Les pharmacies de faible superficie ont rarement l’espace ou les moyens pour accueillir un robot standard de remplissage de piluliers, ces petits casiers personnels à comprimés. Chronomed apporte un remède au problème et voit grand en faisant petit : un robot comprimé.

L’innovation

Les pharmacies de bonne taille confient souvent à un appareil automatisé l’astreignante tâche de remplir les petits boîtiers où sont classés les différents comprimés que le patient devra avaler durant la semaine. Les petits pharmaciens propriétaires ont rarement l’espace, tant dans leur local que dans leur budget, pour ces imposants appareils, au demeurant fort utiles. Pour répondre à ce besoin, Chronomed a conçu le Chronopac, une armoire automatisée compacte dans laquelle un robot remplit minutieusement et rapidement deux piluliers à la fois.

Qui ?

C’est précisément pour trouver une solution à ce problème que la société Chronomed a été fondée à Sherbrooke en mars 2020 par Maude Laforest et Frédéric Droulers, tous deux titulaires d’un baccalauréat en génie mécanique de l’Université de Sherbrooke. Le besoin avait été exprimé par une amie pharmacienne de Maude Laforest, lors d’un repas au restaurant.

La citation

On était en train de manger une pizza, et mon amie m’a raconté qu’elle cherchait un robot pour faire la distribution de médicaments en piluliers. Ce qu’il y avait sur le marché était vraiment dispendieux, mais aussi très gros. Dans certains cas, il faut défoncer les murs pour faire passer les robots. Initialement, il s’agissait seulement d’aider mon amie. Et finalement, on a lancé une entreprise.

Maude Laforest, cofondatrice de Chronomed

180 médicaments

Conçu pour les petits et moyens débits, le Chronopac s’adresse aux pharmacies qui préparent entre 100 et 400 piluliers par semaine. Déposé sur une table ou un comptoir, l’appareil mesure 1 m de largeur sur 1,6 m de hauteur et 60 cm de profondeur.

Il est commandé à distance sur un ordinateur ou un appareil mobile à l’aide d’une application infonuagique.

Le robot Chronopac peut contenir quelque 180 médicaments, répartis dans autant de cassettes amovibles qui ont été remplies par des techniciens de laboratoire.

Lorsque des médicaments plus rares sont prescrits, ils sont déposés à la main dans les piluliers au préalable.

Un classeur à piluliers

Les piluliers hebdomadaires affectent habituellement la forme d’une mince feuille de plastique creusée de 28 alvéoles – soit 4 prises de médicaments par jour pendant une semaine.

Ils sont déposés deux par deux sur des plateaux mobiles, identifiés par des étiquettes intelligentes.

IMAGE TIRÉE DU SITE WEB DE CHRONOMED

Une pince robotisée s’élève dans l’appareil pour saisir une des cassettes de médicaments de la prescription, puis redescend pour distribuer son contenu dans les cases des piluliers.

Les plateaux en attente de remplissage sont placés dans une petite étagère tout aussi intelligente, qui les gère en fonction de leur ordre d’arrivée. Un témoin lumineux indique le plateau à charger dans le Chronopac.

« Ça sert à améliorer la séquence d’opération et éviter les erreurs », explique Maude Laforest.

Son tour venu, le plateau est déposé par le technicien dans un tiroir qui s’ouvre au bas du Chronopac, où il est automatiquement identifié.

Une pince robotisée s’élève alors dans l’appareil pour saisir une des cassettes de médicaments de l’ordonnance, puis redescend pour distribuer son contenu dans les cases des piluliers.

On a développé nos propres algorithmes de détection pour éviter les erreurs.

Maude Laforest, cofondatrice de Chronomed

Le plateau portant les deux piluliers est ensuite retiré pour l’étape de vérification, « une responsabilité du pharmacien », dit-elle.

Le robot Chronopac a une capacité de traitement de 25 piluliers à l’heure.

L’appareil travaille trois fois plus vite qu’un technicien de laboratoire, mais en tenant compte des tâches périphériques, le temps de préparation des piluliers se trouve réduit de 50 % par rapport à une manipulation strictement manuelle.

Comprimés et cachet

L’appareil a été conçu par Frédéric Droulers.

« C’est mon cerveau, c’est le gars technique », souligne sa collègue.

PHOTO FOURNIE PAR CHRONOMED

Frédéric Droulers à côté de l’appareil qu’il a conçu. Chronomed a été a été fondée en mars 2020 par Maude Laforest et Frédéric Droulers, précisément pour résoudre le problème des grands robots à piluliers.

Le robot à piluliers a du cachet : son boîtier a été mis au point en collaboration avec Innovation M2, une firme de développement de produits et de design industriel qui se spécialise notamment dans les technologies de soins de santé. L’assemblage est effectué chez Chronomed, qui compte maintenant six employés et autant de stagiaires.

Un premier robot Chronopac a été vendu à un pharmacien de Windsor. Trois autres contrats ont été signés, en attente de livraison.

Car l’entreprise avance prudemment. Pas question de dorer la pilule.

« On est en précommande, pourrait-on dire, indique Maude Laforest. On est un peu comme Tesla parce qu’on veut bien contrôler notre mise en marché et on veut s’assurer d’un bon service à nos clients. »

L’avenir

Jusqu’à présent discrète sur son nouveau produit, Chronomed en fera la première présentation publique au congrès de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires, qui sera tenu les 16 et 17 novembre.

« À partir de l’année prochaine, on aimerait bien commencer à livrer une machine par mois, puis doubler, et ensuite passer à trois machines par mois », prononce Maude Laforest.

Chronomed veut d’abord s’attaquer au marché québécois avant de se tourner vers le marché canadien, puis américain.

L’offensive hors Québec est cependant tributaire de l’adoption des piluliers, qui ne sont pas encore très répandus ailleurs au Canada, et encore moins aux États-Unis.

« Mais nos contacts chez les fabricants nous disent qu’ils travaillent fort pour y amener les piluliers », nuance la directrice générale de Chronomed. « Surtout que les piluliers aident à la prise de médicaments, ce qui est vraiment un point important pour les assureurs. »