Vous pensez à exporter vos produits sur un marché extérieur? Sachez que cela ne se fait pas en criant lapin! Voici quelques étapes par lesquelles une entreprise doit habituellement passer avant de conquérir des marchés étrangers.

1- Êtes-vous sûr de votre affaire?

Partir à la conquête de nouveaux marchés est un beau défi, mais cela représente aussi des investissements en temps et en argent.

«Aller dans un nouveau marché, c'est un peu comme redémarrer une entreprise. Ça représente beaucoup de travail», affirme Carl Gravel, directeur national, compétitivité mondiale, Banque de développement du Canada (BDC).

Il remarque que bien souvent, les PME voient des occasions d'exporter grâce à leur réseau. «Ça peut être une bonne idée, mais il faut y penser comme il faut, prendre le temps de déterminer ses objectifs.»

Et quels sont les signes qu'une entreprise est prête à exporter?

«Souvent, c'est lorsqu'elle pense avoir fait le tour du marché québécois et canadien. Il y a aussi des entreprises qui viennent pratiquement au monde avec une perspective mondiale. Je pense aux entreprises de technologie à haute valeur ajoutée, qui évoluent très rapidement», explique M. Gravel.

2- Faites un diagnostic

Avez-vous les ressources nécessaires dans votre entreprise pour vous permettre d'aller conquérir des marchés extérieurs?

«Il faut penser aux ressources humaines, à la stratégie de communication, au matériel promotionnel, à la capacité de production et à la capacité financière», indique Isabelle Phaneuf, coordonnatrice à la direction Amérique du Nord au ministère du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation (MDEIE).

Elle précise que pour y arriver, les entrepreneurs peuvent utiliser l'outil disponible sur le site internet du MDEIE, ou encore demander l'aide de leur conseiller régional, qui peut d'ailleurs leur donner une bonne base d'information et de conseils relatifs à l'exportation.

3- Faites votre plan d'affaires international

C'est le temps de regarder ce qu'on a à offrir et ce qu'on retrouve sur le marché visé. «Il faut faire une étude de marché. On peut trouver de l'information sur le web et nous avons un modèle sur notre site. On peut aussi demander l'aide de son conseiller régional ou d'un consultant», affirme Isabelle Phaneuf.

«Souvent, les entreprises québécoises vont commencer par aller vers un marché traditionnel, comme les États-Unis et ensuite elles regarderont vers d'autres marchés où la croissance est grande. Il faut toujours regarder où on aura le meilleur rendement sur l'investissement et où il sera le plus rapide», explique Carl Gravel.

Il faut aussi penser à sa stratégie de pénétration du marché. On peut ouvrir une filiale, se trouver des partenaires pour vendre ses produits, ou encore, se trouver un agent.

«Si on veut exporter aux États-Unis, on peut probablement y arriver directement, mais si on veut aller au Brésil par exemple, il y a de bonnes chances qu'on ait besoin d'une stratégie différente», indique Mme Phaneuf.

Carl Gravel remarque aussi que de plus en plus de PME québécoises se lancent dans des marchés étrangers parce qu'elles se font inviter par un client qui y est présent. «C'est un premier client assuré dans un nouveau marché, mais il faut tout de même évaluer le potentiel futur et les coûts associés au projet.»

Le MDEIE peut aider les entrepreneurs à établir des contacts à l'étranger, mais Affaires étrangères et Commerce international Canada offre aussi les services de ses délégués commerciaux qui sont à l'oeuvre dans 150 villes dans le monde.

4- Sécurisez vos transactions

Avant de passer à l'action, assurez-vous de sécuriser vos transactions.

«Le compte ouvert, ce qui signifie qu'on envoie la marchandise et un compte à payer, peut être correct pour une transaction intérieure, mais ce n'est peut-être pas conseillé pour l'Afrique, par exemple, si on ne connaît pas l'acheteur et sa solvabilité», explique Daniel Côté, directeur, financement structuré international, Banque Nationale Groupe financier.

L'institution financière offre donc aux entreprises un service d'accompagnement pour les questions relatives aux transactions à l'extérieur du Canada.

«Il existe différents mécanismes de paiement, comme les comptes ouverts assurés qui permettent à l'entrepreneur d'obtenir un dédommagement si son client fait faillite pendant la transaction, par exemple. Il y a aussi les lettres de crédit qui sont très sécuritaires parce qu'elles passent par les institutions financières et plusieurs conditions doivent être respectées avant que le paiement puisse être encaissé», explique M. Côté.

Il faut aussi penser au taux de change.

«Si on regarde le taux du jour et qu'on fixe le prix en conséquence à son client, on peut voir sa marge de profit grandement affectée si au moment du paiement, le taux de change a baissé. Pour s'assurer qu'on n'aura pas de mauvaises surprises, on peut avoir une couverture sur la devise. Cela signifie que l'entrepreneur et l'institution financière s'engagent à échanger un certain montant à un taux déterminé», explique Daniel Côté.

Enfin, le côté logistique. «Il faut penser à expédier ses produits de la bonne façon et en connaissant bien les réglementations. Pour s'occuper de cette logistique, on doit faire affaire avec des firmes spécialisées dans le domaine ou avec des courtiers en douane», indique Carl Gravel.

5- Faites le suivi et soyez patients

Après avoir investi autant de temps et d'argent à l'étranger, il ne faut surtout pas oublier de faire un suivi adéquat et de demeurer présent.

«Il faut s'assurer que nous répondons aux besoins de nos clients. Il ne faut pas hésiter non plus à s'impliquer dans des associations sectorielles dans le nouveau marché pour briser l'idée que les gens peuvent avoir qu'on est loin. Il faut être présent», affirme Mme Phaneuf.

Enfin, il ne faut pas croire que faire fortune à l'étranger se fait nécessairement du jour au lendemain. «Il faut être persévérant, affirme M. Gravel. Il faut s'attendre à ce que ça prenne un peu de temps avant de démarrer à l'étranger, un an ou deux par exemple, c'est fréquent.»

PARTIR EN MISSION

Avez-vous pensé aux formations et aux missions commerciales?

Vous en trouverez plusieurs entre autres au World Trade Centre Montréal de la chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM).

«Les formations portent sur des aspects très concrets de l'exportation comme le plan, la logistique, les assurances, le financement, la réglementation et la lettre de crédit», indique Michel Leblanc, président et chef de la direction de la CCMM.

Certaines formations portent sur des marchés spécifiques et sont par la suite arrimées à des missions commerciales.

«L'an dernier, nous en avons fait une en Chine et cette année, nous irons en Inde. Il y en a aussi toujours sur le marché américain qui est une cible naturelle pour les PME québécoises», précise M. Leblanc.

À quoi peut-on s'attendre de ces missions commerciales?

«On permet aux entrepreneurs de rencontrer un représentant d'un grand cabinet-conseil pour parler de la dynamique locale et des différentes stratégies pour pénétrer le marché. Il y a aussi des gens qui viennent parler de leur expérience dans le pays. On organise également des rencontres particulières pour chaque entreprise en fonction de ses objectifs précis. C'est un voyage de premiers contacts, et on veut qu'à son retour, l'entrepreneur ait une idée très claire de la faisabilité de son projet», explique M. Leblanc.

La CCMM essaye aussi de compter sur un politicien qui accompagne la mission. «Dans certains endroits, comme la Chine, ça peut ouvrir plusieurs portes», précise-t-il.

Combien faut-il s'attendre à débourser?

«Ça dépend toujours de l'endroit où on va, mais généralement, pour New York, on parle d'environ 1000$ pour deux jours. En Asie, on parle d'environ 1000$ par jour. Cela inclut toujours l'hôtel, les déplacements, les repas et, au besoin, les services de traduction, mais jamais l'avion, pour laisser une plus grande flexibilité», affirme Michel Leblanc.

La CCMM organise aussi à l'occasion des missions renversées. «Si nous trouvons un acheteur étranger qui a de la difficulté à s'approvisionner, on l'invite, et les PME peuvent venir le rencontrer», ajoute M. Leblanc.

Le MDEIE organise aussi des formations dans différentes régions et des missions commerciales pour les entrepreneurs qui souhaitent exporter.

Faut-il apprendre l'hindi pour aller en Inde?

«Je pense que qui dit international dit anglais. On ne s'en sort pas. Il y a des endroits où c'est plus difficile que d'autres, mais généralement, on arrive à s'en sortir avec l'anglais», affirme Carl Gravel, directeur national, compétitivité mondiale, Banque de développement du Canada (BDC).

Le spécialiste croit toutefois que les entrepreneurs doivent faire un effort en ce qui a trait à leur site web. «Si on veut aller faire des affaires dans un pays comme le Mexique, il est important de montrer un certain degré de respect pour le marché visé, par exemple, en faisant une version de son site en espagnol.»

L'entrepreneur ne doit pas négliger non plus l'aspect culturel. «Aux États-Unis, les différences ne sont pas très grandes, mais dans des marchés émergents, il faut se familiariser avec la culture avant de s'y rendre. Sinon, cela peut venir jouer rapidement dans le scénario qu'on s'était mis en place» ajoute M. Gravel.

Êtes-vous assez solide financièrement?

«Une entreprise ne se rend pas service d'aller vers l'exportation si elle n'en a pas les moyens», indique d'emblée Isabelle Phaneuf, coordonnatrice à la direction Amérique du Nord au MDEIE. Une entreprise ne doit pas seulement se fier à du financement pour réaliser son projet. «D'ailleurs, nous ne finançons pas des projets complets. L'entreprise doit aussi être capable de poursuivre ses activités à long terme, même si ça prend du temps avant que le projet d'exportation soit rentable», ajoute-t-elle.

Chez BDC, Carl Gravel est du même avis. «L'entrepreneur doit faire son bout de chemin pour supporter l'investissement et ensuite, aller se chercher des partenaires.» BDC a d'ailleurs un programme pour les entrepreneurs qui souhaitent commencer à exporter. Avec ces fonds, la compagnie peut financer, par exemple, sa participation à des foires, l'embauche d'un représentant à l'étranger et la réalisation d'un plan d'affaires international.