«Le produit est très bon mais le nouveau format est très décevant.»

«Avant, les bouteilles pouvaient s'ouvrir facilement et maintenant elles sont encapsulées.»

Pas contents, les clients. Et ils le font savoir sur le web. En avril, après un interlude de quelques mois, leur cidre Mystique est (enfin) revenu sur les tablettes.

Redessiné et reformaté.

Le look, ça va: pas de commentaire. C'est le contenant qui pose problème: «Le format 6 x 341 ml était de loin plus intéressant que le nouveau format 4 x 250 ml.»

Les explications du propriétaire de la Cidrerie du Minot, Robert Demoy, éclairent le débat.

Dans son ancien format, le cidre pétillant Mystique était la propriété depuis 1998 de la Cidrerie Covey Hill, une créature commune de la Brasserie McAuslan, de Montréal, et de la Cidrerie du Minot, de Hemmingford. Produit par la Cidrerie du Minot, le cidre était envoyé en vrac chez McAuslan, qui le gazéifiait et l'embouteillait. Toutefois, la Régie des alcools, des courses et des jeux a refusé de renouveler le permis de cette production bicéphale.

Robert Demoy a décidé de racheter la marque et de rapatrier chez lui toutes les étapes de la production.

Misant sur la qualité, il a abandonné la gazéification au profit de la prise de mousse en cuve - en d'autres mots, une effervescence naturelle... mais plus coûteuse. De plus, alors que McAuslan pouvait maintenir une cadence horaire de 15 000 bouteilles, la chaîne de la cidrerie ne lui permet d'embouteiller que 1500 bouteilles à l'heure. Résultat, les coûts de production ont monté comme la mousse d'une bouteille trop secouée.

Solution: se distinguer, mieux définir la clientèle et rafraîchir l'image. D'où le passage d'une bouteille de 341 ml, en tous points identique à n'importe quelle bière, à une bouteille de 250 ml, plus fine. «La clientèle est peut-être plus féminine, et on ne boit pas du cidre à la même vitesse que de la bière, justifie Robert Demoy. Je me disais que le format de 250 ml était peut-être un format plus adapté, et ça réglait nos questions de coût en même temps.»

Il a également abandonné la boîte fermée de six bouteilles, trop proche parente de celles des microbrasseries. Il a plutôt opté pour un emballage ouvert de quatre bouteilles, dont il a confié le design à la firme Bleublancrouge.

Associant mysticisme et pomme tentatrice, la directrice de création Marie-Hélène Trottier et le designer graphique Jos Lapalme ont apprêté le thème du jardin d'Éden à la sauce Art nouveau.

L'étiquette écrue est haute et étroite, bordée d'un filet noir. En silhouette, une pomme noire est cerclée d'un liséré qui éclate en volutes. «Nous voulions mettre l'accent sur la particularité naturelle tout en démontrant le côté ludique et pétillant du produit, explique Joe Lapalme. Les fioritures étaient donc toutes indiquées et communiquaient à merveille le thème.»

L'acidité et la fraîcheur de la pomme sont rendues par une lettrine vert lime, sur la staniole noire qui coiffe la bouteille.

La boîte-panier noire est le négatif de la bouteille. L'étroit rectangle aux coins arrondis de l'étiquette est repris dans le contrefort de sa poignée. «On voulait montrer et mettre en valeur le liquide, explique le designer. La solution a été d'ouvrir l'emballage et d'y mettre un fond métallique doré en arrière pour mieux faire ressortir la couleur du produit.»

De ce côté, le résultat est discutable. Sur cet arrière-plan, la belle couleur paille du cidre prend une teinte miellée, qui le rapproche de ces bières dont on voulait justement se distinguer.

Et la capsule standard non dévissable? Avec l'équipement dont il disposait, Robert Demoy a préféré opter pour la sécurité d'une capsule solidement agrippée.

Le prix à la bouteille est le même avec quatre bouteilles à 9,99$ qu'avec six bouteilles à 14,99, soutient-il, tout en convenant que chacune contient moins. «Pour nous, c'est moins profitable qu'avant, mais on est arrivés à un compromis intéressant sur le plan de la qualité.»

Comme toujours, ce sont les clients qui auront le dernier mot dans le débat.

Une question à vider verre en main.