Joanie est une jeune femme organisée, déterminée, sportive, écoresponsable et endettée.

« J'ai terminé mes études avec une bonne dette d'études, dont un prêt du gouvernement et une marge de crédit, maintenant convertie en prêt, confie-t-elle. Actuellement, je rembourse ces prêts à hauteur de 220 $ par semaine, soit 180 $ pour la marge et 40 $ pour le prêt du gouvernement. »

Joanie a terminé ses études en décembre 2012 et travaille pour son employeur actuel depuis octobre 2013. Elle estime pouvoir rembourser la marge de crédit bancaire d'ici un an et demi.

Malgré ses dettes, elle réussit à épargner.

« Parallèlement, je mets 100 $ par semaine dans un REER collectif : je verse 50 $ et mon employeur ajoute 50 $. »

Elle y a accumulé 11 000 $ jusqu'à présent. Son ami Francis détient 25 000 $ dans le sien.

Ils contribuent même à un REEE, à raison de 10 $ par mois chacun. « C'est pour notre filleule », explique-t-elle en riant.

PROJET MAISON

Ils habitent dans l'est du Québec, où ils louent un appartement « très, très bien » qui leur coûte 700 $ par mois, incluant l'électricité et l'internet.

Mais à l'approche de la trentaine, Joanie se voit vivre dans son propre logis.

« Je veux me servir de la somme accumulée dans mon REER pour un RAP, afin d'acheter une maison avec mon conjoint. On vise d'ici deux ou trois ans, si c'est réaliste, mais on est prêts à le reporter si ça ne l'est pas. »

Le couple a un deuxième projet qui, lui non plus, n'est pas encore en chantier.

« Nous aimerions également, d'ici deux ans, avoir un premier enfant. Je me demande quel impact cela aura sur notre budget », demande Joanie.

Joanie a fourni un impeccable relevé budgétaire, préparé sur chiffrier.

« Outre les paiements de dettes, tous nos postes budgétaires sont déjà réduits au minimum », souligne-t-elle. Le couple possède une voiture - une seule, ce qui n'est pas courant en région -, entièrement payée.

Or, le projet enfant est lié au projet maison.

« Nous n'aurions pas le choix de déménager éventuellement si nous avons un enfant, car il n'y a qu'une seule chambre à coucher dans notre logement actuel. »

Maison ? Enfant ? « On ne sait pas quoi faire en premier ! »

OÙ METTRE LES PRIORITÉS ?

« Ma question est la suivante : lorsque mon prêt à la caisse sera remboursé, serait-il plus avantageux d'attendre avant d'acheter la maison et de mettre 220 $ par semaine sur mon prêt du gouvernement pour le rembourser en totalité, ce qui prendrait une année supplémentaire ? Devrait-on plutôt acheter une maison tout de suite, étant donné que les taux d'intérêt hypothécaires sont bas et que les intérêts payés sur le prêt gouvernemental sont partiellement remboursés par un crédit d'impôt ? »

Une chose est sûre : « Nous ne souhaitons pas déménager dans un autre appartement. Quand nous quitterons ce logement, ce sera pour emménager dans la maison que nous aurons achetée ou construite... »

Car c'est là un autre dilemme.

Ils hésitent entre acheter une maison existante et en faire construire une neuve à leur goût.

« Gérer le chantier demande beaucoup d'énergie, souligne-t-elle. On a des amis qui sont en train de le faire, et il y a des dépassements de coûts.

« Mais après ça, la maison est à ton image. »

À son image ?

« Elle serait écoénergétique, pas trop grande, avec une serre intégrée », décrit-elle comme si la maison se dressait déjà devant elle.

Le prix est un enjeu. Ils ont visité quelques propriétés dans la région.

« À 200 000 $, il y avait beaucoup de réparations et d'investissements à faire. Pour avoir quelque chose de tout inclus, ça va plus chercher autour de 230 000 $ à 250 000 $. »

Par où commencer ?

PORTRAIT

JOANIE, 29 ans

• Revenus nets : 29 790 $

• Dépenses courantes : 13 810 $

• Versement CELI (vacances) : 520 $

• Versement REER : 2750 $

• Remboursement marge étudiante : 9360 $

• Remboursement aide financière aux études : 2160 $

• Versement REEE : 120 $

• Surplus budgétaire : 1070 $

ÉPARGNE (MAI 2016)

REER 11 100 $

DETTES (MAI 2016)

• Aide financière aux études : 11 900 $

• Marge de crédit étudiante : 15 100 $

ACHETER OU ACCÉLÉRER ?

Si Joanie maintient son rythme de remboursement de 780 $ par mois, sa marge de crédit étudiante de 15 170 $ devrait être soldée dans un peu plus de 20 mois, au début de 2018.

Deux avenues s'offriront alors à elle. Laquelle suivre ? demande-t-elle.

C'est ce que départage Sarah Mathieu, représentante en épargne collective et conseillère en sécurité financière au Groupe Mathieu Turgeon.

Dès la marge étudiante remboursée, Joanie pourrait acquérir une maison avec Francis.

Les 780 $ qu'elle consacrait jusqu'alors au remboursement seraient appliqués à une mensualité hypothécaire.

D'ici là, Joanie aura continué à contribuer à son REER collectif à raison de 50 $ par semaine, plus la même somme versée par son employeur.

Sarah Mathieu estime que 10 850 $ s'ajouteront ainsi aux 11 100 $ actuels, pour un total de 21 850 $.

Francis apportera la contribution des 25 000 $ déjà accumulés dans son REER - c'est le retrait maximal permis pour un RAP.

Pour l'achat d'une maison de 250 000 $, le couple pourrait donc verser un apport de 46 950 $.

« Plus on met de l'argent en mise de fonds, moins la prime de la SCHL sera élevée », rappelle Sarah Mathieu.

Avec une mise de fonds entre 15 et 20 %, le taux de l'assurance prêt hypothécaire est fixé à 1,8 %, pour une prime de 3655 $.

On l'ajoute au prêt, ce qui porte l'emprunt à 206 705 $.

Avec un taux d'intérêt hypothécaire fixé prudemment à 4 % et un amortissement sur 25 ans, la mensualité s'élève à 1087 $.

Le prêt de l'Aide financière aux études, pour sa part, continuerait à être remboursé à petits pas. En maintenant le rythme à 180 $ par mois, il lui resterait environ quatre ans à courir.

ACCÉLÉRER D'ABORD

Serait-il préférable de retarder l'achat pour se consacrer d'abord au remboursement du prêt de l'Aide financière aux études ?

En y appliquant également les 780 $ libérés, la question sera réglée une dizaine de mois plus tard, à la fin 2018.

Entre-temps, Joanie continuera de cotiser à son REER. Au moment de l'achat, elle y aura accumulé un peu plus de 25 000 $. En utilisant tous les deux le RAP au maximum, les deux conjoints pourront donc verser une mise de fonds de 50 000 $.

« Le taux de la prime de la SCHL serait alors de 1,25 %, étant donné que la mise de fonds atteint 20 % », indique notre conseillère.

Avec la prime de 2500 $, l'emprunt hypothécaire totaliserait 202 500 $. La mensualité hypothécaire s'établit alors à 1065 $.

ET LE BUDGET ?

En additionnant les 700 $ du loyer actuel et les 780 $ consacrés au remboursement de la marge étudiante, le couple disposera déjà de 1480 $ pour les nouveaux frais de logement.

Que la mensualité hypothécaire s'élève à 1065 $ ou 1087 $, il y a largement place pour les impôts fonciers.

Bonne nouvelle : « Les deux avenues sont réalistes, les deux pourraient se faire », constate Sarah Mathieu. Dans la mesure toutefois où le budget d'achat est respecté : c'est le grand risque de l'autoconstruction, rappelle-t-elle.

PROFITER DES BAS TAUX ET DES CRÉDITS D'IMPÔT ?

En faveur d'un achat précoce, Joanie a évoqué deux arguments. D'abord, il faut profiter des taux d'intérêt hypothécaires pendant qu'ils sont bas. Ensuite, les intérêts payés sur le prêt de l'Aide financière sont partiellement remboursés par un crédit d'impôt.

« On ne peut pas se prononcer sur ce qui va arriver avec les taux d'intérêt dans le futur. En ce moment, ils sont bas, mais comme on n'a aucun contrôle là-dessus, le principe est de prendre la meilleure décision au moment où on a à la prendre. »

- Sarah Mathieu, représentante en épargne collective et conseillère en sécurité financière au Groupe Mathieu Turgeon

Les crédits d'impôt sur les intérêts d'un prêt étudiant ? « Dans leur cas, c'est négligeable par rapport aux deux situations proposées. »

L'écart de 22 $ entre les deux mensualités n'est pas non plus un facteur de décision.

« Ce n'est pas là qu'est la grande différence. Elle se situe plutôt dans les liquidités. »

LES LIQUIDITÉS

Dans le second scénario, le prêt de l'Aide financière aux étudiants est totalement remboursé au moment de l'acquisition de la propriété. Les 180 $ par mois qui y étaient consacrés s'ajoutent donc au budget.

« Joanie a ainsi des liquidités de 2160 $ de plus par année, observe Sarah Mathieu. Ce n'est pas négligeable, étant donné qu'elle devra absorber les premiers frais durant la première année. »

Dans le premier scénario, où Joanie laisse courir son prêt étudiant, ce répit ne survient qu'après quatre ans de possession.

LE CONSEIL

Sarah Mathieu recommande donc de rembourser les deux prêts avant d'acquérir une propriété.

« Pourquoi ? Quand on pense à s'acheter une maison, on se fait un budget, mais il y a des frais d'installation auxquels on ne pense pas nécessairement et qu'il faut aussi chiffrer : le notaire, les meubles manquants, les rideaux... »

Des liquidités supplémentaires aideront à faire face à ces prévisibles imprévus - les imprévus sont certains, c'est leur nature qui peut varier.

Une naissance, par exemple, ne se planifie que jusqu'à un certain point.

« Pour leur enfant, je leur recommanderais peut-être d'attendre un an après l'achat, le temps que les premiers frais soient absorbés. »