Avec une inflation alimentaire qui atteint un sommet inégalé, il ne faut pas se surprendre de la médiatisation d’un nombre grandissant de vols à l’épicerie. Attendez-vous aussi à voir davantage de caméras, d’agents de sécurité et peut-être même de dispositifs antivols directement apposés sur les produits alimentaires.

Le vol à l’étalage dans les épiceries a toujours existé, mais avec l’inflation alimentaire que nous connaissons, les commerçants craignent davantage les malfaiteurs. En décembre, des Ontariens ont visité des magasins en Mauricie pour voler des pièces de viande d’une valeur totale de 4000 $. À Sherbrooke, un homme a été arrêté à la suite d’un vol à l’étalage survenu quelques jours avant Noël et les policiers recherchent toujours deux autres personnes en lien avec ce méfait. Ils avaient volé pour plus de 2000 $ de produits alimentaires.

Ces voleurs, possiblement des amateurs, pris sur le fait, n’en étaient pas à leur premier larcin. Mais le volume et les sommes nous indiquent que ces malfaiteurs visaient un marché de revente, un marché noir, probablement pour la restauration clandestine.

Bien sûr, ces cas ont connu une couverture médiatique, mais la plupart des vols et des évènements sont traités directement par les gestionnaires des établissements.

La majorité de ces infractions se produisent en magasin pour quelques produits seulement… des vols à l’étalage faits par des personnes poussées par le désespoir, la négligence ou un mélange des deux. Mais les évènements plus gênants, plus dommageables financièrement, résultent des vols commis par les employés à l’interne. Peu de ces cas font la manchette, pourtant les quantités et la valeur sont généralement très importantes. On en parle peu et on considère le sujet comme un peu tabou dans le secteur.

Pour cette raison, il demeure très difficile d’obtenir des données sur le vol dans le domaine alimentaire. Toutefois, avec un taux d’inflation alimentaire qui dépasse le taux général de l’inflation depuis un an, le secteur de l’alimentation réalise que le problème du vol à l’étalage s’aggrave énormément.

Selon certaines données, un magasin de détail alimentaire de taille moyenne au Canada peut se faire voler entre 2000 $ et 5000 $ de produits par semaine.

Avec des marges bénéficiaires minces, cette somme prend de grandes proportions. En principe, nous payons tous pour ces vols.

Certains magasins prennent les grands moyens. Il y a certes des agents de sécurité à l’entrée, mais il y a aussi de plus en plus de surveillants incognito, habillés en civil, qui patrouillent dans les allées toute la journée en faisant semblant de faire leurs emplettes. Cette tactique discrète fonctionne à merveille.

Ailleurs dans le monde, certaines méthodes passent moins inaperçues. Des magasins aux États-Unis, en Europe et ailleurs ont apposé des dispositifs antivols directement sur l’emballage de certains produits, principalement sur des pièces de viande, des fromages et des confiseries. Aux dernières nouvelles, aucun marchand n’avait encore utilisé ce système au Canada. Mais ne soyez pas surpris de les voir apparaître éventuellement. Il faut d’ailleurs s’attendre à voir davantage de caméras, plus de surveillants et une sécurité accrue. Les marchands ne peuvent faire autrement.

Les caisses en libre-service représentent le prochain défi des épiciers, car elles se révèlent plus populaires que jamais. Dans un récent sondage mené par notre Laboratoire de sciences analytiques en agroalimentaire, 65 % des consommateurs préfèrent maintenant utiliser une caisse libre-service avec une commande de moins de 20 articles.

Mais la surveillance au point de service revêt une importance capitale pour les commerçants. La technologie n’est pas encore au point pour freiner le vol. En limitant le travail et la manutention requis par le consommateur à la sortie, les risques diminueront.

Un chariot intelligent qui comptabilise le contenu automatiquement, comme le Smart Cart, ou cette boîte noire géante dans laquelle nous plaçons tous nos produits à la caisse pour que la facture se calcule en quelques secondes. Génial, mais au Canada, nous ne sommes toujours pas rendus là.

À Memphis, en 1916, le premier supermarché au monde, Piggly Wiggly, ouvrait ses portes avec un concept révolutionnaire pour l’époque : les clients avaient le droit de circuler dans les allées par eux-mêmes. Comme aujourd’hui, un client recevait un panier et choisissait parmi les différents articles qu’il voulait. C’était il y a 107 ans, et à l’époque, la principale crainte était le vol.

Plus ça change…