Une série documentaire de crime véritable à propos d’une secte où un leader despote, qui s’autoproclame le Prophète, épouse 78 femmes, dont 24 d’âge mineur, et prédit la fin du monde en plein désert de l’Utah ? Présent !

C’est officiel que je la traverse en une soirée sans battre des paupières et en engloutissant une quantité gênante de Party Mix. C’est à la fois fascinant et choquant, captivant et révoltant. Et très dégoûtant, cibole.

Dans la lignée des fidèles en tunique orange pétant de Wild Wild Country et des adorateurs de Sirius – l’étoile, pas la radio – de l’Ordre du Temple solaire sur la plateforme Vrai de Vidéotron, Netflix propose Keep Sweet – Pray and Obey (Keep Sweet – Prie et tais-toi, en version française), sur l’esclavage sexuel qui a été pratiqué au début des années 2000 dans l’Église fondamentaliste de Jésus-Christ des saints des derniers jours.

Précision : il ne s’agit pas ici de mormons traditionnels, mais bien d’une frange de dissidents fêlés qui vénèrent les mariages pluriels et le style vestimentaire colonial.

Keep Sweet repose sur les braves témoignages de plusieurs femmes qui ont – Dieu merci ! – quitté ce dangereux mouvement radical, qui les forçait à épouser des hommes ayant l’âge de leur arrière-grand-père.

Pendant quatre épisodes d’une heure de Keep Sweet, le format idéal pour ce type de production, les images d’archives glauques défilent sous nos yeux, et un enregistrement audio particulièrement dégueulasse ponctue le quatrième et dernier épisode. On y entend la voix nasillarde du gourou polygame Warren Jeffs préparer une préadolescente de 12 ans à une séance religieuse initiatique.

Comprendre : ce prophète autoproclamé viole une fillette de 12 ans – qui est également sa femme – devant une poignée de ses autres épouses. Oui, $@#&*, vous avez le droit de sacrer ici. Je l’ai fait abondamment. Comme Anne-Marie Cadieux dans une scène épique du film de Robert Lepage.

Ce Warren Jeffs est une véritable ordure, dont la soi-disant piété lui sert de paravent pour commettre des crimes horribles. À l’automne 2002, alors qu’il a 47 ans, ce comptable peu séduisant succède à son père à la tête de l’Église fondamentaliste de Jésus-Christ des saints des derniers jours et en radicalise les pratiques, déjà contraignantes et complètement sautées.

Image fournie par Netflix

Rulon et Warren Jeffs

La première chose que Warren Jeffs accomplit ? Il épouse plusieurs des femmes de son papa, bien sûr ! Ce qui signifie, techniquement, que le gourou passe la bague au doigt à plusieurs de ses propres mamans. Pas fucké à peu près, le bonhomme.

Cette secte d’illuminés interdit le denim du diable et la couleur rouge, réservée au retour de Jésus sur Terre. Au sein du groupe, établi à Short Creek, village à cheval entre le Nevada et l’Utah, les membres vivent coupés du monde réel, sans journaux, ni internet, ni télévision, ni aucune forme de fun.

Des règles strictes forcent les femmes à porter de longues robes de type Petite maison dans la prairie, sous lesquelles elles enfilent des sous-vêtements qui couvrent leurs corps du cou aux poignets et jusqu’aux chevilles. Quant à leurs cheveux, qu’elles ne coupent jamais, elles les portent en chignon tressé comme au XIXe siècle.

Image fournie par Netflix

Les femmes de la secte doivent porter de longues robes de type Petite maison dans la prairie.

Les hommes, surtout les vieux, ont beau jeu. Ils vivent avec une trâlée de conjointes, qu’ils obligent à les border tous les soirs – avec tout ce que cela implique. Le monstrueux Warren Jeffs a même offert 67 jeunes femmes en mariage à ses chums de gars.

Ce prophète pourri exerce un contrôle maniaque sur ses ouailles. Il les épie avec des caméras et les menace de brûler en enfer à la moindre niaiserie.

Le gourou a le pouvoir d’excommunier les récalcitrants et ensuite de réassigner leurs épouses et enfants à d’autres fidèles. Il arrache également des fillettes à leurs mères pour les envoyer dans une sorte de camp d’entraînement pour épouses adolescentes, au fin fond du Texas.

Là, après ces images de film d’horreur bien réel, vous hurlez sûrement : mais pourquoi personne n’a fui ou dénoncé ce groupe avant ? Keep Sweet l’explique avec clarté. Parce que ces gens ont été endoctrinés au berceau. Parce qu’ils ne connaissent que cette vision débile de l’univers. Parce qu’ils vivent dans la peur constante de décevoir le Prophète et de ne pas accéder à Zion, leur version du paradis.

Et il existe, ce Zion. Vous le verrez dans Keep Sweet. C’est un endroit situé à Eldorado (ça ne s’invente pas), au Texas, où seules les couleurs pastel sont autorisées.

À Zion, la Terre promise, on chante la gloire de Dieu avec un immense sourire au visage. À Zion, les femmes apprennent le rôle précis que cette Église de fous leur réserve, soit d’être douces, de faire des enfants, de suivre les règlements et de se taire. Heureusement, des courageuses ont désobéi.