Les épargnants se souviendront de 2011 comme de l'année des grands bouleversements géopolitiques: crise de la dette souveraine en Europe, Printemps arabe, saga à propos du relèvement du plafond de la dette aux États-Unis. Les détenteurs de fonds communs n'ont pas échappé à la tourmente: l'ensemble des fonds communs distribués au Canada a baissé de 5% en moyenne, en 2011. Toutes les grandes catégories de fonds d'actions ont écopé. Mais les fonds d'obligations ont permis de sauver les meubles. Voici les étoiles et les prix citron de l'industrie des fonds en 2011...

Première étoile

Les obligations... pour combien de temps encore?

C'est LA surprise de 2011: les obligations de long terme arrivent en tête. Quelle ironie! C'est la catégorie d'actifs dont les experts se méfiaient le plus au début de 2011.Le consensus recommandait de s'en tenir à du court terme, dans la perspective d'une remontée des taux d'intérêt. Avec la crise en Europe, les taux d'intérêt ont baissé encore plus bas. Et quand les taux baissent, la valeur des obligations grimpe, en particulier celle des obligations de longue échéance.

C'est ainsi que les fonds d'obligations à long terme ont gagné 17%. En tête du peloton, le fonds SEI Obligations à long terme, rempli d'obligations du Canada de 2026 à 2031, a bondi de 20%.

Avec le retour de l'inflation, les obligations à rendement réel, dont le rendement s'ajuste à l'inflation, ont aussi connu une année fantastique. Deux fonds négociés en Bourse (FINB BMO obligations à rendement réel et le Ishares CDN Dex Real Return Bonds Index) ont avancé de 18%.

Les fonds d'obligations classiques ont enregistré de belles performances. Les poids lourds de la catégorie (TD obligations canadiennes, RBC Obligations, PH & N obligations) ont offert un rendement de 8%.

Reste que les obligations vivent sur du temps emprunté. Les obligations 10 ans rapportent moins que 2%, un plancher historique. Tôt ou tard, les taux d'intérêt finiront par remonter... et la valeur des obligations fondra. Prudence.

Malgré tout, il faut garder des obligations dans son portefeuille: «Elles jouent le rôle de gardien de but... on l'a vu cette année», dit Sylvain de Champlain, président de De Champlain Groupe financier.

Deuxième étoile

Les fiducies sont mortes, vive les fiducies!

Le soir de l'Halloween 2006, Ottawa avait annoncé la mort des fiducies de revenus. Après quatre de grâce, ces véhicules de placement ont définitivement perdu, en janvier 2011, l'avantageux traitement fiscal qui les rendait si populaires.«En préparation pour 2011, de nombreuses fiducies de revenu ont été reconverties à des structures de société et ont énormément réduit leurs dividendes», note Philip Lee, analyste en fonds de placement auprès de Morningstar Canada. Cette catégorie de fonds a même été supprimée.

Mais Ottawa a laissé la vie sauve aux fiducies immobilières qui conservent leur avantage fiscal.

En 2011, les REIT (real estate investment trust) ont été les championnes de la Bourse, grâce à la baisse des taux d'intérêt. Les fonds d'actions de l'immobilier ont grimpé de 12%.

Star de cet univers, le iShares canadien REIT Sector Index a grimpé de 21%. Poids lourd de sa catégorie, avec 945 millions d'actifs, le fonds Sentry placement immobilier a gagné 10% en 2011 (7,7% annuel composé sur 10 ans).

Troisième étoile

Les fonds équilibrés

Avec un portefeuille équilibré, les épargnants ne frappent jamais de coup de circuit, mais ils ne risquent pas de se faire retirer non plus. «Les investisseurs qui se font le plus mal, sont ceux qui y vont à la pièce», dit Jean-René Ouellette, analyste principal groupe-conseil en portefeuille chez Valeurs mobilières Desjardins.Grâce à la diversification et au rééquilibrage, deux principes de base en placement, les fonds équilibrés s'en sont sortis presque indemnes en 2010. Depuis 10 ans, ils affichent un rendement annuel composé de 4,5%.

Mention spéciale

Les fonds d'actions à dividendes

La Bourse canadienne a fondu de 9% en 2011, en grande partie à cause du ressac des ressources naturelles qui forment la moitié de son indice. Mais dans les secteurs plus défensifs, comme les télécommunications et la consommation stable, plusieurs sociétés qui versent des dividendes élevés ont fait de belles avancées.Les fonds d'actions canadiennes à revenus ont donc limité les pertes (-1% en 2011). Certains ont fait de petits miracles, comme les fonds RBC de revenus d'actions canadiennes, Dynamique actions productives de revenus et McLeanBudden revenus de dividende, avec un rendement d'environ 10%.

Mention spéciale

Les fonds d'actions américaines

La Bourse américaine a gagné 2% l'an dernier, en incluant les dividendes. Pour un Canadien, cela fait 4,4% de rendement en 2011, en tenant compte de l'appréciation de la devise américaine.Malheureusement, la plupart des fonds d'actions américaines les plus populaires ont fini l'année dans le rouge. La catégorie affiche un rendement de -0,6% pour 2011... quand même moins pire que les fonds d'actions canadiennes qui ont fondu de 10%.

À souligner: le fonds RBC O'Shaughnessy valeur américaine s'est bien tiré d'affaire avec un gain de 7% (15,5% annuel composé sur 5 ans)

Premier prix citron

La saignée des pays émergents

Pour éviter la surchauffe économique, les pays émergents, notamment la Chine, ont appliqué les freins à partir de 2010. Leur politique monétaire restrictive a fait déraper les Bourses.Les fonds de marchés émergents ont baissé de presque 20% en 2011. De loin le plus important de cette catégorie, le fonds AGF marchés en émergence a limité les dégâts avec une baisse de 15% et il maintient un rendement annuel composé de 10% sur 10 ans.

Les fonds BRIC ont connu les pires revers (20 à 30% de baisse en 2011). L'acronyme qui avait été inventé pour regrouper quatre pays d'avenir (Brésil, Russie, Inde, Chine) est maintenant tourné en dérision. Certains stratèges parlent de Bloody Ridiculous Investment Concept, ou concept d'investissement ridicule et sanglant!

Deuxième prix citron

Le revers de fortune de l'or

Valeur refuge, l'or a gagné 11% en 2011. Les fonds qui investissent directement dans des lingots (Sprott lingots d'or, Claymore Gold Bullion) ont calqué cette performance. Par contre, les fonds d'actions de métaux précieux accusent la pire performance de toutes les catégories de fonds (-24%). Trouvez l'erreur?

«Au cours de la deuxième moitié de l'année, les investisseurs ont recommencé à voir les sociétés aurifères comme des actifs risqués, plutôt que comme une valeur refuge. Pour se mettre à l'abri de la crise des dettes souveraines, ils ont préféré acheter des dollars américains», explique M. Ouellette.

Ainsi, le fonds CIBC métaux précieux a fondu du tiers... ce qui ne l'empêche pas d'être en hausse de 17% sur 10 ans! Ce n'est rien: le fonds RBC métaux précieux affiche un rendement annuel composé de 27% sur 10 ans: imaginez: 1000$ investis il y a 10 ans vaudrait aujourd'hui plus de 11 000$, malgré le récent repli.

Troisième prix citron

Le Japon emporté par la vague

Le tsunami qui a dévasté le Japon au début de l'année a eu de lourdes répercussions sur les fonds d'actions japonaises qui ont perdu 14% en 2011. Absolument aucun fonds n'a résisté à la vague.Les fonds d'actions japonaises accusent un rendement annuel composé de -1,8% sur 25 ans, la seule catégorie de fonds en recul sur une aussi longue période.

Mention spéciale

Les rendements sur 10 ans inférieurs aux frais

L'ensemble des fonds communs de placement distribués au Canada a baissé de 5% en moyenne en 2011. Depuis 10 ans, ils ont fourni un rendement annuel composé de seulement 2,4%. C'est moins que leur ratio de frais de gestion qui s'élève à 2,5%. C'est donc dire que les épargnants ont obtenu moins de rendement que les montants prélevés par les sociétés de fonds à même leurs épargnes, année après année.

Au final, les épargnants réalisent qu'il aurait été plus payant - et moins stressant - de garder leur argent en certificat de placement.

«Ça commence à peser lourd sur le moral des investisseurs, admet M. De Champlain. Mais comme la dernière décennie a été la pire depuis 80 ans, j'ose croire que la prochaine sera la meilleure.»