Notre jeunesse devrait être pleine d’espoirs, d’idéaux et de joie de vivre, mais force est de constater que la réalité est plus sombre. Les 16 à 40 ans sont anxieux, pour des raisons tant d’ordre financier que d’ordre climatique.

Le coût des loyers, la hausse des taux d’intérêt, le prix des maisons, l’inflation alimentaire et les changements climatiques pèsent lourd sur le moral de bien du monde. Il aurait été étonnant que les jeunes échappent au sentiment général, mais il s’avère que leur pessimisme est assez prononcé.

Léger a pris le pouls l’été dernier de 3015 représentants des générations Y et Z d’un bout à l’autre du pays pour brosser le portrait de leur état d’esprit. On ne peut pas dire qu’ils soient insouciants ou qu’ils regardent l’avenir avec des lunettes roses. Oh non !

Imaginez, en seulement sept mois, la proportion de jeunes Z (16 à 27 ans) stressés par les conséquences des changements climatiques a bondi de 7 points pour atteindre 63 %.

Les chiffres sont à peu près les mêmes du côté des Y (28 à 40 ans). Ils sont aussi plus nombreux que l’an dernier (+ 8 points) à croire que la situation environnementale se détériorera à court terme. Le dernier sondage Léger sur la jeunesse avait été réalisé en novembre 2022.

Il n’y a pas que le climat qui change rapidement…

En matière de finances personnelles, l’impact de l’inflation sur les jeunes est indéniable, même chez les Z qui ont la réputation de se la couler douce en habitant chez leurs parents. Qu’il s’agisse d’épargne, de repas au restaurant ou du paiement des factures, toutes les habitudes ont changé de façon prononcée. Encore une fois, les réponses données par les Y, qu’on appelle aussi les milléniaux, ne sont pas très différentes.

Ce n’est pas la question de l’immobilier qui va apaiser l’anxiété des jeunes. À Montréal, le ménage moyen doit consacrer 54 % de ses revenus à son hypothèque, a calculé la RBC récemment. Autrement dit, le ménage moyen n’a pas les moyens d’acheter. Comme il fallait s’y attendre, 61 % des propriétaires des générations Y et Z estiment que leur hypothèque est trop élevée par rapport à leur salaire. Et du côté des locataires, près de trois sur quatre considèrent que leur loyer occupe une place trop importante dans leurs dépenses.

L’étude nous apprend aussi que 81 % des jeunes locataires ne le sont pas par choix, mais parce qu’ils sont incapables d’acheter une propriété. Cela est tout à fait normal quand on a 20 ou 25 ans, mais c’est plus démoralisant pour un couple de 38 ans qui attend son deuxième enfant.

Ce n’est pas pour rien que 23 % des courtiers immobiliers constatent une certaine augmentation du nombre de personnes qui deviennent propriétaires avec des membres de leur famille.

« Les gens font preuve de créativité pour avoir accès à la propriété étant donné que les prix sont élevés », m’a raconté Stéfanie Cadou, courtière immobilière de Royal LePage Village à Montréal.

Elle m’a donné l’exemple d’une femme qui avait fait construire une aile à sa maison pour accueillir son fils et la conjointe de ce dernier. « Elle leur fait payer un petit loyer, symbolique, pour qu’ils aient leur chez-eux, leur intimité. Ça leur sert de tremplin pour accumuler une mise de fonds pour un achat. Lorsque ces jeunes auront leur propre résidence, la mère aura un loyer locatif qui contribuera à sa retraite. »

Stéfanie Cadou a aussi vu un père divorcé qui avait la garde de sa fille acheter un duplex avec sa mère en fusionnant leurs économies. Mais elle n’a pas encore vendu de maison à des amis, comme cela se voit en Ontario et en Colombie-Britannique vu les prix astronomiques.

Avec l’inflation et le coût de l’habitation, on pourrait croire que la situation financière des jeunes est catastrophique, mais ils ne voient pas les choses ainsi. Seulement 20 % des Québécois jugent qu’elle est en mauvais état, ce qui se compare à 32 % dans le reste du Canada. On ne connaît pas l’explication derrière cet écart important. L’évaluation est subjective et laissée au jugement du répondant. La façon de calculer, de voir les choses, de réagir est-elle différente selon la province dans laquelle on vit ? Il faudrait approfondir cette question pour en avoir le cœur net.

Cela me semble toutefois très jovialiste dans le contexte où 54 % des 27 à 40 ans vivent… de paie en paie.

La santé mentale des jeunes est tout aussi inquiétante.

Pas moins de 78 % des jeunes ont traversé des périodes d’anxiété (dont 57 % dans la dernière année) et tout près de la moitié (48 %) ont vécu « une dépression importante ou des moments de dépression ». Le sondage ne compare pas ces résultats avec ceux d’autres tranches d’âge, mais ce n’est certainement pas pour rien qu’on lit que l’anxiété est le mal du siècle.

La santé mentale n’est pas qu’un enjeu pour le système de santé et les assureurs, mais aussi pour les employeurs qui doivent s’y adapter. Cela peut se faire de façon plus originale que l’implantation d’un programme d’aide aux employés (PAE). « Les jeunes sont anxieux. Leur offrir des possibilités d’avancement au sein de l’entreprise va les rassurer », donne en exemple Gabrielle Blais, une directrice de la recherche de Léger qui fait elle-même partie du groupe sondé.

« Comprendre les Y et les Z, c’est comprendre notre avenir », selon le cofondateur et PDG de Léger, Jean-Marc Léger. Sachant que 66 % se déclarent heureux, êtes-vous rassuré ?