Chaque samedi, un financier répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Cimon Plante, de la Financière Banque Nationale.

Quel a été l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

Quand Ben Bernanke parle, le marché écoute. Cette semaine ne fut pas l'exception. Le ton s'est adouci et on peut déceler qu'il n'y aura pas de modification à la politique en vigueur. L'institution gardera le cap dans son programme d'achat d'actifs pour l'instant et gardera le statu quo dans son maintien du taux d'intérêt tant que le taux de chômage ne passera pas sous les 6,5%. Bernanke a aussi indiqué que le taux resterait à un faible niveau même lorsque le programme de rachat d'actifs se terminera.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement?

Je mets l'accent sur les résultats trimestriels américains. Plusieurs sociétés ont battu les prévisions, mais les attentes envers certaines avaient été préalablement diminuées.

En date du 26 juillet, des 263 sociétés ayant rapporté leurs résultats, 73% ont généré des bénéfices supérieurs aux attentes. Les données attestent aussi que seulement 54% des sociétés ont obtenu des revenus bruts au-delà des attentes. Les hausses de profits ne sont donc pas nécessairement liées à une croissance des ventes.

On remarque que les prévisions des analystes sont des cibles en mouvement. Cibles qui tendent vers le bas. À la fin du mois de juin, les projections de croissance étaient autour de 1,1%, quand elles étaient de 4,3% en mars.

Que feriez-vous avec plusieurs milliers de dollars à investir?

Dans le contexte actuel, je privilégie les actions, car elles sont une classe d'actifs moins dispendieuse que les titres obligataires et l'immobilier canadien. Cependant, à la suite de la récente hausse des marchés, je recommande une approche de sélection de titres individuels plutôt qu'une approche indicielle.

Par exemple, le ratio cours/bénéfices Shiller normalisé (qui consiste à prendre les bénéfices moyens du S&P 500 sur 10 ans par rapport à la valeur de l'indice) se situe autour de 19 alors que la moyenne, selon Cresmont Research, est autour de 16. Donc le marché dans son ensemble est raisonnablement évalué.

Il reste cependant des occasions. Je favorise notamment le secteur des services énergétiques. Les activités de fracturation devraient connaître une reprise vers la fin de l'année. Au Canada, CanElson Drilling, Canyon Services Group et Essential Energy Services sont des sociétés que je privilégie. Elles versent un dividende intéressant qui nous permet d'être payés pour patienter.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

Dans la situation où cela s'applique, je recommande d'éviter des obligations gouvernementales pour un épargnant ayant un horizon à long terme. Ce type d'investissement comporte son lot de risques, lorsque l'on prend en compte l'inflation et le potentiel de hausse de taux.

Certains de mes clients manifestent de l'intérêt pour les secteurs des métaux de base et aurifères à la suite de la baisse de plusieurs titres. Je ne recommande pas d'investir trop tôt dans ces sociétés. Plusieurs producteurs ont fait des acquisitions à des coûts trop élevés, un nombre important de sociétés sont à la recherche d'un nouveau PDG, et des pertes financières et éliminations de postes pourraient encore être annoncées.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus?

Depuis 2008, la Chine a maintenu sa croissance avec des injections de crédit par l'entremise de projets immobiliers, d'infrastructures et en investissant dans sa capacité industrielle.

Un ralentissement économique pourrait créer un effet de cascade dans le secteur financier où l'effet de levier de la dette est présent. Certains promoteurs immobiliers, gouvernements locaux et entreprises d'État auraient de la difficulté à assumer leurs responsabilités. Nous en avons eu un aperçu en juin lorsque le taux interbanque Shibor a bondi de 12%, ce qui traduit un manque de liquidités dans le système.

Le gouvernement tente d'accélérer la consommation afin de conserver une croissance élevée du PIB. La croissance de la consommation se ferait probablement mieux par une croissance du revenu moyen. Le revenu moyen des ménages chinois n'a pas augmenté au même rythme que l'économie.

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Cimon Plante est gestionnaire de portefeuille au Groupe financier Cimon Plante/Financière Banque Nationale. L'actif sous gestion au Groupe financier Cimon Plante s'élève à 145 millions de dollars. Cimon Plante travaille dans le domaine depuis une dizaine d'années et est employé à la Financière Banque Nationale depuis 2006.