L’innovation

Des vinaigrettes qui ne respectent pas à la lettre la recette originale, des macaronis un peu trop tordus, des surplus de café invendus ou encore des retailles de barres tendres : voilà des aliments qui prennent souvent le chemin de la poubelle parce qu’ils ne respectent pas les standards de l’industrie. Marché SecondLife, une entreprise québécoise, a décidé de faire la guerre au gaspillage alimentaire et de « sauver » ces produits imparfaits en les vendant en ligne sous sa propre marque, à moindre coût. Ces articles sont offerts sur le site second-life.ca depuis la fin de septembre, sous l’étiquette Fièrement Différent.

Qui

Si le nom de SecondLife ne vous est pas inconnu, c’est que, depuis quelques années, l’entreprise, fondée par Thibaut Martelain, a fait sa marque en vendant, en ligne, des fruits et des légumes moches, difformes ou en surplus. « Nos clients nous demandaient très régulièrement de pouvoir faire leur épicerie chez nous, [de pouvoir acheter] autant des produits secs que frais », raconte M. Martelain au bout du fil.

En discutant avec les gens de l’industrie, on s’est rendu compte qu’il y avait une importante partie de la production des transformateurs alimentaires qui était mise de côté parce qu’elle ne répondait pas aux critères des clients.

Thibaut Martelain, fondateur de Marché SecondLife

C’est ce constat qui a incité Marché SecondLife, entreprise fondée en 2015 qui compte une trentaine d’employés, à conclure des ententes avec des producteurs pour reprendre des aliments que ces derniers ne pouvaient pas eux-mêmes commercialiser.

« Le producteur veut que sa vinaigrette soit identique dans tous ses points de vente. Si, un jour, il la rate parce qu’il a mis un peu trop d’oignons ou d’épices, il ne va pas pouvoir la vendre. Donc, nous, on la récupère, donne en exemple Thibaut Martelain. Tous les produits sont aussi bons que les autres. C’est la même valeur nutritionnelle », tient-il à rappeler.

Les produits déjà emballés arrivent directement à l’entrepôt de Marché SecondLife. On leur appose ensuite l’étiquette Fièrement Différent et on indique également au consommateur quel est le défaut du produit. « Ça éduque le client sur tous les critères esthétiques que les grandes marques, les grands noms donnent à leurs fournisseurs. »

PHOTO KARENE-ISABELLE JEAN-BAPTISTE, COLLABORATION SPÉCIALE

« Notre but, c’est d’être l’épicier le plus responsable possible », affirme Thibaut Martelain, fondateur de Marché SecondLife.

Les articles imparfaits sur le site sont vendus de 15 % à 25 % moins cher que les produits parfaits que l’on retrouve en supermarché, estime Thibaut Martelain. Les commandes en ligne sont préparées à l’entrepôt de Saint-Léonard et ensuite livrées à la porte des clients qui habitent la grande région de Montréal. Un réseau de points de chute permet également aux consommateurs de Montréal et de Québec d’aller chercher leurs produits.

Pourquoi ne pas vendre directement en magasin ? « C’est une organisation qui est très différente d’une industrie classique, soutient Thibaut Martelain. On gère beaucoup de ruptures de stock. Par exemple, on a une tonne de pâtes à l’entrepôt. Si on vend tout en trois mois, au mois de janvier, on n’aura plus de pâtes. [Notre fournisseur], son métier, c’est de faire des pâtes parfaites. On ne va pas lui demander de faire des pâtes moches. Donc, il faut qu’on ait cette flexibilité qui est à l’opposé du modèle d’une épicerie qui, elle, a besoin de planifier ses stocks, qui fait des contrats de ventes garanties. »

L’avenir

Pour compléter son offre, Marché SecondLife vend sur son site des articles réguliers, comme ceux que les consommateurs peuvent retrouver en épicerie : sauce pour pâtes, farine, granola. On élargira également la gamme de produits frais. L’entreprise voudrait aussi devenir l’unique destination de ses clients, qui pourront y faire toutes leurs emplettes. « Notre but, c’est d’être l’épicier le plus responsable possible. » M. Martelain et son équipe ont également le projet de fabriquer des produits à base d’aliments mis de côté.

Marché SecondLife, qui n’a pas voulu révéler de chiffres, dit compter « plusieurs milliers » d’adhérents. « Notre objectif, c’est [d’augmenter] notre nombre de clients. C’est ça qui va nous permettre de sauver encore plus de produits », dit M. Martelain.