Troisième ville en importance au Québec, Laval aura un PIB supérieur à la moyenne québécoise cette année et l’an prochain. Malgré tout, Laval doit aussi composer avec la pénurie de main-d’œuvre. Les décideurs et les entreprises ont décidé de s’y attaquer de front en mettant de nombreuses initiatives de l’avant. Explications.

Selon Desjardins, la croissance économique de Laval devrait terminer l’année 2023 à 3,1 % et osciller autour de 2 % en 2024. « Dans le contexte actuel d’inflation et de hausses des taux, les nouvelles à Laval sont quand même bonnes », soutient Catherine Gagnon, économiste pour Laval Économique, la société de développement économique de la ville.

Cela dit, toujours selon Desjardins, à l’instar du reste de la province, tous les secteurs d’activité devraient ralentir en 2024 à Laval, où vivent 450 000 personnes.

Qui plus est, avec 46 000 emplois à pourvoir d’ici 2026 (18 000 nouveaux postes et 28 000 départs à la retraite à combler), rien n’est dans la poche. D’ailleurs, six Lavallois sur dix (donc environ 146 000 personnes) travaillent à l’extérieur de la ville. « Il y a là un beau bassin de travailleurs auxquels il faut s’intéresser », explique Bonnet Huor, commissaire aux affaires internationales et à la main-d’œuvre à Laval Économique.

Parmi les initiatives porteuses, disent les deux employés de Laval Économique, il y a la « Stratégie lavalloise de main-d’œuvre ». Dotée d’un budget de 7,2 millions, elle s’étale de 2023 à 2026.

On a créé le site web talentlaval.com pour mettre en valeur les forces de Laval, mais on va surtout accompagner les entreprises pour les aider à attirer et retenir les travailleurs localement et à l’international. Ça passe entre autres par de meilleures pratiques d’affaires et de ressources humaines.

Catherine Gagnon, économiste à Laval Économique

« On accompagne les entreprises à tous les niveaux, de la jeune pousse à la grande entreprise qui exporte. On est diversifié et résilient. C’est là l’une des grandes forces de Laval », ajoute de son côté Bonnet Huor.

Des solutions

La Société de transport de Laval (STL) a mis en place un projet pilote où des taxibus desservent certaines zones industrielles. « On veut connaître l’achalandage, récolter des données et donc savoir si les besoins sont là. Ce serait un outil de plus pour attirer des travailleurs », explique M. Huor.

Le plus récent solde migratoire à Laval (2022) a été négatif de 815 personnes et pourrait laisser croire à une sorte d’exode des Lavallois. « Mais il s’agit de la migration interrégionale, tient à préciser Catherine Gagnon. Or, quand on regarde les gens hors Québec qui sont venus s’installer à Laval, on parle plutôt de 3449 nouveaux résidants. »

Outre le maillage entre entreprises locales visant à rapatrier une partie des chaînes d’approvisionnement, certaines autres initiatives semblent vouloir porter leurs fruits en cette ère de pénurie de main-d’œuvre, souligne Caroline De Guire, PDG de la Chambre de commerce et d’industrie de Laval (CCILaval).

Il y a, par exemple, des ententes avec les syndicats pour mettre en place des modèles collaboratifs où les entreprises manufacturières se prêtent de la main-d’œuvre entre elles, selon les périodes de pointe. On est en train de regarder si on ne pourrait pas transposer ce modèle aux commerces et aux entreprises touristiques.

Caroline De Guire, PDG de la Chambre de commerce et d’industrie de Laval

L’économie circulaire et le souci de l’environnement sont également des préoccupations auxquelles s’intéressent les entreprises de l’île Jésus, ajoute Mme De Guire.

« Nous avons, dit-elle, créé Symbiose Laval, qui est un parapluie d’initiatives et de projets. On a ciblé 700 entreprises. On est même en train de mettre en place une sorte de ‟Marketplace” pour que les résidus des uns fassent le bonheur des autres. On crée une banque de repreneurs. »

Mais tout n’est pas rose, ajoute-t-elle. Nombre d’entreprises et de commerçants appréhendent le remboursement en janvier prochain des prêts accordés par le gouvernement durant la pandémie.

Une ville attrayante

Lorsque l’usine qu’elle dirigeait à Lachine est devenue beaucoup trop petite, Karina Massicotte, PDG d’Aliments Morehouse Canada, n’a pas hésité longtemps à faire construire de nouvelles installations à Laval, où elle et ses 110 employés ont emménagé en mars 2023.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Karina Massicotte, PDG d’Aliments Morehouse Canada

Le prix des terrains était beaucoup plus abordable qu’à Montréal. Et en plus, on n’est pas loin de l’ancienne usine. Mes employés sont à l’envers de la circulation quand ils viennent travailler. Ça nous a permis de garder tout notre monde.

Karina Massicotte, PDG d’Aliments Morehouse Canada

Entreprise agroalimentaire spécialisée dans les condiments (vinaigrettes, mayonnaises, moutardes, etc.), la PME fabrique des produits pour les marques privées, mais possède également sa propre marque : Le Grec.

« On est en croissance, dit Karina Massicotte. On crie haut et fort qu’on a besoin de monde. On mise sur la formation et sur les compétences de nos employés. On a automatisé les emplois à faible valeur ajoutée. Notre principal défi est le prix des ingrédients qui ne cesse de grimper. Augmenter nos prix est la dernière chose qu’on veut faire. On négocie très fort pour être capable d’avoir des produits qui sont abordables pour les consommateurs. »