Le gouvernement provincial veut reproduire dans l’est de Montréal le succès obtenu avec le parc industriel provincial de Bécancour.

Québec crée la Société de mise en valeur des terrains dans l’est de Montréal pour acquérir, décontaminer et revendre les terrains industriels contaminés.

La ministre responsable de l’Habitation, France-Élaine Duranceau, et le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, en ont fait l’annonce lundi matin en marge du Sommet de l’Est.

Québec, par l’intermédiaire d’Investissement Québec, met un capital de 100 millions dans la nouvelle créature, tandis que la gestion de la société est confiée à Fondaction.

« La Ville de Montréal a bénéficié d’une enveloppe de 100 millions pour décontaminer et réhabiliter les terrains dans le secteur est de la ville, a souligné le ministre Fitzgibbon, en conférence de presse. Peu de propriétaires à ce jour ont pu se prévaloir du programme. Il faut donc y mettre les bouchées doubles. On avait aussi promis un deuxième 100 millions, le voici. Et si on doit ajouter d’autre capital dans la société, on sera au rendez-vous », dit-il en invitant le gouvernement fédéral à se joindre au mouvement.

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Le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon

Le gouvernement canadien n’a pas tardé à répliquer. « J’aimerais rappeler que le gouvernement du Canada a déjà donné l’argent à Québec. Ça fait partie de l’entente Canada-Québec de 7,5 milliards sur les infrastructures, dévoilée en 2018. De ce montant, 200 millions étaient réservés à la décontamination », a souligné Soraya Martinez Ferrada, députée d’Hochelaga, ministre du Tourisme et ministre responsable de DEC.

La prise de bec entre ordres de gouvernement mise à part, le but de la Société est de livrer aux industriels des terrains clés en main. « L’expérience de Bécancour en est une preuve, a insisté le ministre. On va prévoir les infrastructures nécessaires pour recevoir des projets économiques d’envergure. »

Les premiers efforts seront concentrés sur l’immense terrain d’au moins 650 000 mètres carrés, propriété de la pétrolière Esso, situé à Montréal-Est. De par sa taille et sa localisation entre Sherbrooke et Notre-Dame, sa revitalisation est essentielle au réaménagement de l’est du territoire.

« C’est une annonce qui a le potentiel de changer le visage de l’est de Montréal et de redonner à ce secteur les moyens nécessaires pour qu’il sorte de son passé lourdement industriel et qu’il se développe à son plein potentiel », a dit pour sa part la ministre France-Élaine Duranceau, à la même occasion.

Réactions

Les milieux socioéconomiques ont applaudi l’annonce. La Ville de Montréal également. De son côté, l’opposition y voit un désaveu de l’administration Plante.

« C’est une excellente nouvelle, s’est réjoui Christian Yaccarini, président et chef de la direction de la Société de développement Angus, qui réclame depuis longtemps que les terrains d’Esso deviennent de propriété publique. Pour moi, c’est la grande nouvelle du Sommet. Il fallait absolument sortir ces terrains du marché. Ça fait 40 ans qu’ils sont barricadés et contaminés. On les sort du marché et on va se donner le temps et les moyens de faire un développement qui tienne la route. »

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Le président et chef de la direction de la Société de développement Angus, Christian Yaccarini

« C’est majeur, a dit de son côté Jean-Denis Charest, PDG de la Chambre de commerce de l’est de Montréal. Les 100 premiers millions, c’est un investissement initial. On a maintenant une structure qui va être capable d’accueillir d’autres investisseurs. » Il espère voir les premières retombées concrètes de la Société d’ici cinq ans. Il évalue à 750 millions les investissements annoncés dans le cadre du Sommet.

« Ce sont de nouveaux fonds et d’avoir une structure qui va strictement travailler à trouver d’autres modèles de financement et à débloquer les embûches qu’on a eues [avec la première enveloppe de 100 millions], c’est une excellente nouvelle, a commenté Caroline Bourgeois, vice-présidente au comité exécutif. Les 100 premiers millions, ça n’a pas été facile. Les propriétaires ne voulaient pas nécessairement décontaminer sans les infrastructures en place. »

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La vice-présidente du comité exécutif de la Ville de Montréal, Caroline Bourgeois

Selon la Ville, 56 des 100 premiers millions sont aujourd’hui engagés. Des sommes sont notamment prévues pour décontaminer des terrains municipaux dans le secteur du boulevard Saint-Jean-Baptiste et de l’autoroute 40.

L’opposition a une tout autre lecture. Pour elle, la création de la nouvelle société est une reprise en main par Québec de la décontamination des terrains de l’Est. « Quand on regarde les résultats obtenus par la Ville, c’est catastrophique, seulement 400 000 $ ont été déboursés en quatre ans sur la première enveloppe de 100 millions », soutient Julien Hénault-Ratelle, porte-parole de l’opposition officielle en matière de développement économique.