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Profiter d’une longue retraite tout en maintenant leur train de vie, c’est l’objectif de Victor et Roberta, un couple de quinquagénaires en amorce de retraite hâtive, avec deux enfants encore à leur charge partielle en tant qu’étudiants en première année de cégep et d’université, respectivement.

Leur patrimoine familial combiné comprend pour 1,3 million en valeur d’actifs financiers en comptes enregistrés (REER, CRI, CELI), environ 80 000 $ en comptes d’épargne non enregistrés, et 430 000 $ en valeur estimée (nette d’hypothèque) d’actifs immobiliers résidentiels.

Victor, 54 ans, amorce cette année sa retraite du travail avec la fin de son revenu d’emploi et son remplacement prévu par des retraits modulés de ses divers comptes d’épargne-retraite (CRI, REER, CELI) et de compte d’épargne non enregistré.

Quant à sa conjointe, Roberta, âgée de 56 ans, elle se prépare à sa retraite du travail dans deux ans. Elle envisage aussi à ce moment le transfert de sa part d’actif dans le régime de retraite de son dernier employeur – estimé à 200 000 $ – vers un nouveau compte de retraite immobilisé (CRI). Ce compte, si pertinent, s’ajouterait à son compte REER évalué à 257 000 $, dans lequel Roberta envisage de puiser l’essentiel de ses revenus de retraite.

Les chiffres

Victor, 54 ans

REER : 433 000 $
CELI : 100 000 $
Compte de retraite immobilisé (CRI) : 184 000 $
Comptes non enregistrés : 35 000 $

Roberta, 56 ans

Revenu d’emploi : 68 000 $ (retraite prévue dans deux ans)
REER : 257 000 $
CELI : 112 000 $
CRI et part d’actif de régime de retraite d’employeur : 210 000 $
Compte non enregistré : 10 000 $
Avoir en copropriété (1/3) de la résidence parentale : environ 130 000 $

Principaux actifs familiaux

Maison : évaluée à 400 000 $ (solde hypothécaire à 100 000 $)
Épargne-études en compte non enregistré : 37 000 $

Les questions

Pour l’essentiel, Victor et Roberta s’interrogent sur l’optimisation de leur situation financière et fiscale en amorce de leur retraite hâtive, qu’ils espèrent en bonne (et longue !) continuité d’un train de vie aux environs de 60 000 $ par an.

Victor et Roberta demandent aussi conseil sur la planification de leurs revenus de retraite et de leurs décaissements d’actifs financiers au fil des 40 prochaines années, jusqu’à leur fin de vie prévisible.

Entre-temps, parmi leurs projets personnels de début de retraite, au-delà du soutien parental aux études supérieures de leurs deux enfants, Victor et Roberta envisagent de se « faire un p’tit cadeau » en dépensant environ 15 000 $ pour l’achat d’une automobile cabriolet d’occasion.

À plus long terme, Victor et Roberta prévoient demeurer dans leur résidence familiale actuelle aussi longtemps qu’ils le souhaiteront et qu’ils le pourront.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE

Christine Robillard, planificatrice financière chez Conseil privé Mansfield

L’analyse-conseil de la situation de Victor et Roberta a été confiée à Christine Robillard, planificatrice financière au cabinet montréalais Conseil privé Mansfield.

Les conseils familiaux

D’emblée, Mme Robillard constate que le patrimoine déjà constitué par Victor et Roberta devrait leur procurer des moyens financiers suffisants pour leur longue retraite, avec un train de vie stabilisé autour de 60 000 $ par an.

« S’ils évitent de grossir leur train de vie au-delà de ce niveau, et à défaut de gros imprévus coûteux dans leur style de vie et leur budget, Victor et Roberta auront de bonnes réserves de fonds et de capital pour répondre à leurs besoins au moins jusqu’à un âge très avancé », indique Mme Robillard.

N’empêche, pour optimiser leur situation fiscale, elle leur suggère quelques mesures de gestion budgétaire et financière durant leur première décennie de retraite hâtive.

C’est-à-dire jusqu’à leur 65anniversaire, alors qu’auront pris fin les dépenses pour les études de leurs enfants et le remboursement d’hypothèque, et que débuteront leurs prestations de régimes de retraite publics (RRQ au Québec et PSV au fédéral).

Dans un premier temps, souligne Mme Robillard, Victor et Roberta devaient prévoir dans leur budget des prochaines années des coûts additionnels pour les études universitaires de leurs enfants.

« À raison de 10 000 $ par an et par étudiant, et sans compter les coûts d’une possible résidence de fin d’études hors de la maison familiale, l’épargne-études de 37 000 $ en compte non enregistré pourrait vite s’avérer insuffisante », avertit Mme Robillard.

Dans un second temps, elle recommande à Victor et Roberta de prévoir le remplacement de leur prêt hypothécaire par une marge de crédit hypothécaire au moment de son échéance de renouvellement dans cinq ans, avec un solde réduit aux environs de 50 000 $.

« En procédant ainsi, Victor et Roberta pourront utiliser la majeure partie de leur avoir net accumulé dans la valeur de leur maison, soit environ 300 000 $ [valeur marchande moins le solde hypothécaire] en guise de réserve de crédit peu coûteuse et d’accès facile en cas de dépenses importantes ou de gros imprévus dans leur train de vie », explique Mme Robillard.

« Et ce, jusqu’à la fin du remboursement d’hypothèque prévisible autour de leur 65anniversaire au rythme courant, ce qui soulagera d’autant le budget familial de sa plus importante charge financière. »

Les conseils personnels

Dans le cas de Victor, en début de retraite à 54 ans, Mme Robillard lui recommande d’abord de transférer l’actif de son compte de retraite immobilisé (CRI) en « fonds de revenu viager » (FRV).

« C’est un produit de revenu de retraite qui est plus flexible d’utilisation pour les situations de retraite hâtive que le CRI et le REER [régime enregistré d’épargne-retraite] », souligne Mme Robillard.

« Avec un FRV de 184 000 $ en actif initial, Victor pourra retirer un revenu de l’ordre de 11 000 $ dès la première année. Ça lui permettra aussi de minimiser les retraits de son REER – un revenu imposable – jusqu’à ce qu’il ait d’abord utilisé son surplus d’épargne – environ 35 000 $ – qui “dort” en compte non enregistré. Ça pourrait se faire avec des retraits ponctuels en guise de revenu d’appoint non imposable, et modulés en fonction des besoins courants du budget familial. »

De l’avis de Mme Robillard, un tel cheminement de Victor devrait l’amener sans souci jusqu’à la prochaine étape financière majeure de sa retraite dans une dizaine d’années, soit l’amorce des prestations de régimes de retraite publics à son 65anniversaire.

« Victor devra alors réviser le montant de ses retraits de REER en tenant compte de l’optimisation fiscale entre l’ensemble de ses revenus non imposables [retraits du compte d’épargne libre d’impôt ou CELI] et imposables : revenu rentier de FRV, prestations de RRQ et de PSV, retraits de REER », rappelle Mme Robillard.

Dans le cas de la conjointe de Victor, Roberta, Christine Robillard lui recommande d’abord de maximiser ses contributions admissibles à son CELI et à son REER durant ses deux dernières années de revenu salarial avant sa retraite à 58 ans, en 2022.

Et en début de retraite, Mme Robillard recommande à Roberta de convertir en FRV son avoir total d’environ 210 000 $ en actif de CRI et en part d’actif qu’elle retirera du régime de retraite de son dernier employeur.

« À l’instar de ce qu’a fait son conjoint deux ans plus tôt, Roberta aura ainsi un accès plus rapide à une source de revenu viager qui débutera autour de 13 000 $ par an », explique Christine Robillard.

« Ensuite, au fur et à mesure de ses besoins budgétaires, et de l’optimisation fiscale des revenus conjoints, Roberta pourra rehausser son revenu en puisant d’abord dans son léger surplus d’épargne non enregistré [d’environ 10 000 $], avant de passer à des retraits de son CELI [évalué à 112 000 $]. »

À ce rythme, estime Mme Robillard, Roberta pourra aisément « faire le pont » financier durant les sept premières années de sa retraite jusqu’à la prochaine étape de sa situation financière : le début des prestations de RRQ et de PSV à son 65anniversaire.

« À défaut de changements ou d’imprévus coûteux dans son train de vie, Roberta pourrait avoir les moyens de patienter jusqu’en fin de soixantaine afin de commencer progressivement les retraits de son REER. Ces retraits prendraient alors la relève de son FRV diminué après 12 ans en guise de principale source de revenu d’appoint aux prestations de régimes de retraite publics. »