Après avoir bûché toute sa carrière pour accumuler des économies, ce serait bête, rendu à l’aube de la retraite, de ne pas planifier leur utilisation avec autant de rigueur. Mais comment s’y prendre pour profiter pleinement de son argent et dormir tranquille ? En se dotant d’une stratégie de décaissement.

Il n’est plus rare de contribuer, au cours d’une vie, aux régimes de retraite de deux, trois ou même quatre employeurs. Et de verser ses économies dans un REER, en plus d’un CELI. Et de cotiser aux fonds de travailleurs. Et d’avoir des actions. Alors un jour, quand la retraite approche, il faut rapailler tout ça et déterminer dans quel ordre décaisser chaque type d’actifs… en tenant compte de l’impôt et des prestations d’Ottawa et de Québec. Ouf !

À 60 ans, Sylvie est rendue là. Elle cessera de travailler en juin et veut planifier adéquatement son avenir financier. « Je me sens démunie. Pour mes amis, c’est facile, car ils n’ont eu qu’un seul employeur. Mais moi, quand je regarde mes papiers, je dois me concentrer », me confie-t-elle.

Sa paperasse est volumineuse. Sylvie a cotisé à quatre régimes de retraite, dont celui des employés du secteur public québécois (RREGOP). Elle possède un CRI (compte de retraite immobilisé), un REER et un CELI, en plus d’être actionnaire du Fondaction. « L’anxiété de faire des dépenses folles qui vont influencer le reste de ma vie, l’anxiété de ne pas profiter de l’argent que j’ai ramassé… ça me rend totalement angoissée ! » Elle envisage de s’acheter une maison, se demande si elle peut se payer un VR.

Ce portrait est loin d’être exceptionnel. C’est d’ailleurs ce qui rend les stratégies de décaissement de plus en plus complexes. Les gens changent davantage d’emploi, le nombre de véhicules de placements a augmenté (pensons au CELI, né en 2009) et les possibilités sont plus variées (depuis 2013, on peut reporter la réception de la pension de la Sécurité de la vieillesse après ses 65 ans). C’est sans compter que l’espérance de vie s’est grandement allongée.

Les erreurs et les mythes

Alors on fait quoi ?

On se tourne vers un professionnel capable de faire les calculs qui s’imposent. Car il n’existe pas de stratégie universelle pour payer le moins d’impôt possible tout en s’assurant d’avoir assez d’argent toute sa vie. Surtout, on veut éviter les mauvais choix irréversibles qui coûtent cher.

« La pire erreur, c’est de prendre sa rente de Québec à 60 ans », tranche Nathalie Bachand, planificatrice financière chez Bachand Lafleur, groupe conseil et présidente d’ÉducÉpargne (anciennement Question Retraite). Il est normal de vouloir profiter de la vie pendant qu’on est en santé. Mais le report de la rente jusqu’à 70 ans n’est pas synonyme de budget réduit pour les voyages ! Bien souvent, il est plus avantageux de financer son train de vie de 60 à 70 ans en puisant dans ses épargnes.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Nathalie Bachand, planificatrice financière chez Bachand Lafleur, groupe conseil et présidente d’ÉducÉpargne

L’idée préconçue selon laquelle il faut « sortir tous les placements non imposables en premier » n’est pas vraiment judicieuse, poursuit Nathalie Bachand. Puisqu’on ne paie pas d’impôt sur la première tranche de 16 143 $ de revenus, vaut mieux étaler ses revenus imposables dans le temps. Aussi faut-il bien prévoir les retraits du FERR pour éviter de voir sa pension du fédéral fondre comme neige au soleil.

Dans son bureau, Nathalie Bachand a entendu beaucoup d’autres mythes qui ont la vie dure. Les plus populaires : « Je vais mourir à 82 ans » et « rendu à 70 ans, je vais manger mou et ça ne me coûtera pas cher ».

Or, le coût de la vie ne diminue pas tant au fil des ans, et une personne sur deux qui entame sa retraite atteindra 90 ans. Une femme sur quatre se rendra à 96 ans !

Lisez « Attention, vous risquez de vivre plus vieux que prévu ! »

Évidemment, planifier son avenir financier suppose l’élaboration d’un budget. Voyages, nouvelle voiture, toit de la maison à refaire… Les grosses dépenses occasionnelles ne doivent pas être oubliées.

Accédez à un outil de planification budgétaire

Ensuite, on regroupe tous ses papiers pertinents dans une grosse enveloppe et on va s’asseoir avec un professionnel. « Il faut être humble, s’ouvrir sur ses objectifs, ses lacunes, ses rêves. Des fois, les gens sont timides […] Il ne faut pas avoir d’orgueil mal placé. On est des experts et il n’y a rien qu’on n’a pas déjà vu », conseille Nancy Paquet, première vice-présidente, stratégie épargne et investissement, particuliers, à la Banque Nationale.

PHOTO FOURNIE PAR LA BANQUE NATIONALE

Nancy Paquet, première vice-présidente, stratégie épargne et investissement, particuliers, à la Banque Nationale

À qui demander conseil ?

Si vous confiez déjà la gestion de votre patrimoine à des experts, le plan de décaissement fait normalement partie des services offerts.

Ça se complique quand nos avoirs sont dispersés.

« Souvent, ce n’est pas de la diversification, mais de l’éparpillement. Alors c’est dur de donner des conseils », déplore Nancy Paquet. Les clients de la Banque Nationale auront tout de même droit à un service gratuit de planification en succursale. Mais on ne s’en cache pas, on tentera de les convaincre d’y rapatrier tous leurs investissements pour faciliter la rédaction d’un plan solide.

On peut aussi consulter un cabinet spécialisé en planification financière qui facture ses services à l’heure. Prévoyez au moins 1500 $ pour une stratégie de décaissement.

Il existe aussi des ressources en ligne pour améliorer ses connaissances. D’ailleurs, ÉducÉpargne tiendra un webinaire gratuit sur le décaissement le 25 février. On promet que les experts feront d’énormes efforts de vulgarisation pour être compris de tous.

Inscrivez-vous gratuitement au webinaire