Une grand-mère moderne veut aider financièrement ses petits-enfants sans compromettre sa retraite.

La situation

Monique*, 71 ans, est une grand-mère bien de son époque. Elle a rénové la maison de sa blonde, avec qui elle habite depuis plusieurs années, et fait la tournée des friperies avec les ados de ses enfants.

Inspirée par cette nouvelle façon de concevoir le transfert de patrimoine familial, Monique ne veut pas attendre de s’éteindre pour léguer de l’argent à ses petits-enfants. Elle veut voir de ses yeux de grand-mère vivante et en santé l’impact de son apport financier dans leur vie.

« Je ne veux surtout pas m’immiscer dans les décisions parentales de mes deux enfants et de leurs conjoints, raconte-t-elle au téléphone. Mais j’ai vraiment envie d’aider mes petits-enfants. »

Ses cinq descendants ont 8, 12, 14, 14 et 15 ans. L’idée est de contribuer à des frais occasionnés pour leur bien-être et leur évolution, explique-t-elle. Est-ce que ce sera un cours en mode ? Des études en musique ? L’aménagement d’un appartement ? Un voyage inspirant qui trace la voie pour l’avenir ? énumère-t-elle.

Monique se souvient du pacte qu’elle avait conclu avec son fils lorsqu’il avait 18 ans et ne savait pas quoi faire de sa vie. S’il terminait son cégep, elle avait promis de l’aider à payer un voyage en Europe. « C’est lors de ce périple qu’il a trouvé dans quel domaine il allait étudier à l’université », relate-t-elle avec enthousiasme.

Monique rêve d’avoir à nouveau un impact significatif dans la vie de l’autre génération. « Je veux en profiter pendant que je suis vivante. Ça nourrit mon âme et mon esprit. »

« C’est évident que je n’achèterai pas un véhicule à chacun de mes petits-enfants », précise-t-elle.

La grand-mère offre déjà 500 $ à chacun en cadeaux de Noël et d’anniversaire en plus de louer un chalet à 3000 $ pour toute la famille. Elle fait aussi une sortie culturelle avec les cinq petits-enfants d’une valeur de 400 $. Son budget annuel pour les petits-enfants s’élève actuellement à 6000 $.

« Ma conjointe n’a pas d’enfants. Elle ne comprend pas toujours pourquoi je tiens tant à donner de l’argent à mes petits-enfants pour des projets significatifs. Mais ça ne brime pas nos activités de couple. Nous voyageons à l’étranger deux fois par année pour environ 6000 $ chacune et j’ai un budget restaurant de 1500 $ annuellement. »

Monique veut savoir jusqu’où elle peut aller pour aider ses petits-enfants tout en s’assurant d’avoir une retraite confortable.

Les chiffres

  • RRQ : 5200 $
  • PSV : 8000 $ (maximum)
  • Rente : 23 500 $
  • Revenus de location de condo : 15 000 $
  • Compte de banque : 15 400 $
  • FERR : 25 000 $
  • Placements non enregistrés : 77 000 $
  • CELI : 100 000 $
  • Condo : 400 000 $ (valeur)
  • Hypothèque : 33 000 $
  • Carte de crédit : 5940 $
  • Coût de vie estimé : 25 000 $

L’analyse

Charles Rioux Rousseau, conseiller principal en planification financière chez RGP Gestion de patrimoine, a revu en détail les dépenses de Monique.

« Ce qui me fait douter de son coût de vie qu’elle estime à 25 000 $, c’est son volume de dépenses sur sa carte de crédit qui s’élève à plus de 33 000 $ par année, observe-t-il. Peut-être qu’elle sous-estime son coût de vie ou peut-être qu’elle a eu des dépenses sporadiques au cours de la dernière année. »

Afin que les résultats de l’analyse correspondent à un coût de vie qui se rapproche plus de la réalité de Monique, Charles Rioux Rousseau s’est basé sur 35 000 $ pour effectuer ses calculs.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Charles Rioux Rousseau, conseiller principal en planification financière chez RGP Gestion de patrimoine

Le coût de vie est le point de départ de toute analyse financière. Il doit être bien calculé, rappelle le planificateur financier.

En parcourant les relevés de carte de crédit, Charles Rioux Rousseau a remarqué que Monique avait 1230 $ de récompenses accumulées. « Elle pourrait les utiliser sans tarder pour un voyage, un restaurant ou une activité culturelle », suggère-t-il.

Mais avant tout, il suggère de régler la dette coûteuse de carte de crédit, car Monique a des liquidités pour le faire dans son compte d’épargne.

Monique veut aider ses petits-enfants en collaboration avec les parents dans une formule qui reste à définir, rappelle le planificateur. Or, étant à la retraite, elle veut s’assurer de la somme exacte dont elle dispose.

Est-ce que Monique arrivera au terme de sa vie avec un solde à zéro ? Ou a-t-elle plutôt surfinancé sa retraite avec un surplus à gérer au décès ou en faisant des dons de son vivant ? Ces deux questions reviennent souvent dans les bureaux de RGP Gestion de patrimoine.

Pour y répondre, le planificateur a calculé les avoirs de Monique en prenant en considération un profil d’investisseuse prudente générant des rendements inférieurs à l’inflation actuelle aux fins de la projection. Il a aussi tenu compte de l’hypothèque du condo qui vient à échéance dans cinq ans.

Le montant disponible pour les dons

Combien peut-elle dépenser d’argent année après année ? Quel est le montant indexé jusqu’à 96 ans ?

« J’arrive avec 48 000 $, soutient Charles Rioux Rousseau. Elle peut soutenir un train de vie de 48 000 $ par année. Si on tient compte de son coût de vie actuel de 35 000 $, elle a une flexibilité de 13 000 $ par année. Mais attention, c’est le maximum qu’elle peut aller chercher jusqu’à 96 ans », prévient l’expert.

Est-ce que Monique devrait verser 13 000 $ chaque année à ses petits-enfants ? « Je ne suis pas à l’aise avec ça, affirme le planificateur financier. Je garderais une certaine sécurité, car on ne sait jamais ce qui peut arriver. »

Monique a un fonds commun de placement composé d’actions et d’obligations, dont la valeur a baissé. « On présume qu’elle est à l’aise avec son profil d’investisseuse, qu’elle n’est pas en panique et qu’elle n’a pas décidé de tout balancer dans des placements garantis, explique le planificateur. Cependant, actuellement, ce n’est peut-être pas une bonne idée de faire des retraits. Il serait préférable qu’elle attende la reprise avant de faire des retraits. »

Si ce n’est pas une urgence à court terme de donner de l’argent aux petits-enfants, elle peut prendre le temps de voir ce qui va se passer avec les marchés.

Charles Rioux Rousseau, conseiller principal en planification financière chez RGP Gestion de patrimoine

Monique doit également réfléchir à la façon dont elle va transférer les sommes aux petits-enfants.

Une variété de possibilités

Si elle décide de donner de 5000 $ à 7000 $, par exemple, ce qui s’avère être raisonnable pour entamer sa série de dons annuels, va-t-elle les donner en payant directement des activités ou des cours ? Va-t-elle prévoir des sommes équivalentes chaque année ou bien en fonction de l’âge et des besoins qui grandissent à l’adolescence ?

La grand-mère pourrait choisir de mettre de l’argent dans les REEE de chaque petit-enfant. Elle pourrait aussi leur donner 1000 $ chacun qu’ils investiraient à leur nom dans un CPG à 5 % pour 5 ans. Les certificats de placement garantis sont offerts dans toutes les institutions financières. Ce sont les enfants qui sont imposés sur leurs propres rendements et, à cet âge, la majorité n’a pas de revenus assez élevés pour payer de l’impôt.

« Est-ce qu’on donne l’argent aux parents afin qu’ils le transfèrent dans le REEE ou le CPG ? Est-ce qu’on fait confiance aux parents qu’ils vont bel et bien mettre la somme dans le compte ? Est-ce qu’on demande une preuve aux parents ? Comment les parents vont-ils réagir si on demande une preuve ? », soulève le planificateur.

« Ce sont toutes ces questions qui doivent être posées et bien réfléchies afin que le but initial recherché par la grand-mère soit atteint. »

« J’ai l’intuition que Monique est une femme forte, qui a des valeurs profondes et qu’elle souhaite influencer positivement le futur. Cela doit nécessairement passer par le fait d’inspirer ses petits-enfants en utilisant son patrimoine », conclut Charles Rioux Rousseau.

* Bien que le cas mis en lumière dans cette rubrique soit réel, les prénoms utilisés sont fictifs.

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