Maggy-Nadyne Lamarche est une battante. Devenue entrepreneure par nécessité, lorsqu’elle cherchait désespérément à soulager sa fille de 18 mois aux prises avec de violents troubles gastriques, elle a conçu un ourson thérapeutique et fondé l’entreprise Béké-Bobo en 2000, entreprise qu’elle a fait progresser jusqu’en mai 2022 lorsqu’un terrible accident de vélo a fait basculer sa vie et est venu menacer son entreprise qu’elle a entrepris de relancer.

« Mon entreprise est née de la nécessité médicale d’aider ma fille. Là je veux revenir comme avant et relancer mon entreprise qui est devenue ma nécessité médicale à moi », m’explique Maggy-Nadyne Lamarche.

Je rencontre l’entrepreneure dans son atelier de Saint-Amable, en Montérégie, où sont fabriqués les oursons thérapeutiques Béké-Bobo et où elle est revenue pour la première fois la semaine dernière depuis son accident de vélo.

Ingénieure spécialisée en génie de la construction lourde, Maggy-Nadyne Lamarche a dû hospitaliser sa fille en 1999 à la suite d’une inflammation grave de ses intestins, d’une opération à l’œsophage et de l’ablation d’une grosse partie de son estomac.

Incapable de soulager les maux de ventre persistants de son bébé, l’ingénieure a multiplié les recherches – avant l’internet – pour trouver un moyen d’atténuer ses douleurs. Elle est allée du côté de la médecine chinoise, elle a testé la technique française des bouillottes avec des graines de cerises avant de mettre au point sa propre bouillotte fabriquée à partir de graines de céréales biologiques.

« Ç’a été instantané. J’étais avec le gastroentérologue à Sainte-Justine et ma fille a été soulagée et a fait son premier sourire. Tout de suite le médecin a testé ma bouillotte avec d’autres patients. J’ai eu 50 commandes en deux jours », relate Maggy-Nadyne Lamarche.

Ainsi est née Béké-Bobo. Aujourd’hui, le produit est reconnu comme un instrument médical par Santé Canada et par les autorités européennes de la santé, est vendu dans six pays européens et est massivement adopté par les familles québécoises alors qu’un enfant sur trois possède un ourson thérapeutique Béké-Bobo.

Mais ce beau parcours, né dans l’adversité, a pris un tournant dramatique en mai 2022 lorsque Maggy-Nadyne Lamarche a fait une chute fracassante alors qu’elle roulait à vélo en peloton à 32 kilomètres à l’heure.

Victime d’un traumatisme crânien sévère avec épanchement de sang au cerveau, l’entrepreneure a subi de multiples fractures au bassin, a dû se faire reconstruire la clavicule et l’épaule droite, se faire changer la hanche droite et s’est fait endommager sérieusement les deux genoux.

« J’ai eu et j’ai encore des problèmes de vision, je ne reconnais plus les visages, et j’ai encore des étourdissements. Je suis restée huit mois à l’hôpital et je n’ai recommencé à me déplacer avec une marchette que le 16 juin dernier », raconte Mme Lamarche.

L’anxiété prend le dessus

Après la contrainte des huit mois d’hospitalisation, Maggy-Nadyne Lamarche poursuit toujours depuis le mois de janvier sa réadaptation et visite chaque semaine ergothérapeutes, physiothérapeutes, kinésiologues, psychologues et neurologues, mais a décidé de reprendre en main la destinée de son entreprise qui a souffert de son éclipse médicale.

« À l’hôpital, j’ai commencé à faire de l’anxiété, ce que je n’avais jamais connu avant. Qu’est-ce qui allait se passer avec mes employés ? Je n’avais pas noté les codes de mes dossiers informatiques, je ne pouvais plus faire les payes. Je suis tombée en dépression. »

« Mais ma fille est venue me donner un coup de main et heureusement, trois semaines avant mon accident on avait complété l’automatisation de nos procédés. Toutes les commandes étaient programmées par le système, on a pu continuer la production », explique l’entrepreneure.

Incapable de lire ses courriels, c’est son ergothérapeute qui lui faisait la lecture de sa correspondance, Maggy-Nadyne est tombée sur une courte vidéo qui présentait le programme Persévérance qui s’adresse aux entrepreneurs en difficulté, elle a décidé de s’y inscrire.

« Je me suis présentée là sur une chaise roulante inclinée vers l’arrière, avec ma tête qui était retenue, pour livrer mon témoignage. Ç’a été ma première bouée de sauvetage. C’est là que j’ai décidé de reprendre mon entreprise en main. Je leur ai parlé librement de ma dépression, que je ne retrouverais jamais ma vie d’avant », confie l’ingénieure et grande sportive.

Au cours de la dernière année, Béké-Bobo a souffert d’une baisse de 40 % de son chiffre d’affaires, notamment en raison de la réduction de 50 % de ses ventes à l’exportation qui représentaient 40 % de ses revenus annuels.

« C’est moi qui faisais le développement à l’international et tout le marketing. Je participais aux foires de la maternité, des jouets, de la puériculture. Ici aussi, j’avais des kiosques au Festival western de Saint-Tite où des centaines de milliers de visiteurs voyaient nos produits. Cela a créé un vide », déplore la fondatrice de Béké-Bobo.

Durant son séjour à l’hôpital, elle a entrepris de créer un nouveau design de ses oursons thérapeutiques, une nouvelle collection qui va prendre d’assaut le marché pour la période des Fêtes.

« Je prévois aussi viser davantage le marché corporatif. La Ville de Montréal a adopté notre ourson pour sa trousse aux parents. La Fondation de l’hôpital du Haut-Richelieu aussi. On va s’adapter », anticipe l’entrepreneure.

Si Béké-Bobo a permis au départ de faciliter la vie de sa petite fille de 18 mois en la soulageant de ses maux intestinaux pour aider par la suite des centaines de milliers de parents à soulager les coliques de leurs bébés, l’entreprise est visiblement en train de redonner le goût à la vie à sa fondatrice.