L’absence d’infrastructures minimales est un puissant obstacle pour le développement des Premières Nations. Elle freine leur contribution et leur pleine intégration à l’activité économique du pays, alors qu’elles représentent pourtant 5 % de la population canadienne, mais contribuent à seulement 2,5 % du PIB national. Une situation qui commence à changer, mais encore trop lentement. Il faut accélérer rapidement le rythme.

Une étude des services économiques de la Banque Royale diffusée mercredi nous rappelle que les communautés autochtones canadiennes souffrent toujours d’un déficit d’infrastructures totalement inacceptable par rapport au reste du Canada.

Parce qu’elles vivent dans des régions éloignées, de nombreuses populations autochtones ont un accès limité aux matériaux de construction et, principalement dans le Nord, ont deux fois plus de risques de vivre entassées dans des logements que les autres groupes de Canadiens.

La majorité des autochtones vivant dans des réserves n’ont pas accès à l’internet haute vitesse, ce qui limite leur accès à l’enseignement supérieur et aux occasions économiques, souligne l’étude.

On observe un écart de près de six points de pourcentage entre le taux de participation des autochtones et celui des non-autochtones en âge de travailler, de 25 à 54 ans, alors que plus de 17 % de la population autochtone n’a pas participé à la population active en 2022 contre 11 % chez les non-autochtones.

Pourtant, indiquent les économistes de la Banque Royale, en cette période de pénurie de main-d’œuvre et de vieillissement de la population, les communautés autochtones affichent un net avantage puisque 40 % de leur population est âgée de moins de 24 ans, contre 25 % pour les non-autochtones.

En fait, conclut l’étude de la Royale, si les populations autochtones bénéficiaient d’infrastructures adéquates et qu’elles arrivaient à afficher un taux d’emploi et de participation équivalent à ceux des populations non autochtones, la production autochtone augmenterait de 17 % et ajouterait un demi-point de pourcentage à la production potentielle de l’économie canadienne. Ce qui reste assez significatif.

Pour y arriver toutefois, il faudrait, selon l’Assemblée des Premières Nations, que le Canada investisse quelque 350 millions en travaux d’infrastructures d’ici 2030…

Des projets en marche

L’apport plein et entier des Premières Nations à l’économie canadienne et québécoise est primordial aux efforts de réconciliation qui ont été mis en place au cours des dernières années pour rétablir des siècles d’injustices et de rapports inégaux entre les peuples fondateurs du pays.

Surtout au moment où les acteurs politiques et économiques du Québec sollicitent comme jamais les territoires de nombreuses Premières Nations pour mener à bien leurs projets d’autosuffisance énergétique et de développement de filières minières critiques.

Mercredi, le gouvernement de la Nation crie, de concert avec le Secrétariat aux alliances économiques Nation crie Abitibi-Témiscamingue, a justement terminé deux jours de discussions et de rencontres qui ont mobilisé plus de 300 acteurs économiques – autochtones et allochtones – de l’Abitibi et de la Baie-James.

Le but de cette rencontre était d’établir et de faire partager une grande stratégie de développement économique qui a rallié des communautés de tout le Québec, dont les Innus de Mani utenam, des Attikameks ou des Anichinabés.

Ç’a été un rassemblement incroyable. Il y avait une volonté de participer à toutes sortes de projets qui impliquent toutes les communautés de la région de l’Abitibi et de la Jamésie. C’est comme un dégel après la pandémie.

Chantal Hamelin, directrice générale du Secrétariat aux alliances économiques Nation crie Abitibi-Témiscamingue

Durant la journée de mercredi, plus de 300 rencontres de maillage entre entreprises non autochtones et autochtones se sont déroulées et 11 entreprises non autochtones, dont plusieurs sociétés minières et d’autres comme Desjardins Entreprises, Stantec ou WSP, se sont engagées à faire davantage affaire avec les communautés des Premières Nations.

Le sommet régional a aussi été l’occasion d’annoncer un investissement commun des gouvernements québécois et canadien de 57 millions pour sécuriser la route Billy-Diamond qui relie les villes de Matagami et de Radisson, qui sera bientôt branchée au réseau cellulaire grâce à une entente entre le Réseau de communications Eeyou et Hydro-Québec.

PHOTO FOURNIE PAR LE SECRÉTARIAT AUX ALLIANCES ÉCONOMIQUES NATION CRIE ABITIBI-TÉMISCAMINGUE

Alfred Loon, président de Réseau Eeyou Communication, prend la parole en compagnie de dirigeants d’Hydro-Québec. 

On parle ici d’une infrastructure critique qui était nécessaire et attendue par toutes les familles et tous les travailleurs de la région de la Jamésie qui doivent se déplacer sur la route de 620 kilomètres qui n’avait aucune couverture cellulaire.

Tout comme l’action faite mardi par Hydro-Québec qui a planté un premier poteau électrique dans la communauté de Kitcisakik, tout juste au sud de Val-d’Or, une communauté de 400 habitants qui n’a toujours pas d’électricité ni d’eau courante.

Le raccordement au réseau électrique devrait se faire en 2025.

Comme on le voit, il reste encore beaucoup de chemin à faire pour que les communautés autochtones profitent d’infrastructures convenables qui leur permettent de développer leur plein potentiel.

On pense notamment au projet de la Grande Alliance promu par le gouvernement du Québec et la Société de développement crie qui prévoit la construction d’une voie ferrée reliant Matagami au kilomètre 257, situé plus au nord, pour donner un accès aux nombreuses sociétés minières qui sont implantées dans la région.

C’est en investissant et en établissant des ponts avec elles que les différentes communautés autochtones du Québec vont pouvoir mieux participer au développement économique, mieux en profiter et mieux en faire profiter l’économie dans son ensemble.