La difficulté à recruter des employés a un effet dévastateur sur les PME du Québec, qui ont perdu près de 10,7 milliards en un an, selon une étude réalisée par la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI).

L’annulation de certains contrats ou le report de projets en raison du manque de personnel sont en grande partie responsables de ces pertes d’argent, indique-t-on dans le rapport intitulé Impact financier des pénuries de main-d’œuvre au Québec, rendu public lundi. « Ce chiffre, je tiens à dire que c’est une évaluation extrêmement conservatrice », a soutenu François Vincent, vice-président pour le Québec de la FCEI, au cours d’un entretien téléphonique avec La Presse. « C’est sûr que c’est plus que ça. En réalité, ce sont probablement des pertes plus importantes. On a utilisé les données qui étaient à notre disposition, celles publiées par Statistique Canada en 2020, a-t-il expliqué. On parle d’entreprises qui ont des revenus situés entre 30 000 $ et 5 millions. Il y a beaucoup d’entreprises qui ont des revenus supérieurs. »

Les PME du domaine de la construction figurent en tête des entreprises ayant essuyé le plus de pertes (2219,7 millions), suivies par celles du secteur des services professionnels et administratifs (2078 millions). Les domaines de l’hébergement et de la restauration arrivent au quatrième rang (1024,4 millions).

Bien que les pertes de ventes et de contrats soient considérables pour les propriétaires de PME, il est important de noter qu’elles ne correspondent pas nécessairement à des pertes nettes pour l’économie de la province.

Laure-Anna Bomal, analyste de la recherche pour la FCEI et auteure du rapport

« Ces montants non investis ont peut-être été injectés dans des projets différents ou ont constitué d’autres dépenses pour les PME, et les clients perdus ont pu dépenser leur argent d’une autre façon au Québec. Il n’en demeure pas moins que ce manque à gagner arrive à un bien mauvais moment après deux ans de pandémie qui ont affaibli et endetté trop de PME », a indiqué Mme Bomal dans un communiqué, lundi.

Plus d’heures de travail

Par ailleurs, les horaires anormalement chargés font également partie des effets engendrés par la pénurie de main-d’œuvre, rappelle-t-on dans l’étude. Selon un sondage mené par la FCEI en mars 2022, 63 % des propriétaires affirmaient avoir été contraints de travailler plus d’heures. Dans le cas des employés, ce sont 45 % d’entre eux qui ont vu leur semaine de travail s’alourdir.

« La pénurie de main-d’œuvre est en train de surcharger nos entrepreneurs, ce n’est pas bon à long terme », ajoute François Vincent. Résultat : des entreprises comme les restaurants, par exemple, doivent se résoudre à réduire leurs heures d’ouverture.

« Ces entreprises-là vivent l’augmentation des coûts de façon assez importante, dit-il. Elles doivent y faire face en étant ouvertes moins de journées. Donc, ça leur complexifie encore plus la vie. »

Alors que la campagne électorale s’amorcera bientôt au Québec, la FCEI souhaite que la pénurie de main-d’œuvre, « un enjeu de société », soit au cœur des discussions.