Le palmarès annuel des plus importants détaillants de la planète n’est pas qu’une simple liste de noms avec des chiffres. C’est surtout un fascinant révélateur des habitudes de consommation des Terriens.

Vous connaissez Bernard Arnault ? C’est l’homme le plus riche du monde. Sa fortune dépasse celle d’Elon Musk et de Jeff Bezos, selon Forbes et Bloomberg. Elle tourne autour de 200 milliards US, en incluant celle de sa famille.

M. Arnault n’a rien inventé de révolutionnaire, contrairement à ceux qui lui collent aux fesses dans le palmarès des riches et célèbres. Il est à la tête de LVMH. Ce groupe français possède les marques Louis Vuitton, Christian Dior, Moët & Chandon, Veuve Clicquot et Guerlain, entre autres. Aucune n’est récente, mais elles continuent de croître à une vitesse folle.

De fait, la demande pour les biens de luxe a explosé après la première année de pandémie, marquée par les fermetures des magasins un peu partout dans le monde.

C’est l’un des constats du Global Powers of Retailing 2023, cette compilation du cabinet comptable Deloitte qui fait la liste des 250 plus grands détaillants du monde, selon les ventes.

On y apprend qu’en Europe, les quatre détaillants ayant connu la plus forte croissance naviguent tous dans l’univers du grand luxe.

La première place est occupée par LVMH. Ses recettes ont augmenté de 51 % par rapport à l’année précédente, pour atteindre 56 milliards de dollars américains. Cette forte performance s’explique en partie par l’acquisition des bijouteries Tiffany & Co et par la demande dans les marchés asiatiques et aux États-Unis.

La Compagnie Financière Richemont, propriétaire de marques comme Cartier et Montblanc, arrive en deuxième position, avec une croissance de 46 % de son chiffre d’affaires. Le groupe Kering, derrière lequel se cachent Gucci, Saint Laurent et Balenciaga, a vu ses ventes bondir de 40 %. Hermès et ses célèbres carrés de soie n’affichent qu’une « petite » hausse de 22 %.

En comparaison, la croissance moyenne des ventes du top 250 est de 8,5 %.

Il n’y a pas seulement dans le jeu Monopoly que les riches deviennent toujours plus riches. La performance de ces entreprises qui vendent des sacs à main à 13 700 $ et des chaussures à 2800 $ en est la démonstration patente.

Le commerce électronique connaît aussi une ascension fulgurante.

L’an dernier, je vous ai raconté que le site chinois JD.com venait de faire son entrée parmi les 10 plus grands détaillants du monde. L’entreprise a gagné deux autres rangs d’un coup, grâce à une hausse des ventes de 25 %, ce qui se voit rarement au sommet de la pyramide.

L’ascension au 7e rang mondial s’est faite à la vitesse de l’éclair : JD.com avait fait son entrée dans le palmarès de Deloitte en 2014. Cela en dit long sur le potentiel du marché chinois, le seul où JD.com vend sa gamme de produits qui va du maquillage aux vêtements en passant par l’épicerie fine et les meubles. Amazon, au 2e rang, vend dans 21 pays. Les deux détaillants virtuels ont bien sûr bénéficié de l’engouement pour les achats en ligne « pendant et après la pandémie », note Deloitte.

Mais parmi les géants des géants, c’est Costco, avec ses vastes magasins, qui a connu l’année la plus exceptionnelle. Ses ventes ont bondi de 17,5 %. C’est mieux qu’Amazon (+ 12 %), The Home Depot (+ 14 %) et Walmart (+ 2 %). Il faut dire que l’empire fondé par Sam Walton a vendu ses supermarchés britanniques Asda et la chaîne de magasins Seiyu, du Japon. Ces transactions ont fait chuter les ventes issues des activités internationales. Ce qui n’a pas empêché Walmart de demeurer au premier rang du classement, remarquez.

Et le Canada, dans tout ça ? Huit de ses grandes chaînes de magasins se trouvent dans le classement, dont cinq dans le secteur de l’alimentation ou de l’alcool.

La popularité de Lululemon lui a permis de faire un bond impressionnant de 43 rangs. Le détaillant de Colombie-Britannique a vendu pour 6 milliards américains de vêtements de yoga à son dernier exercice. C’est un peu plus élevé que les ventes de la LCBO, l’équivalent ontarien de notre SAQ.

Alimentation Couche-Tard peut aussi se vanter d’avoir gagné 15 rangs d’un coup, ce qui la place tout près de Gap et Décathlon. Son cas est particulier, cependant, car une proportion importante de ses revenus provient de l’essence. Or, Deloitte ne considère pas cette activité comme de la vente au détail. Ainsi, l’entreprise québécoise se retrouve au 73e rang, avec un chiffre d’affaires de 16 milliards. Au total, toutefois, Couche-Tard réalise des ventes de 62 milliards US, indique le classement du cabinet comptable. C’est plus que le groupe français LVMH.

Un seul autre nom d’entreprise québécoise – Metro au 85e rang – est présent dans le classement.

Il y a 10 ans, le Canada comptait 10 entreprises dans le top 250. Parmi elles, quatre n’y sont plus : La Compagnie de la Baie d’Hudson, Rona, Shoppers Drug Mart/Pharmaprix et Katz, une chaîne de pharmacies. Et deux nouveaux noms sont entrés dans le classement, soit Lululemon et Save-on-Food, qui a beaucoup dégringolé cette année.

La place du Canada sera-t-elle différente dans le prochain palmarès ? La réponse en février 2024.