion ? Il faudrait un Louis-José Houde pour chacun des galas québécois, qui éviteraient ainsi le débranchement.

Ses gags sur le « gagnant lent », le gong sous la grêle ou l’artiste assis le plus loin dans la salle ont toujours visé au centre de la cible. Le ton était juste, ni trop baveux ni trop mielleux. Je ne voudrais pas être celui ou celle qui succédera, un jour, à Louis-José Houde à la barre de l’ADISQ. La comparaison sera cruelle et dévastatrice.

Vivre son country à OD

Livraison de pizza Salvatoré, fête costumée et un Jay Du Temple enjoué, Occupation double a retrouvé son panache et son plumage préscandale en offrant même une tribune musicale à notre carreleur quétaine autoproclamé, Jimy, 29 ans, alias le cowboy aux chandails puants.

Les paroles de la composition originale de Jimy, lancée pendant les festivités de l’ADISQ, attention aux nominations l’an prochain, se lisent, vous l’aurez deviné, au premier degré : « c’tu trop beau pour être vrai, y serait-tu trop tôt si on s’aimait ? ». Perso, toute référence à l’émission de Louise Sigouin dans une chanson pop passe automatiquement le test.

Aussi, Jimy a martelé qu’il « aime ça vivre sa vie comme une toune country ». Donc, ses textes ne s’enfargeront pas dans les métaphores et les allégories, ça a le mérite d’être clair.

Sa douce moitié Claudia, la comptable de 26 ans, a fondu et Jimy a répété que Claudia, « c’est une fille qui a des valeurs familiales, qui parle de ses yeux ». Notre bon Jimy aurait-il cité, sans le savoir, le classique de Joe Bocan On parle des yeux ?

L’épisode de dimanche soir, meilleur que celui de la semaine dernière, nous a ramené une vibe d’OD avant que la production n’efface au montage les logos de Couche-Tard dans le party d’Halloween. Après une élimination qui l’a « chambranlé », Mickaël, le poseur d’acier de 23 ans, a rendu hommage à son grand frère dans l’aventure, Jimy : « Je veux être dans ton ombre, je te suis toujours », a déclaré Mickaël en oubliant que marcher dans les pas de son mentor, ou suivre ses traces, était une option plus inspirante que de se cacher derrière lui.

Questionnée à savoir pourquoi elle n’a pas davantage joué du coude pour ses coups de cœur, la coiffeuse-coloriste de 27 ans Virginie a été d’un réalisme poétique : « Ce n’est pas personnel à ma personne », a-t-elle répondu.

C’est du calibre de Jimy qui rappelait, la semaine passée, que « quand il y a des choses qui me rejoignent pas totalement, je me prends une neutralité ». Bienvenue à Occupation double : Suisse !