Les Sociétés d’aide au développement des collectivités (SADC) et les Centres d’aide aux entreprises (CAE) du Québec ont généré près d’un demi-milliard de dollars en retombées économiques depuis 2019, révèle une nouvelle étude. Mais il y a autant de cœur que de financement dans cette relation, nous raconte un (important !) fabricant de skis de Rimouski.

Malgré la rime, ski et Rimouski ne s’associent pas spontanément dans l’esprit.

En 2003, Jean-François Bouchard a pourtant eu la curieuse idée de fabriquer des planches à neige dans la région.

« J’avais 20 ans, j’avais de l’argent dans mes poches, le besoin de me réaliser, et une dose de naïveté incroyable. Donc j’ai décidé de me lancer en affaires. Je n’avais aucune idée de ce que j’allais devoir faire. Dans ma tête, si je fabriquais de bons produits, ça allait se vendre instantanément. »

C’est dans ces heureuses dispositions qu’il a cogné à la porte de la SADC de la Neigette.

« J’arrive là, pas un poil sur le menton, et je dis : "Bonjour, mon nom, c’est JF. Je veux fabriquer des planches à neige et des skis" », raconte le fondateur (barbu) d’Utopie MFG.

Vingt ans plus tard, Utopie MFG compte 37 employés à temps plein et fabrique 15 000 paires de skis par année. « On est la plus grosse usine de skis alpins en Amérique du Nord », assure l’entrepreneur.

PHOTO FOURNIE PAR UTOPIE MFG

L’équipe d’Utopie MFG entoure le fondateur de l’entreprise, Jean-François Bouchard, lors du 20e anniversaire de l’entreprise, en septembre 2023.

L’entreprise de Saint-Narcisse-de-Rimouski a lancé en 2021 un ambitieux plan de croissance quinquennal doté d’une enveloppe de 7 millions de dollars.

« Quand on a ficelé notre projet de financement avec les partenaires régionaux, on a insisté pour que la SADC reste toujours dans le portrait, juste parce que c’est une histoire de cœur. »

De l’impact

C’est aussi une histoire d’argent, bien sûr. Mandatée par le Réseau des SADC et CAE, la firme Aviseo a calculé que les investissements des SADC et des CAE ont entraîné une augmentation du PIB réel du Québec de 458 millions de dollars depuis 2019.

L’étude, dont les résultats viennent d’être dévoilés, montre que 185 millions résultent des prêts qu’ils ont accordés. L’augmentation du taux de survie des entreprises qu’ils soutiennent a fourni un apport supplémentaire de 273 millions.

De surcroît, ces retombées ont entraîné des revenus supplémentaires de 212 millions pour les gouvernements.

« Ce sont des résultats très, très, très encourageants, qui mettent en valeur l’impact de nos membres sur chacun des territoires couverts par les SADC et les CAE au Québec », se réjouit Pascal Harvey, directeur général du Réseau.

Ce dernier compte 57 SADC et 10 CAE, où travaillent quelque 400 professionnels et plus de 600 bénévoles.

Les 67 membres du Réseau « sont répartis dans les territoires ruraux et semi-urbains, souligne Pascal Harvey. Nos membres n’interviennent pas dans les grands centres urbains comme Montréal, Laval, Québec ou Gatineau. C’est d’autant plus méritoire de voir l’impact que les actions de nos membres ont sur le terrain ».

Mais c’est peut-être le taux de survie des entreprises soutenues par les SADC et les CAE qui satisfait le plus le directeur général du Réseau.

« Statistique Canada a fait ressortir que le taux de survie d’un groupe témoin qui n’est pas aidé par une SADC ou un CAE est deux fois moins important que le même groupe témoin aidé par une SADC ou un CAE », indique-t-il.

« Donc, non seulement nos membres ont de l’impact quand ils financent un projet, mais ils ont également de l’impact quand ils accompagnent un projet. »

C’était la première fois que le Réseau menait une telle étude, qu’il entend répéter.

« Sans se péter les bretelles, je pense qu’on a de la matière pour dire : voici l’importance que les SADC et les CAE ont dans l’économie québécoise et l’économie canadienne. »

Ils ont certainement eu de l’importance dans les économies de Jean-François Bouchard.

Des bas et des hauts

Utopie MFG porte un nom qui n’évoque pas nécessairement le réalisme financier.

En 2003, Jean-François Bouchard fabriquait pour le plaisir des planches à roulettes artisanales (longboards) dans le garage de ses parents. Ses amis l’ont mis au défi de se lancer dans la fabrication de planches à neige, dont il était lui-même un amateur doué.

« Tout ça me paraissait utopique, d’où le nom de l’entreprise », relate-t-il.

Son engagement saisonnier dans la Réserve navale du Canada lui avait permis d’amasser quelques épargnes, et sans autre formation que sa 5secondaire, il s’est lancé dans l’aventure avec autant d’allant qu’un planchiste au sommet d’une pente extrême.

Une rencontre avec les conseillers de la SADC Neigette a figuré parmi ses premières démarches.

« Ils devaient se demander, sans faire de mauvais jeux de mots, où je m’en allais avec mes skis, revit-il. La SADC m’a aidé dans les balbutiements, financièrement et aussi pour structurer l’entreprise. Je n’avais jamais vu d’états financiers ni fait de planification. »

Les débuts sont difficiles. « C’est un trou noir à défaire de l’argent », prononce Jean-François Bouchard, qui a le sens de la formule.

Un partenaire s’est joint à l’aventure en 2006.

« Notre but était de vendre en gros et au détail des produits connexes, de développer notre propre marque et faire sa distribution au Québec, et d’offrir un service de fabrication sur mesure. »

Bref, ils se voyaient un peu à la manière d’une boutique de planches de surf sur mesure aux abords d’une plage californienne.

« Mais à Sainte-Blandine de Rimouski, dans son ancien bureau de poste. »

Ils lancent la marque de planches à neige UTP Snowboard. « Les produits se vendaient, mais on ne se faisait pas payer par les détaillants. »

En 2007, « on a tapé le mur et le partenaire a décidé de se retirer ».

Au bord du précipice, Jean-François Bouchard prend alors un virage serré et engage l’entreprise sur la piste de la fabrication en sous-traitance. « Les choses se sont mises à débouler rapidement. »

Il produit d’abord pour la marque de ski québécoise Raccoon, puis, en 2009, obtient ses premiers contrats avec des entreprises américaines.

Après un déménagement dans un petit complexe industriel à Saint-Narcisse-de-Rimouski, il a l’occasion de racheter en 2011 une partie de l’équipement de production d’un sous-traitant de la marque de planches Burton, à Cowansville.

Cet équipement lui permet de remporter en 2013 des contrats plus importants aux États-Unis. Il acquiert le local qu’il louait jusqu’alors et il double sa superficie pour la porter à 7000 pi⁠2, avec la conviction que jamais il ne réussira à occuper complètement un espace aussi démesuré.

Plan quinquennal

En 2021, Utopie comptait près de 30 employés et fabriquait 12 000 paires de skis par année. L’usine était devenue tellement surchargée que Jean-François ne calculait pas l’espace en pieds carrés, mais en pieds cubes, dit-il à la blague.

Il dresse alors un plan de croissance de cinq ans, soutenu par des investissements de 7 millions de dollars. Le tiers est consacré à l’agrandissement de l’usine, qui atteint 28 000 pi⁠2.

« À terme de notre projet de cinq ans, on estime qu’on va avoir une capacité de production d’environ 25 000 paires de skis par année, pour un bassin de 40 à 45 employés », décrit-il.

La SADC Neigette sait très bien où Jean-François Bouchard s’en va avec ses skis. Plus de 80 % du chiffre d’affaires d’Utopie est réalisé à l’étranger, « donc on ramène vraiment des dollars américains dans la petite municipalité de Saint-Narcisse-de-Rimouski », soutient son fondateur.

« Luc Bérubé est toujours le conseiller qui s’occupe de notre compte, 20 ans plus tard, constate-t-il. Le directeur général de la SADC est toujours Yvan Collin, qu’on connaît très bien aussi.

« Comme Luc le dit : "Tu n’avais pas un poil sur le menton au début, puis je t’ai vu te faire une blonde, t’acheter une maison, te marier, avoir des enfants." Je n’ai pas d’autre partenaire financier dont je peux dire qu’il est dans mon dossier depuis 20 ans. Et c’est de plus en plus rare avec la réalité du marché de l’emploi aujourd’hui. »

PHOTO ANNIE-CLAUDE BÉDARD, FOURNIE PAR TOITURES HOGUE

La réfection du toit du Pensionnat du Saint-Nom-de-Marie d’Outremont, vieux de 120 ans, a été achevée durant les Fêtes par Toitures Hogue.

Travaux de 15 millions sur deux anciennes toitures

Ce n’est peut-être pas le chantier de Notre-Dame de Paris, mais la réfection du toit du Pensionnat du Saint-Nom-de-Marie d’Outremont, vieux de 120 ans, représentait tout de même un défi d’envergure. Toitures Hogue vient de clore ce chantier réalisé dans les règles de l’art – un art ancien, comme en témoignent les éléments architecturaux pris en compte : dôme, toiture à baguette, balustrades, arêtiers, colonnettes, lucarnes, cheminées et oculus, notamment. « Il a fallu pratiquer des interventions quasiment chirurgicales et effectuer un véritable travail d’artiste pour effectuer ce mandat à la hauteur des attentes de tout un chacun », a commenté par communiqué le président de l’entreprise, Jocelyn Hogue. Toitures Hogue vient également de terminer le chantier des anciens ateliers du CN à Pointe-Saint-Charles, dont les toits, plus anciens encore, s’étendaient sur 300 000 pi⁠2. La construction de ce qui était alors les ateliers du Grand Tronc avait été entreprise en 1854. Le chantier, lancé en 2021, s’est clos en janvier avec la conclusion de la réfection des 94 000 derniers pieds carrés. Les deux contrats totalisaient près de 15 millions de dollars. L’entreprise de Blainville, qui compte 250 employés, a réalisé un chiffre d’affaires de 65 millions de dollars en 2023.

L’Agence de spectacles ComediHa ! devient l’Agence AMUZ

Amuser plutôt que faire rire ? Détendre plutôt que cramper ? L’Agence de spectacles ComediHa !, filiale du groupe ComediHa !, se débaptise pour devenir l’Agence AMUZ. Ce raccourcissement nominal signale un élargissement de la mission de l’agence située à Québec. L’Agence AMUZ entend proposer une plus grande diversité de produits et de services, qui s’étendront au-delà de la sphère traditionnelle de l’humour. Sous sa nouvelle identité, l’agence veut réunir des artistes et des spectacles divertissants et inspirants qui contribuent « au bien-être, peu importe le type d’évènement ». Son catalogue réunit, par exemple, l’acteur, dramaturge et metteur en scène Michel Charette, l’auteure-humoriste-comédienne Cathleen Rouleau, et les spectacles Symphorien et Moi et l’autre, en collaboration avec Productions Martin Leclerc. « Ce changement nous permet de travailler avec des artistes et spectacles en tous genres. L’humour fera toujours partie de notre ADN. Cependant, notre nouveau positionnement ouvre la porte à une nouvelle clientèle », a expliqué par voie de communiqué Marie-Pierre Gravel, directrice de l’Agence AMUZ. À ne pas confondre avec Amuz, une entreprise de Vaudreuil spécialisée dans la location de jeux de société et de jeux gonflables, qui ne sera peut-être pas amusée par l’homonymie.

PHOTO ÉTIENNE VIGNEAULT, FOURNIE PAR MILMONDE

Jean-Michel Talbot, président de Milmonde, devant sa nouvelle ligne de finition automatisée

Investir 1,2 million dans la cuisine

Du tout cuit. Le fabricant d’armoires de cuisine sur mesure Milmonde a obtenu une subvention non remboursable de 1,19 million de dollars du ministère des Ressources naturelles et des Forêts du Québec pour soutenir l’installation de sa toute nouvelle chaîne de peinture entièrement automatisée, qu’il qualifie de « plus innovante de l’industrie ». La chaîne automatisée incorpore l’étape du ponçage, intègre un contrôle de qualité soutenu par l’intelligence artificielle, et se clôt avec l’application d’une peinture à base d’eau et cuite aux ultraviolets. Cette installation constitue une étape décisive vers son objectif d’éliminer prochainement tous les composés organiques volatils de sa production. Avec ceux réalisés en 2023, l’investissement permet à l’entreprise de Notre-Dame-des-Pins, en Beauce, de doubler sa capacité de production sans accroître la superficie de son usine ni son nombre d’employés. Milmonde a été fondée en 1978 à Saint-Victor. L’ingénieur et gestionnaire Jean-Michel Talbot a acquis l’entreprise en 2021. L’arrivée en 2023 d’une seconde actionnaire, Annie Lessard, a coïncidé avec une refonte de l’image de marque de l’entreprise et l’accélération de son automatisation. L’entreprise compte une cinquantaine d’employés en période de pointe.