Chaque semaine, un financier répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Éric Gibouleau, de la firme Dorchester Gestion d'actifs à Montréal.

Quel a été l'événement le plus significatif des derniers jours en Bourse ?

Il est difficile de passer sous silence la saga en Grèce. Après plusieurs semaines de négociation, la Grèce n'a pas réussi à s'entendre avec ses créanciers sur les compressions nécessaires afin d'obtenir une extension sur sa dette. Le premier ministre grec a donc décidé de tenir un référendum, ce dimanche, auprès de la population sur les propositions d'austérité de ses créanciers. Un vote pour le « oui » devrait rassurer les marchés financiers, tandis qu'un vote pour le « non » devrait catapulter la nervosité ainsi qu'accroître la volatilité des marchés. Ultimement, un vote pour le « non » pourrait vouloir dire une sortie de la Grèce de l'Union européenne et, par conséquent, une faiblesse ou même l'effondrement temporaire de la devise européenne.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement ?

Nous avons tendance à sélectionner nos investissements selon la méthode ascendante. Ainsi, les données macros viennent au second rang dans notre analyse et nos choix de titres. Pour moi, les multiples d'évaluation et les rendements des flux de trésorerie libres sont les indicateurs les plus importants dans mes décisions d'investissement. Il est de plus en plus difficile de trouver des sociétés avec des ratios cours/bénéfices attrayants et dont le bilan est solide.

Que feriez-vous avec plusieurs milliers de dollars à investir ?

Étant donné les multiples d'évaluation élevés des marchés actuels, nous préconisons une approche prudente pour nos investisseurs. L'encaisse de nos portefeuilles se situe entre 15 % et 20 %. Nous sommes patients et attendons les occasions de pouvoir déployer notre encaisse. Nous favorisons aussi une bonne diversification du portefeuille tant sur le plan sectoriel que géographique.

Je crois que malgré les multiples élevés, il reste de bonnes occasions d'investissement comme le Groupe CGI, par exemple. L'action a reculé de plus de 10 % par rapport à son sommet en raison de son exposition à l'Europe, qui représente 58 % de ses revenus. La société génère des flux de trésorerie libres élevés, ce qui lui a permis de rembourser une bonne partie de sa dette et d'effectuer un important rachat d'actions. La société devrait aussi continuer à croître par acquisition vu son bilan sain et la qualité de son équipe de direction.

Nous aimons aussi plusieurs sociétés similaires aux États-Unis, notamment Microsoft et Cisco qui comptent sur un bilan solide et des flux de trésorerie libres élevés.

Quel placement évitez-vous à tout prix ?

J'évite les entreprises du secteur des biotechnologies. Le sous-secteur des biotechs du S&P 500 est en hausse de 35 % depuis le début de l'année. Les évaluations accordées à ces sociétés sont beaucoup trop élevées et sont basées sur des perspectives de croissance et de réussite beaucoup trop optimistes. La vague de fusions et acquisitions dans le secteur a aussi amené les évaluations à la hausse. On pourrait voir dans la prochaine année une correction assez importante du secteur.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus ?

Je pense que le marché sous-estime les multiples relativement élevés par rapport aux normes historiques. Les investisseurs sont de plus en plus à l'aise avec les marchés actuels. Ils ont tendance à oublier que nous sommes dans la sixième année d'un marché haussier et que pour la première fois en très longtemps, la Réserve fédérale américaine augmentera probablement son taux d'intérêt directeur.Éric Gibouleau est associé et gestionnaire de portefeuille chez Dorchester Gestion d'actifs à Montréal. L'actif sous gestion de la firme s'élève à 850 millions de dollars. Avant de se joindre à Dorchester, Éric Gibouleau a notamment travaillé pour la Financière Banque Nationale ainsi que pour Magna Vista Gestion des investissements.