Demain, à l'occasion de la fête des Mères, ayons une pensée spéciale pour les jeunes mamans qui s'échinent au travail tout en s'occupant de leur marmaille. Elles n'auront pas volé leur petit moment de répit.

Lueur d'espoir à l'horizon, des employeurs de Granby, Rimouski, Boisbriand ou Québec mettent en place des mesures de conciliation travail-famille, pour séduire la génération Y dans un contexte de rareté de la main-d'oeuvre. Proactif, le gouvernement québécois lance une norme de certification conciliation travail-famille, qui, espère-t-il, montrera le pas.

Karine Chabot, représentante publicitaire pour un hebdomadaire montréalais, prend son mal en patience. Cette mère monoparentale de deux adolescentes de 12 et de 15 ans, a beau terminer sa journée de travail à 17 h précises, elle ne finit pas de courir avant tard le soir avec le souper, la vaisselle, les cours de cheerleading de l'aîné et les devoirs de la cadette.

«Je suis à bout, se plaint la jeune femme de 33 ans. Si j'avais les moyens financiers, je travaillerais trois jours par semaine.»

Mère de deux enfants de 9 et 7 ans, Marie-France Benoit travaille pour Altus Insight, de Toronto, division virtuelle du Groupe Altus, boîte de services-conseils en immobilier. Son adresse est au centre-ville de Montréal, mais elle travaille de sa maison dans une autre ville. «Au lieu d'aller chercher mes enfants au service de garde la broue dans le toupet à 17h30 après avoir été retardée dans la circulation, je pars à 5 heures moins 5 de chez moi et j'arrive au service de garde à 5 heures.»

Elle ne jure que par la technologie. «Nos boîtes vocales sont sur internet. Quelqu'un peut appeler n'importe quel bureau d'Altus au Canada, signaler mon numéro de poste et ça sonne chez moi à la maison. Chaque fois que je m'assoie à un ordi, je me connecte au réseau du bureau et j'ai accès à mes dossiers. Je peux travailler de l'endroit où je suis la plus productive», dit-elle enthousiaste.

Deux mères, Karine et Marie-France, mais le même besoin d'avoir du temps pour elle. «Les jeunes parents recherchent de la souplesse dans leur horaire de travail», dit Claudie Arsenault, coach de gestion et auteur du livre La conciliation travail famille; y trouver son compte et son bonheur. Aménager le temps de travail est à la portée de toutes les organisations, croit-elle, comme le prouve la firme Simon Turcotte, CGA.

Le cabinet comptable de Granby met à la disposition de ses 8 employés - 8 femmes - une panoplie de mesures ayant en commun la flexibilité: réduction du temps de travail; possibilité de s'absenter pour urgence familiale; retour progressif après un congé de maternité, etc.

«Les employés sont payés les heures où elles sont au bureau», dit l'homme d'affaires de 33 ans, père de fillettes de 8 et 9 ans. Il n'y a pas de gratuités. C'est une possibilité d'avoir accès à du temps pour soi.»

À l'occasion, des mesures de conciliation font tache d'huile, même dans un domaine reconnu pour ses longues heures comme la vente d'automobiles. À la suite d'une initiative d'Équipe Formule, un regroupement de trois concessions automobiles de Rimouski comptant 60 employés au total, les 13 concessionnaires de la capitale administrative du Bas-Saint-Laurent ont convenu de fermer dorénavant les vendredis soirs à 18h pour les week-ends. De plus, ils n'ouvrent plus que 2 jours entre Noël et le jour de l'an, de dire Diane Defoy, copropriétaire depuis 18 ans.

De son côté, Absolunet, de Boisbriand, laisse des temps libres à ses employés. «Il y a une obligation de présence au bureau entre 9h30 et 15h30, en dehors de ces heures les employés sont libres de gérer leur temps comme ils veulent», dit Martin Thibault, 40 ans, père de trois enfants et président du concepteur d'applications web et mobile. La société compte 52 employés.

«La conciliation travail-famille, c'est une préoccupation importante pour les propriétaires de PME», assure Martine Hébert, VP Québec, de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, citant des résultats d'un sondage datant de 2003.

En mars dernier, la Chambre de commerce et d'industrie Thérèse- De Blainville, dans la couronne nord de Montréal, a proposé une trousse d'implantation de mesures de conciliation à 1200 entreprises. Vingt-deux ont répondu à l'appel et trois ont profité de 1 heure de consultation gratuite.

Mme Hébert ne veut rien savoir par contre de tout règlement ou loi à caractère obligatoire sur le sujet.

Le gouvernement semble comprendre son rôle de facilitateur. De concert avec le Bureau de normalisation du Québec, ils ont lancé une norme de certification sur la conciliation travail-famille le 5 avril dernier, une première mondiale. La société Frima de Québec (voir autre texte) veut devenir la première entreprise à décrocher le label.

«Ça va amener une lancée dans la mise en application parce que ça vient dire aux employeurs: quand vous êtes certifiés, vous pouvez vous afficher comme un employeur de choix», croit Marianne Roberge, consultante en conciliation, en Chaudière-Appalaches.

La norme identifie quatre niveaux de certification. Pour décrocher ne serait-ce que le premier niveau, l'entreprise doit afficher publiquement une volonté ferme de concilier le travail et la famille, d'expliquer Linda Fortin, directrice du développement des politiques famille-aînés au ministère. Elle doit aussi mettre sur pied un comité de travailleurs qui ira sonder les besoins des employés. Chacune des mesures de conciliation donne des points. Le niveau de certification dépend du pointage obtenu.

En parallèle, le gouvernement offre un soutien financier pour les entreprises de 250 employés et moins. Le ministère rembourse jusqu'à 10 000 $ en frais de consultants. Jusqu'à maintenant, le ministère de la Famille a soutenu 13 projets pour 450 000 $. Deux formations sur la nouvelle norme seront données à Montréal et Québec auprès de 150 entreprises en juin.

Rêvons un peu: exemples de mesures de conciliation

>Semaine de travail comprimé

>Horaire flexible avec plages fixes de présence obligatoire

>Compte épargne-temps

>Congé pour responsabilités familiales

>Remboursement des frais d'inscription à une activité physique

>Semaine de 4 jours en période estivale

>Possibilité de télétravail occasionnel

>Pourcentage du temps consacré aux études comptabilisé

dans la semaine de travail

>Service de traiteur et possibilité d'apporter le souper

à la maison

>Service de garde d'urgence

>Journée « enfant au travail »

>Plan d'assurance pour la famille

Source : Trousse d'implantation de mesures de conciliation travail-famille-Table d'employabilité femmes des Basses-Laurentides

77,6%

Taux d'activité des femmes ayant un enfant de moins de 6 ans en 2009. En 1999, c'était 69,2 %.

85,1%

Pourcentage des naissances couvertes par le régime d'assurance parentale en 2009.

17 492

Homes se prévalent du congé parental en 2009, soit 20,9 % des naissances. En hausse de 2,8 points depuis 2006

71,4 %

Des familles avec un enfant de 4 ans ou moins dont les deux conjoints sont actifs. C'est 3,6 points de plus qu'en Ontario et qu'au Canada. L'écart s'est creusé depuis 2001.

Source : Un portrait statistique des familles au Québec, 201