L’École des sciences de la gestion de l’UQAM célèbre cette année de façon officielle ses 30 ans d’existence. Cette jeune institution qui se développe depuis sa fondation dans l’ombre des grandes écoles comme HEC et McGill n’arrive pas à faire reconnaître à sa pleine mesure sa contribution à la collectivité québécoise en général et à la communauté des affaires en particulier.

Cela fait 30 ans que l’ESG existe sous sa forme actuelle, mais dès la fondation de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), il y a plus de 50 ans, l’institution a commencé à diplômer des finissants en administration, avec pour résultat que l’ESG revendique aujourd’hui plus de 100 000 diplômés issus de ses programmes, soit le plus grand nombre cumulatif de diplômés de toutes les écoles de gestion au Québec.

Et ce, même si HEC a été fondée en 1907 et cumule une riche histoire beaucoup plus longue et étoffée, tout comme la faculté de gestion de l’Université McGill, qui existe quant à elle depuis 1906.

C’est le doyen de l’ESG, Komlan Sedzro, qui me révèle cette statistique étonnante pour illustrer la méconnaissance que l’on peut avoir de l’ampleur du rayonnement de l’institution du campus de l’UQAM sur la vie montréalaise et québécoise.

On a un impact sur la vie économique et sociale à Montréal et au Québec. On forme 20 % de tous les diplômés en science de la gestion au Québec. Ces gens occupent des fonctions importantes et sont des éléments qui contribuent activement à leur collectivité.

Komlan Sedzro, doyen de l'École des sciences de la gestion de l’UQAM

D’autant que selon les statistiques, que me communique Komlan Sedzro, 90 % des diplômés de l’ESG vont rester au Québec après leurs études pour y poursuivre leur carrière, contrairement à d’autres écoles de gestion où de nombreux étudiants partent, une fois leur diplôme obtenu, pour aller travailler à l’extérieur du pays.

Komlan Sedzro arrive au terme d’un premier mandat de cinq ans à titre de doyen de la faculté et il voulait profiter du 30e anniversaire de l’ESG pour faire le point sur le chemin parcouru et jeter un peu d’éclairage sur cette école qui ne partage pas la renommée de HEC ou de McGill.

Un mot sur le parcours de Komlan Sedzro. D’origine togolaise, M. Sedzro a fait des études en économie à l’Université de Clermont-1, en France, pour venir par la suite faire un doctorat en finance et assurance à l’Université Laval en 1992.

Après avoir enseigné à Laval, puis à l’Université du Québec en Outaouais, Komlan Sedzro s’est joint à l’UQAM en 1997 comme professeur de finance mathématique.

Il a mis sur pied le diplôme d’études supérieures spécialisées en instruments financiers dérivés, en collaboration avec la Bourse des produits dérivés de Montréal. « Il ne fallait pas juste développer des produits pour le 1 %, mais développer un écosystème où Montréal jouerait un rôle important », précise le doyen.

Sortir du cadre

Depuis qu’il est en poste comme doyen de l’ESG, Komlan Sedzro se rend compte à quel point il est urgent que l’institution prenne une place qui corresponde pleinement à l’impact que l’École a dans la communauté.

« On reste une jeune institution, mais l’ESG s’est toujours démarquée parce qu’elle cherche à développer des esprits qui sortent des sentiers battus. On ne forme pas des robots et on ne veut pas former des gens qui sortiront de l’école avec un bagage “passé date”. On veut apprendre à nos étudiants à apprendre.

« On a été les premiers à mettre dans nos programmes l’innovation sociale, le développement durable, la responsabilité sociale des entreprises. C’est maintenant devenu la norme. On a plus 300 professeurs et 450 chargés de cours hyper compétents qui sont sollicités continuellement par les médias pour qu’ils partagent leur expertise », expose le doyen.

Malheureusement, cette notoriété grandissante ne permet pas encore de générer les retombées financières correspondantes qui profitent aux grandes écoles d’administration qui réussissent, bon an, mal an, à drainer des dizaines de millions en dons.

Pourtant l’ESG a contribué et contribue toujours de façon active à façonner le Québec inc. que l’on connaît aujourd’hui. Laurent Ferreira, nouveau PDG de la Banque Nationale, Alexandre L’Heureux, PDG de WSP, et le ministre des Finances Eric Girard, notamment, sont tous des diplômés de l’ESG.

« On doit mieux montrer ce que l’on fait de bien, et c’est pourquoi on organise la semaine prochaine [le 26 octobre] l’évènement Décadra au Palais des congrès, un happening qui va remplacer notre ancien Gala annuel et qui se déroulera durant l’après-midi et la soirée.

« On va avoir des présentations sous différents thèmes tels que la responsabilité sociale, le tourisme durable, la gouvernance ESG avec des spécialistes, et le soir, ce sera le gala. On veut sortir du cadre, c’est un évènement pour la communauté de l’École et pour nos diplômés », expose Komlan Sedzro.

On a l’impression que l’ESG arrive difficilement à susciter l’intérêt des grands donateurs privés parce que l’institution est affiliée à l’UQAM, une université publique financée par des fonds publics. Est-ce bien le cas ?

Le doyen Sedzro acquiesce avec un peu de dépit. « Oui, c’est vrai, mais les gens oublient que les écoles de HEC, McGill ou Laval sont elles aussi financées par des fonds publics. Il faut mieux montrer nos bons coups », tranche-t-il.