Le poste de Sylvie a été supprimé en novembre dernier. À 62 ans, elle a été projetée dans la retraite plus tôt que prévu. Elle souhaitait rester sur le marché du travail au moins jusqu’à 64 ans.

« L’employeur veut éliminer le syndicat. Comme j’étais l’une des trois dernières syndiquées, il a aboli mon poste. Ça m’a inquiétée d’être licenciée », confie-t-elle au téléphone. Pour celle qui a une vie active et bien remplie, c’est tout un revirement.

Sylvie recevra des prestations d’assurance-emploi à partir de la mi-juin, jusqu’en février 2020. Elle se demande si elle a les moyens de prendre sa retraite maintenant ou si elle doit retourner travailler.

« Mon conjoint est plus âgé que moi, il va avoir 75 ans, explique-t-elle. Est-ce que je devrais profiter de la vie avec lui ? Et si je retourne travailler à mi-temps, est-ce que je vais perdre de l’argent en fin de compte ? »

LES CHIFFRES

Pension à vie indexée du défunt mari : 4579 $ par mois RRQ du défunt mari : 145 $ par mois Assurance-emploi : 2000 $ par mois REER : 505 038,32 $ CELI : 0 $ Rente estimée de son employeur : 583 $ par mois RRQ estimée à 65 ans : 1089 $ par mois RRQ estimée à 67 ans : 1236 $ par mois Condo (valeur 575 000 $) Hypothèque : 240 000 $ (paiement de 1222 $ par mois) Charges de copropriété : 400 $ par mois Assurance vie : 68 $ par mois Assurance invalidité : 180 $ par mois Carte de crédit : 6500 $

PREMIER CONSTAT

Planificateur financier chez Lafond + Associés, Antoine Chaume a scruté en détail le budget que Sylvie nous a fourni avec toutes ses dépenses et tous ses revenus. La première chose qu’il constate, c’est qu’elle paie une police d’assurance temporaire qui n’est peut-être pas nécessaire.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

Antoine Chaume, planificateur financier chez Lafond + Associés

« Une police d’assurance temporaire, c’est pour des besoins temporaires, soutient-il. Comme remplacer un revenu au cas où un des deux conjoints décède ou quand on a des enfants en bas âge. Si l’objectif de Madame est de léguer une somme d’argent, l’assurance temporaire n’est pas une bonne stratégie. Pour quelqu’un en bonne santé, c’est de l’argent jeté aux poubelles. Elle devrait songer à une assurance vie permanente. »

Antoine Chaume suggère aussi d’indiquer un bénéficiaire sur la police plutôt que simplement la succession. Ainsi, au décès, l’argent sera remis au bénéficiaire en deux mois plutôt que sur une période de 12 mois ou plus dans le cas d’une succession.

COMBIEN VALENT LES RENTES DE SYLVIE

Sylvie reçoit une rente de son conjoint décédé et recevra une rente de son employeur. Les deux rentes sont garanties à vie et indexées annuellement. Le total s’élève à 67 200 $.

« Les gens ne réalisent pas à quel point ça a une grande valeur d’avoir des régimes de retraite avec des montants aussi élevés, garantis à vie et qui sont indexés, observe Antoine Chaume. Souvent, les gens dans le milieu de l’éducation ou de la santé, qui ont des régimes à prestations déterminées, ne réalisent pas l’ampleur de ces régimes-là. »

Si Sylvie voulait se procurer une rente indexée garantie à vie de 67 200 $, il lui faudrait débourser 1,6 million de dollars, calcule Antoine Chaume.

« Avec ses REER, c’est comme si elle avait 2,1 millions d’actifs », estime-t-il.

LA RÉPONSE

Sylvie peut donc se la couler douce avec ses généreuses rentes et ses épargnes en REER.

« Elle est de toute évidence dans une bonne situation financière, affirme Antoine Chaume. Elle a le choix, si c’est ce qu’elle souhaite, d’arrêter de travailler et de faire autre chose, de la peinture, du bénévolat. Elle est indépendante financièrement. »

Selon le planificateur financier, le meilleur scénario pour Sylvie serait de continuer à percevoir ses prestations d’assurance-emploi jusqu’en 2020 et ensuite commencer à retirer le régime de retraite de son dernier employeur. Afin d’obtenir le maximum des rentes du gouvernement, Antoine Chaume conseille d’attendre à 67 ans pour commencer à les percevoir.

« Une femme de 63 ans en bonne santé a plus de 25 % de chances de vivre au-delà de 87 ans. Si elle prend ses rentes à 67 ans plutôt qu’à 65 ans et qu’elle vit au-delà de 83 ans, elle retirera au total plus d’argent. »

Compte tenu du fait qu’elle a des pensions garanties à vie, elle pourrait alors financer le manque à gagner pour ces années avec des REER.

Et s’il prenait une envie folle à Sylvie de retourner travailler, ses revenus annuels nets ne devraient pas dépasser 77 580 $. Sinon, elle devra rembourser une partie ou la totalité des prestations de la Sécurité de la vieillesse.