Il existe un régime de retraite qui offre une rente déterminée et « sûre la vie durant », une « protection contre l’inflation », une « prestation de survivant » et la possibilité de quitter le marché du travail dès 50 ans. Tout ça, tenez-vous bien, « sans risque pour l’employeur » ni fardeau administratif. Vous n’étiez pas au courant ?

En plus, ce régime est accessible aux entreprises de toutes tailles et de tous les secteurs (privé, parapublic et public). À l’heure actuelle, il en regroupe plus de 200, ce qui représente 75 000 employés et retraités d’un bout à l’autre du pays. Ceux-ci ont accès à une foule d’informations bien vulgarisées sur un site web convivial et bilingue.

L’actif atteint 17,5 milliards. Le fonds est capitalisé à 119 %.

Si vous avez reconnu le régime DBplus, créé et administré par les CAAT, vous méritez trois morceaux de robot.

D’abord conçu pour les employés du système collégial de l’Ontario, il y a 54 ans, le Régime interentreprises des CAAT est désormais ouvert à tous. Ou presque. Car au Québec, ce type de régime de retraite appelé « conjoint » (Jointly Sponsored Pension Plans en anglais) n’est pas autorisé par Retraite Québec.

Des Québécois qui travaillent pour des entreprises établies ailleurs au pays peuvent tout de même y cotiser grâce aux exceptions qui ont été accordées. C’est le cas des employés d’Ambulance St-Jean et de La Presse Canadienne, par exemple.

J’ai par ailleurs appris que GE, qui exploite une usine à Bromont, terminera le régime à prestations déterminées (PD) du personnel non syndiqué fin 2023 afin de « rester concurrentiel » et de se doter d’une structure de coûts « plus prévisible et plus stable ». La multinationale souhaite ensuite intégrer le régime DBplus, si Retraite Québec est d’accord.

Mais CAAT ambitionne d’accroître bien davantage ses possibilités de recrutement.

En consultant le Registre des lobbyistes, j’ai vu que trois personnes voulaient « obtenir une orientation du ministère des Finances et de Retraite Québec sur la possibilité d’adhésion de participants et d’employeurs québécois au Régime de retraite des CAAT ». Il s’agit d’un actuaire de Mercer et de représentants de Mercure conseil, une firme de relations publiques.

Il existe deux solutions pour que toutes les entreprises québécoises aient accès à ce régime à prestations déterminées nouveau genre, m’a expliqué le chef des affaires juridiques et réglementaires des CAAT, Evan Howard. Que les lois du Québec changent ou que certains aspects du régime soient modifiés. « Au bout du compte, l’important, c’est que tous les participants aient accès aux mêmes bénéfices, que personne ne soit désavantagé en fonction de sa province. »

Maintenant, la grande question : quelle est la recette magique des CAAT, qui se targue d’avoir « révolutionné le milieu des retraites au Canada » en réunissant les avantages des régimes à prestations et à cotisations déterminées ?

Pour comprendre, il faut se rappeler le fonctionnement des régimes PD. Typiquement, ceux-ci imposent aux employeurs la responsabilité de fournir les sommes manquantes pour le versement des rentes promises aux retraités. Comme personne ne peut prévoir le yoyo de la Bourse et ses effets sur la santé financière d’un régime PD, les entreprises peuvent se retrouver avec un immense fardeau.

Pour composer avec les années de faibles rendements boursiers, le régime DBplus maintient plutôt une importante réserve. Cela lui évite de sabrer les rentes ou d’exiger des cotisations additionnelles, mais le montant des rentes promises s’en trouve affecté. Aussi, l’indexation après la retraite (75 % de l’indice des prix à la consommation), comme d’autres avantages, est uniquement offerte si le régime en a les moyens.

En ce sens, le DBplus ressemble – à quelques différences techniques près – au régime de retraite à financement salarial (RRFS) reconnu par Québec depuis 2008. Il s’agit aussi d’un régime à prestations déterminées sans surprises pour l’employeur, qui peut en regrouper plusieurs (la FTQ en a créé un pour ses membres) ou un seul (Rio Tinto Alcan).

Le régime des CAAT exige des cotisations totalisant, au choix, entre 10 et 18 % des salaires, réparties également entre les employeurs et les employés. Le maximum de 18 % donne actuellement droit à une rente de 1,5 % par année, tandis que le minimum de 10 % procure 0,85 %.

Ainsi, après 30 ans de service, un retraité aurait droit à 45 % de son salaire en cotisant le maximum (30 x 1,5 %) et à 25,5 % de son salaire s’il a cotisé le minimum (30 x 0,85 %).

À titre de comparaison, le RRFS des groupes communautaires et de femmes (900 employeurs québécois et 10 000 participants) permet l’accumulation d’une rente de 1,8 % pour une cotisation globale de 18 %. Et ce, « tout en visant une pleine indexation des rentes à la retraite », souligne l’actuaire Pierre Bergeron, de PBI Conseillers en actuariat. Le DBplus n’est donc pas d’une générosité à tout casser.

En outre, les RRFS offrent « des mécanismes de gestion de risque semblables, voire supérieurs, en termes d’équité intergénérationnelle à celui des CAAT », juge M. Bergeron. La grande différence « réside dans une stratégie de communication plus agressive, élaborée et structurée pour le DBplus, alors qu’au Québec, on semblait plutôt hésitant à promouvoir la mise en place de tels régimes ».

Avec l’espérance de vie qui s’allonge et l’inflation galopante, il ne fait aucun doute que des solutions doivent être trouvées pour améliorer la santé financière des retraités tout en respectant la capacité financière des employeurs. Les régimes PD multientreprises et le nouveau régime à prestations cibles font assurément partie des outils à considérer. Et ceux du Québec devraient mériter toute notre attention.

Consultez le site du régime de retraite CAAT