Le nom Maxi a toujours été synonyme de vastes supermarchés aux allées larges, mais cela devra changer. Car aux quatre coins du Québec, de petits Provigo sont en voie d’adopter le bleu et le jaune de l’enseigne à bas prix.

L’entreprise ontarienne Loblaw, qui est propriétaire des deux enseignes, m’a confirmé que 16 magasins Provigo seraient bientôt transformés en Maxi.

Ceux-ci se trouvent à Baie-Comeau, Gatineau, Chicoutimi, Saint-Raymond-de-Portneuf, Charlesbourg et Saint-Lambert, notamment. La liste complète n’a pu être obtenue, car certains magasins n’ont appris la nouvelle « que très récemment », m’a indiqué la porte-parole Johanne Héroux.

D’autres adresses pourraient changer de logo. « On fait une revue de notre réseau pour l’optimiser, dit Johanne Héroux. L’analyse n’est pas terminée. » De gros magasins Provigo pourraient devenir des Maxi et Cie, une enseigne connue pour son offre étendue de marchandise générale.

À l’heure actuelle, on dénombre 70 Provigo au Québec. À la fin de 2023, il devrait y avoir au moins 146 Maxi.

La nouvelle stratégie d’affaires du détaillant n’a fait l’objet d’aucune annonce globale.

Ainsi, les 11 conversions déjà réalisées au cours des derniers mois sont passées sous le radar. Les nouveaux magasins Maxi se trouvent à Vaudreuil, Trois-Rivières, Saint-Hyacinthe, Marieville, Port-Cartier, Laval (boulevard René-Laennec) et Montréal (rue Jean-Talon), par exemple.

Partout, la réponse des consommateurs serait « excellente », selon l’épicier, une information confirmée par une source syndicale qui se réjouit des embauches provoquées par le changement d’enseigne.

Pour les consommateurs, le nouveau concept qu’on qualifie d’épuré et de moderne propose sensiblement le même nombre de produits, soit 20 000. C’est un beau casse-tête, car des Maxi 3.0 – c’est le nom qu’on leur donne à l’interne – sont trois fois ou quatre fois plus petits que le modèle traditionnel de 80 000 pi⁠2. Les prix sont identiques dans tout le réseau.

Ce modèle pourra aussi être vu dans le quartier Centre-Sud, de Montréal, à l’angle de l’avenue Papineau et de la rue Sainte-Catherine. Il s’agira d’une nouvelle construction de 18 000 pi⁠2 dont l’inauguration est prévue pour 2024.

Certaines transformations à venir, comme celle de Saint-Lambert, en banlieue sud de Montréal, ont de quoi surprendre. D’abord parce que l’épicerie est particulièrement étroite. Mais aussi parce qu’un gros Maxi se trouve à seulement 1,4 km de là et que la clientèle du quartier est aisée.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

L’épicerie Provigo de Saint-Lambert, sur la Rive-Sud de Montréal, sera prochainement transformée en Maxi.

Mais comme le fait remarquer Johanne Héroux, avec l’inflation alimentaire qui a atteint 11 % ces derniers mois, même les nantis cherchent à réduire leur facture d’épicerie.

Un rapport publié par la firme DBRS Morningstar, plus tôt cette semaine, prédisait d’ailleurs que les enseignes d’épiceries à bas prix comme Maxi et Super C devraient en 2023 enregistrer un volume de ventes supérieur à celui des supermarchés traditionnels (Provigo, IGA et Metro).

Malgré la conjoncture et les prédictions, le professeur et expert en marketing alimentaire à l’Université Concordia, Jordan LeBel, se demande si la stratégie de conversion de Loblaw n’est pas précipitée.

« Dans trois ou quatre ans, si la situation économique s’est replacée, va-t-on le regretter ? Est-ce une décision trop rapide ? » À son avis, il ne serait pas étonnant que dans quelques années, le nom Provigo ait totalement disparu du paysage, ce qui simplifierait les affaires de Loblaw au Québec.

L’enseigne Loblaws, qui n’a jamais connu le succès espéré, avait été rayée de la carte en 2016.

Il est difficile ne de pas voir dans ces conversions un échec de la précédente stratégie de Loblaw pour propulser son enseigne Provigo.

Il y a deux ans, en décembre 2020, La Presse avait annoncé que les 22 Provigo étaient à vendre pour la modique somme de 50 000 $. Le but était de leur trouver un nouveau propriétaire puisque l’arrivée d’un franchisé procure « un meilleur rendement », m’avait-on fait valoir.

Ces 22 épiceries étaient les seules de la chaîne, sur 84 à l’époque, à être encore gérées par le siège social. Loblaw se donnait 24 mois pour vendre ses Provigo.

Loblaw évoquait alors un « retour aux sources » pour cette enseigne québécoise créée en 1969 pour être une enseigne « de proximité ».

Aujourd’hui, Johanne Héroux affirme que Provigo devient « une enseigne de niche qui mise sur le haut de gamme, surtout dans le prêt-à-manger ». Et elle jure que les conversions ne sont pas « un désaveu du modèle » de Provigo.

Loblaw signait avec ses nouveaux franchisés des ententes de 10 ans. Puisque tous les Maxi sont exploités par le siège social, Loblaw a mis fin à des contrats conclus avec ses franchisés. Ceux-ci se voient offrir le rôle de directeur des lieux.

Je ne sais pas si cette stratégie s’avérera « capotante », pour reprendre l’expression de Martin Matte dans les publicités de Maxi, mais elle est assurément intrigante.

Consultez le texte « 22 Provigo à vendre pour 50 000 $ chacun »