Fini la mode des grands bureaux avec table de baby-foot. Avec la pénurie de main-d’œuvre qui s’étire, les entreprises qui tirent leur épingle du jeu misent sur des espaces collaboratifs, prônent la flexibilité et la conciliation travail-famille sans négliger la santé mentale de leurs employés. Tour d’horizon des meilleures pratiques.

Le manque de talents amène les entreprises à faire des pieds et des mains pour se démarquer. « La question de la rémunération a pris de l’ampleur, et l’inflation crée une pression supplémentaire », constate la présidente de l’Ordre des conseillers en ressources humaines agréés du Québec, Manon Poirier. « Les organisations sont très proactives à ce sujet. »

Selon Manon Poirier, on assiste à un réaménagement des bureaux pour créer des espaces plus conviviaux qui favorisent la collaboration. De plus en plus d’employeurs offrent en outre des horaires réduits, comme la semaine de quatre jours.

« Avant de changer d’emploi, les individus ont davantage le réflexe de s’informer de la culture et des pratiques de gestion de l’organisation. Ils sont très sensibles aux employeurs qui investissent dans le développement de leurs compétences et la formation », ajoute Manon Poirier, qui souligne que les possibilités de croissance doivent être bien communiquées aux employés.

Qu’en est-il des jeunes ?

Depuis 2021, l’étude Travaillons ensemble, réalisée par Léger pour le Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec (RJCCQ), permet d’avoir un aperçu des tendances dans le milieu des jeunes travailleurs.

Le cinquième coup de sonde, dévoilé en septembre, souligne à grands traits l’importance de la conciliation travail et vie personnelle pour les 16-35 ans. Pierre Graff, président-directeur général du RJCCQ, met d’ailleurs en garde les organisations : au-delà de 2,5 jours au bureau obligatoires par semaine, elles risquent de perdre leurs jeunes employés, attachés à la flexibilité qu’accorde le télétravail.

Une proportion significative dit que tout retour majeur au bureau entraînerait une démission de leur part.

Pierre Graff, président-directeur général du RJCCQ

À l’instar des professionnels plus âgés, le salaire est un élément déterminant. La jeune génération a néanmoins envie de faire une différence. « Trente pour cent des jeunes cherchent dans leur travail l’opportunité d’avoir une influence directe sur les décisions de l’entreprise. Ils veulent avoir un impact. »

La santé mentale préoccupe grandement les 16 à 35 ans. « Non seulement c’est un enjeu, c’est aussi un critère qui jauge l’attractivité d’un employeur. » C’est peut-être pour cela qu’une majorité écrasante recherche des leaders dotés de compétences humaines et relationnelles.

Faire rêver

En ces temps difficiles, Micro Logic sort du lot. Le fournisseur de solutions TI établi à Québec prévoit doubler ses effectifs d’ici cinq ans, pour atteindre la barre des 1000 employés. La clé du succès tient, selon son PDG, en quelques mots : « faire rêver les gens ».

« On mobilise nos employés, on leur donne la chance de s’accomplir, de contribuer à quelque chose de plus grand qu’eux », explique Stéphane Garneau, qui ajoute que près de 80 % des travailleurs de Micro Logic sont là pour la mission entrepreneuriale qu’il met de l’avant.

Il faut dire que la PME à « la croissance impressionnante » ne manque pas de projets ni d’ambition. Son chiffre d’affaires est passé en 12 ans de 5 à 205 millions de dollars. L’entreprise compte désormais devenir le leader de l’infonuagique au Canada, grâce à son nuage souverain, Projet Cirrus.

L’humain d’abord

« On attache une grande importance au volet humain, souligne Stéphane Garneau. Il faut toucher chaque employé et leur donner la chance de s’exprimer. On les écoute avant de prendre des décisions, on va au-devant de leurs besoins. » Afin d’épauler son monde dans les bons et moins bons moments – un deuil, un manque de motivation ou un nouvel enfant, par exemple –, Micro Logic compte un partenaire RH dans chacune de ses divisions. Cette mesure permet aussi de repérer les « étoiles filantes », ces employés qui font des choses exceptionnelles dans un mandat.

Tous les vendredis, employés et patron se rassemblent le temps d’un café.

Je partage ce que j’ai vécu pendant la semaine, je parle de mes inquiétudes, de mes joies. On met de l’avant les accomplissements des employés. Ça amène une grande transparence dans l’organisation et ça nous rapproche.

Stéphane Garneau, président-directeur général de Micro Logic

Le PDG estime que trop d’entreprises sont aujourd’hui trop menées par les chiffres, et pas assez par la compassion. C’est pour cette raison qu’il pratique ce qu’il appelle la « gestion du tempo corporatif ». « Quand je sens que la charge de travail qu’on demande est trop élevée et que la fatigue est au rendez-vous, je ralentis la cadence, quitte à reporter un projet, pour que tout le monde soit heureux. »