Toutes les 40 minutes, le téléphone sonne. L'agent de recouvrement de Bell Canada réclame 150$. La cliente a beau lui expliquer qu'il s'agit d'une erreur de facturation, l'agent ne veut rien entendre. «Ils sont drillés pour nous dire qu'on doit l'argent», raconte Sophie Gironnay.

À maintes reprises, elle a téléphoné au service de facturation de Bell pour exiger que ce manège cesse. Rien à faire.

Les appels de l'agent de recouvrement ont continué. Toutes les 40 minutes. Durant deux semaines.

«Imaginez la qualité de vie: comme je travaille de chez moi, je ne pouvais pas débrancher la ligne», raconte la dame qui s'insurge contre ces méthodes d'intimidation accompagnées de menaces d'interruption de service.

Pourtant, Bell affirme que son processus de recouvrement est très bien encadré. Lorsqu'un client est en retard dans ses paiements, son dossier peut être transmis à l'équipe interne de collection.

«Un système de composition automatique est utilisé pour joindre les clients. Le système permet un maximum de huit appels par jour, chaque jour», explique la porte-parole Marie-Ève Francoeur.

«Bien entendu, si nous parlons au client et qu'une entente est prise, alors il n'y a pas lieu de rappeler», précise-t-elle.

Il reste que le processus a failli rendre «dingue» Mme Gironnay. Elle n'est pas la seule. Les pratiques de recouvrement abusives sont le deuxième sujet de plaintes à l'Office de la protection du consommateur (OPC), représentant 7% de l'ensemble des dossiers traités.

En 2010-2011, l'OPC a reçu 5012 demandes d'information sur les agences de recouvrement. Du lot, 684 consommateurs ont réclamé un formulaire de plainte, une augmentation de 17% par rapport à l'année précédente.

Il faut dire que le taux d'endettement des Canadiens atteint 153%. Un record. Les consommateurs ont de plus en plus de mal à payer leurs comptes, selon l'Association des banquiers canadiens.

Depuis la crise financière de 2009, la proportion de cartes de crédit en souffrance (retard de plus de 90 jours) est remontée au-dessus de 1%. Et la proportion d'hypothèques en souffrance a grimpé au dessus de 0,4% (par rapport à environ 0,25% au milieu des années 2000).

Pour récupérer les sommes impayées, les agences de recouvrement font souvent fie de la Loi sur le recouvrement de certaines créances, a démontré une enquête menée en 2008 par Option Consommateurs.

Payés à commission, les agents «mettent de la pression». Ils n'hésitent pas à être arrogants, agressifs. Ils téléphonent constamment, menacent de saisir les biens, d'appeler l'employeur.

Selon Réal Coallier, directeur du bureau de Montréal de l'OPC, «70% des consommateurs se plaignent de menace et de harcèlement. Ils nous disent qu'ils se font appeler de nombreuses fois par jour. Chaque fois que le téléphone sonne, ils sont sur le nerf.»

Mise en demeure

Le premier conseil qu'il leur donne: «Envoyez une mise en demeure à l'agence de recouvrement pour lui dire que de ne plus vous contacter au téléphone, mais seulement par écrit. Après cet avis, si l'agent continue, il est en effraction.»

Selon la Loi, l'agent de recouvrement n'a pas le droit de communiquer par téléphone, la première fois, avec le consommateur. Il doit d'abord envoyer un avis écrit. Sinon, il agit de manière illégale.

De plus, l'agent doit appeler entre 8h et 20h. Il lui est interdit de vous déranger à l'extérieur de ces heures, ou de vous contacter le dimanche et les jours fériés.

L'agent n'a pas le droit de vous menacer de poursuite devant les tribunaux. Il lui est interdit d'entrer en contact avec vos proches (voisins, parents, amis, employeur, etc.). Il peut toutefois leur téléphoner une seule fois pour obtenir vos coordonnées, s'il ne les a pas déjà.

Pour en savoir plus sur les règles que les agents de recouvrement doivent suivre, consulter le site web de l'OPC.

Autre conseil, si vos dettes vous étouffent, consultez une ACEF ou un conseiller budgétaire qui vous aidera à assainir vos finances et à vous entendre avec vos créanciers.

Par contre, méfiez-vous des redresseurs de dettes qui profitent de la détresse des consommateurs surendettés. Les solutions miraculeuses sont souvent des pièges.