Chaque samedi, un financier répond à nos questions. Il donne sa lecture des marchés, offre son point de vue sur la Bourse et lance quelques conseils d'investissement. Cette semaine, Christian Cyr, de Fiera Capital.

À votre avis, quel est l'événement le plus significatif des derniers jours à la Bourse?

J'ai regardé la publication des résultats trimestriels des entreprises, surtout du côté américain. Les marchés étaient nerveux à cause du ralentissement de la croissance économique en Chine. Mais pour l'instant, les investisseurs n'ont pas été déçus. Il n'y a pas de déconfiture marquée. Personne ne crie au désastre.

Quel indicateur suivez-vous le plus attentivement en ce moment?

Je regarde rarement les statistiques économiques, parce que la moitié du temps, les chiffres sont révisés par la suite! Bien souvent, c'est trompeur.

Je vais plutôt continuer de suivre l'ensemble des résultats des entreprises aux États-Unis et au Canada. En général, les résultats d'une seule entreprise ne sont pas un très bon indicateur économique, mais si on prend l'ensemble des entreprises dans un secteur, on peut avoir de bonnes pistes.

Est-ce qu'on verra une stabilisation ou une croissance des ventes des entreprises, surtout dans les régions qui inquiètent le plus les investisseurs, comme l'Europe et l'Asie? Est-ce qu'on prévoit encore des dépenses en capital importantes dans la région pacifique? Est-ce qu'il y a vraiment une reprise du côté américain?

Que feriez-vous avec 10 000$ à investir?

J'en conserverais une partie en encaisse, parce que durant la saison des résultats trimestriels, il y a de très bonnes sociétés qui ratent les prévisions des analystes. Leur action recule énormément, même si l'entreprise a un beau potentiel à moyen et long terme. De manière tactique, on peut garder de l'encaisse et suivre quelques sociétés intéressantes. Si l'une d'entre elles déçoit..., c'est le moment d'acheter.

J'essaierais aussi de créer un panier de titres dans le secteur du gaz naturel. Je sais que les investisseurs n'aiment pas les producteurs de gaz. Leurs actions sont extrêmement faibles. Mais quand les marchés commencent à parler d'un changement structurel dans une industrie cyclique, c'est habituellement un bon indicateur de vente ou d'achat.

Dans le gaz naturel, on trouve plusieurs producteurs solides, avec un bon bilan financier, qui peuvent faire un peu d'argent, même si le prix du gaz est extrêmement déprécié. En ce moment, la production est trop élevée pour la capacité de stockage. Mais si la production décélère un peu, on pourrait avoir un effet élastique sur les prix. Les titres qui ont énormément souffert pourraient rebondir de très belle façon, d'ici 18 à 24 mois. Mais il y a des risques de perdre de l'argent à court terme.

Quel placement évitez-vous à tout prix?

J'éviterais plusieurs titres miniers. Leurs coûts augmentent de façon exponentielle: les coûts de la main-d'oeuvre à cause de la rareté, les coûts de l'énergie avec la hausse du prix du pétrole. Leurs actions paraissent attrayantes, mais ça pourrait être un piège, un value trap.

Aussi, j'userais de discernement avec les actions à dividende élevé. Les gens les mettent toutes dans le même panier et ne regardent que le rendement du dividende, sans s'intéresser à la société et à son évaluation boursière. Quand on achète ces entreprises-là, il faut regarder la santé financière, le plan de croissance, la capacité de l'entreprise de maintenir ou même d'augmenter le dividende.

Qu'est-ce que les marchés sous-estiment le plus actuellement?

Les marchés sont vraiment très optimistes pour le deuxième semestre de 2012. Ils s'attendent à ce que la Chine retrouve rapidement un taux de croissance économique aussi élevé que par le passé. Le prix des matières premières dépend beaucoup de ce retournement.

Je pense que les gens s'attendent à une résolution rapide de la situation en Europe. On entend beaucoup moins parler de la crise en Europe. Mais je ne crois pas que les problèmes ont été résolus aussi vite.

Christian Cyr est vice-président et gestionnaire d'actions de petites capitalisations chez Fiera Capital. Il compte 15 ans d'expérience en finance, notamment comme analyste chez Desjardins et Tassé&Associés, puis comme gestionnaire chez Gestion de portefeuille Natcan. Cette filiale de la Banque Nationale a fusionné, en mars dernier, avec Fiera pour créer un géant de 54 milliards de dollars d'actifs.