Les quatre mecs de la comédie de Radio-Canada sont rondouillets, impuissants, cassés, médicamentés, fragiles, déprimés et botoxés. Si c’est ça, avoir des privilèges, je renonce tout de suite aux miens. Bonjour, la déprime.

En même temps, c’est super drôle de voir ces quatre bonshommes s’enfoncer au troisième sous-sol du pathétisme dans la maison surpeuplée de Christian (Christian Bégin). L’Extra de Tou.tv offre depuis jeudi la troisième (et dernière) saison des Mecs et j’ai englouti d’une bouchée 5 des 10 épisodes de 30 minutes. Et maudit que j’ai ri.

C’est dommage que la sitcom coécrite par Jacques Davidts et Maxime Caron s’arrête au moment où elle atteint son maximum d’efficacité humoristique. La troisième saison s’avère, jusqu’à présent, la plus comique, la mieux ramassée et la plus punchée, je trouve.

Les mecs n’est pas du tout une série où des quinquagénaires réactionnaires réclament un « espace sûr » pour se plaindre dans leur confort bourgeois. Il s’agit plutôt d’une observation rigolote, crue et réaliste sur les ravages du vieillissement.

Dans Les mecs 3, que Radio-Canada relaiera gratuitement à l’hiver, nos quatre boys en détresse s’approchent du cimetière et ils ne trippent pas.

Leurs corps lâchent, les gens meurent autour d’eux et ils gobent des antidépresseurs ou des anxiolytiques qui les privent d’orgasme. Aucun des quatre ne vit de relation amoureuse stable et aucun d’entre eux ne s’en approche.

Cette enfilade de situations moches débouche sur une série d’humiliations hilarantes pour nous. Le nouveau coach de tennis de Martin (Normand Daneau), que joue habilement Paul Doucet, vole la vedette. Est-il gai ou juste très taponneux ? Pas de divulgâcheur ici. Il se pointe au deuxième épisode.

Toujours aussi paresseux et pingre, Simon (Alexis Martin) explore de nouvelles avenues professionnelles, tandis qu’Étienne (Yanic Truesdale) vit à fond son célibat en enchaînant les conquêtes, dont un curé et un millénarial avec qui il vibe bien, avant de se faire « ghoster ».

Les femmes des Mecs, qui font contrepoids aux niaiseries de leurs compagnons, reviennent en force, dont la très acérée Sophie (Nathalie Mallette) qui navigue dans la séparation, de même que l’aérienne Sylvie (Pascale Bussières), l’ex-femme de Christian qui réapparaît à un moment payant pour elle.

Bien sûr, Natalie (Julie Ménard) reste derrière son bar et le flirt qu’elle a eu avec Christian renaîtra en deuxième moitié de saison.

D’ici là, vous verrez des scènes bidonnantes avec une urne funéraire biodégradable, une cérémonie désastreuse sur le mont Royal, un feu de cuisine rassembleur, des chandelles à la cannelle romantiques et le retour de la préposée au triage bête (Maude Bouchard) de l’hôpital.

Le syndrome de Stockholm de L’échappée

Depuis son retour à l’automne, L’échappée de TVA nous gâte en intrigues bizarres et tarabiscotées, qui surpassent même le volet sectaire du gourou Jean-Simon Cardinal (Steve Gagnon), de ses sœurs témoins et des trapèzes toxiques.

Et pour une raison que ma psy reliera peut-être à une expérience traumatique vécue dans la petite enfance, on y revient toujours, je suis incapable de flusher L’échappée de mon enregistreur.

Tous les lundis, je me pointe à Sainte-Alice en me grattant le coco avec une anxiété nimbée d’excitation : mais que va-t-il donc se passer ce soir, pour l’amour du saint Coq ?

Le téléroman de TVA est littéralement devenu un accident de train, parce que a) l’intrigue tourne autour d’un jeune homme qui a été écrabouillé par une locomotive et b) parce que ça déraille pas à peu près sur les réseaux sociaux, au grand désespoir de la sergente-détective Maya Déry (Sophie Cadieux), qui n’a « jamais rien vu d’aussi weird ».

Le dernier épisode a dévoilé que la victime du Petit train boréal, Sébastien Davet, 22 ans, s’appelait Gros Tas Pouet sur Instagram. Je n’invente rien. C’est la vlogueuse JennyBerry32 qui l’a révélé pendant son « live », qui ruine en cadeaux le pauvre Jacob Champoux (Mathéo Piccinin Savard).

Il se passe un paquet de trucs étranges en simultané dans L’échappée, ce qui rend ce téléroman diaboliquement attachant. La psychiatre Leila Kouzam (Nathalie Doummar) parle de son krav-maga devant une minuscule machine à café, Clément (Rémy Girard) en perd des bouts dans la plate-bande chez Jade (Charlotte Aubin), Noémie (Anick Lemay) prépare l’ouverture de sa garderie au Costa Rica, tandis que Manon (Sonia Vachon) beurre ses rôties avec de la margarine, avant de les glisser dans un ziploc.

Aussi, le petit Jules Labonté (Mathieu Drouin) — devenu grand — parle encore à son père biologique Bill Beaudry (Normand D’Amour) qui l’a kidnappé et retenu en otage… en Amérique du Sud.

Le lien entre tout ça ? Pas clair. Mais assez fort pour qu’on y revienne semaine après semaine.

Il ne reste qu’une demi-saison aux auteures de L’échappée pour boucler toutes leurs histoires avant la fermeture définitive du centre au printemps 2023. Et j’ai un tas de questions.

Qu’adviendra-t-il de la Pointe-à-Francœur ? Va-t-on un jour entendre des extraits de la balado Lelièvre et la tortue de la journaliste Daphné Fournier (Elisabeth Locas) à propos du tueur en série David Lelièvre (Patrick Hivon) ? Et qui a détartré les dents de la toxicomane Joséphine (Juliette Gosselin) ?

On veut des réponses, ainsi que le nom du dentiste qui a fait des miracles avec la bouche de la fille de Thomas (Sylvain Marcel).