Claude gère lui-même ses placements et il se débrouille très bien. «Très très bien», même, a constaté notre planificateur invité.

Claude a 48 ans. Il y a quatre ans, il a vendu son entreprise et a investi le fruit de cette vente dans un portefeuille de placements, concentré en actions et revenus de dividendes.

«Il réussit à se verser en moyenne 35 000$ par an tout en maintenant la croissance de son portefeuille non enregistré, qui vaut actuellement environ 298 000$», observe Mathieu Gallant, planificateur financier pour BMO Groupe financier. Claude réalise un rendement moyen de plus de 12% en dépit des soubresauts du marché boursier.

Mais pour atteindre ce résultat, il consacre une dizaine d'heures par jour à la surveillance de ses placements. Il voudrait ralentir ce rythme. «J'aimerais faire un petit voyage de temps en temps, faire de l'ébénisterie, dit-il. Je n'ai le temps de rien faire.»

Il a conscience qu'un gestionnaire n'obtiendrait pas les rendements qu'il réussit à atteindre, «mais ça ne me dérangerait pas d'avoir une diminution de salaire», ajoute-t-il.

Ralentir

Jusqu'où ralentir? Lors de ses discussions avec notre planificateur Mathieu Gallant, Claude a fixé un revenu minimal de 25 000 dollars par année.

Sa conjointe Lise, âgée de 51 ans, touche de son côté un revenu d'environ 70 000$. Elle prévoit prendre sa retraite à 65 ans. Elle touchera une rente de retraite égale à 52% de son salaire, soit quelque 36 400$. Claude et Lise aimeraient maintenir alors un revenu net de 50 000$.

Outre leur maison de 130 000$, les deux conjoints détiennent une plantation de pins de 30 hectares, évaluée à environ 240 000$. Dans une quinzaine d'années, 15% des 15 000 pins pourraient être vendus pour la fabrication de poteaux d'électricité. La valeur marchande est présentement de 100 dollars par poteau, ce qui représente un potentiel de 225 000$, en dollars actuels.

L'ennui, c'est qu'il est difficile de délaisser une stratégie qui procure un rendement de plus de 12% par année. Il est inutile de couper la poire en deux: si Claude cède la moitié de ses actifs à un gestionnaire, l'autre moitié lui demandera autant d'attention qu'auparavant.

Avec un rendement plus... courant, est-ce que les 298 000 dollars en placements et les 55 000$ de REER que Claude détient peuvent lui procurer un revenu de 25 000$? Mathieu Gallant a poussé la machine à projections, en appliquant le rendement historique moyen de 7,8% des actions canadiennes. Il tient compte d'un ajustement au coût de la vie de 2% par année. Dans ces conditions, les actifs de Claude seraient épuisés à 73 ans.

Il faut appeler à contribution la pinède du couple. La vente du terrain, au cours de la prochaine année, procurerait un capital supplémentaire de 180 000$, une fois l'impôt prélevé. Avec cet ajout, cette fois, tout va bien. Claude peut atteindre son objectif de 25 000$ par année, et le couple, celui d'un revenu de retraite net de 50 000$ jusqu'à 90 ans.

Mais le pari d'un rendement de 7,8% demeure audacieux... en d'autres mains que celles de Claude! Notre planificateur a fait une seconde projection avec le rendement plus courant et moins préoccupant de 6%. Encore une fois, Claude et Lise atteignent 90 ans en respectant leurs objectifs.

Claude pourrait reporter d'une quinzaine d'années la vente de sa terre, au moment où il atteindra 65 ans, par exemple. En plus de la valeur du fonds de terre, il encaisserait ainsi la récolte de pins à maturité. Mais «il y a beaucoup d'impondérables - les coûts, la demande dans 15 ans pour ce type de produit, réplique Mathieu Gallant. Peut être qu'il y aura des nouvelles technologies de remplacement et même que dame Nature décidera de reproduire la crise du verglas.»

Bref, le planificateur suggère d'appliquer la vieille maxime «Un tiens vaut mieux que deux tu l'auras.»

De toutes manières, Claude pourra ralentir le rythme quand bon lui semblera. «Le but est de lui donner des balises», indique notre conseiller.

À Claude de jouer.

LES DONNÉES

Claude consacre plus de 50 heures par semaine à gérer ses placements, dont le rendement de 12% lui procure son - seul - revenu de 35 000$. Il aimerait avoir plus de temps libres et se dit prêt à «prendre sa retraite», s'il peut toucher 25 000$ par année.

LES PARAMÈTRES

Claude, 39 ans

Placements non enregistrés: 298 000$

Revenus de placements autogérés: 35 000$ par année

REER: 55 000$

CELI: 6300$

Lise, 51 ans

Revenu: 70 000$

Rente de retraite à 65 ans: 36 400$

REER: 92 000 $

CELI: 3500 $

AUTRES ACTIFS

Résidence principale: 130 000$, libre d'hypothèque

Pinède de 30 hectares: 240 000$

Avec la vente de la pinède, un rendement de 6% permet d'atteindre les objectifs d'un revenu de 25 000$ pour Claude et d'un revenu net de retraite de 50 000$ pour le couple.

«Claude peut prendre sa retraite maintenant, considérant que l'analyse a été faite avec sa conjointe.»