La crise de la COVID-19 et les nombreuses contraintes qu’elle a imposées sur les déplacements des vacanciers ont fait exploser les ventes de spas et de piscines, l’été dernier. Le même phénomène se répète cette année alors que chez le fabricant et détaillant Trévi, les piscines que l’on vend actuellement sont pour installation en août prochain seulement. « On va être bientôt sold out », anticipe Benoît Hudon, président de Trévi Fabrication. L’entreprise a même dû construire une nouvelle usine qui entrera en activité le mois prochain pour faire face à la demande.

L’an dernier, avec les contraintes de la COVID-19, beaucoup de vacanciers qui ne pouvaient pas voyager ont décidé de profiter de l’été en faisant l’acquisition d’une piscine. Est-ce que la ruée dans vos magasins a été à ce point importante ?

Absolument. Il faut dire aussi que nos magasins ont été fermés durant six semaines en mars et avril et qu’on a cessé la production à notre usine durant quatre semaines, ce qui a généré des retards en partant.

L’année 2019 avait déjà été très occupée avec une importante augmentation de nos ventes. C’est donc dire qu’on s’est retrouvés à l’automne sans aucun stock et un carnet de commandes bien garni pour le printemps de cette année.

C’est la raison pour laquelle on a augmenté la cadence de production l’automne dernier et on ne fera pas d’évènements de liquidation au printemps ; on n’a plus rien à liquider, que ce soit des piscines, des spas ou des meubles de patio.

Habituellement, nos détaillants ont de 10 à 20 % de produits en stock. Là, ils n’avaient plus rien et on s’est donné pour objectif de hausser de 30 % notre production cette année pour qu’ils puissent reconstruire leurs stocks.

Beaucoup de gens l’ignorent, mais Trévi n’est pas qu’un détaillant, vous fabriquez également toutes vos piscines. Comment sont segmentées vos activités ?

Mon père a fondé Trévi en 1972 dans un petit local à Laval. On était au départ un revendeur et on a commencé à produire nos propres piscines en 1983, et nos toiles en 1992. En 2000, on a eu des problèmes d’implantation d’un nouveau système informatique qui a été très coûteux et on a dû restructurer l’entreprise, qu’on a séparée en deux divisions. Une de fabrication et l’autre de vente au détail.

On a aujourd’hui 29 magasins Trévi au Québec, soit 12 magasins d’entreprise et 17 détaillants certifiés, et on a un regroupement d’achats, le Groupe Maître Piscinier, qui compte 35 détaillants au Québec, en Ontario et dans les Maritimes.

Côté manufacturier, on fabrique toutes nos piscines creusées et hors terre à notre usine de Mirabel, qui fait 250 000 pieds carrés. On livre chaque année 65 000 piscines hors terre, dont 70 % sont destinées au marché d’exportation des États-Unis, et 5000 piscines creusées. On livre également 7000 spas par année, mais ils sont assemblés chez notre fournisseur américain dans le Tennessee.

Vous ne faites pas affaire avec des fournisseurs asiatiques ?

Pas pour les spas ni les piscines. Mais tous les meubles de patio sont fabriqués en Chine. Nos accessoires, les tamis, pompes ou filtreurs, proviennent à 50 % des États-Unis et à 50 % de la Chine.

Les États-Unis sont donc votre principal marché pour les piscines hors terre ?

Oui, on a un réseau d’une trentaine de distributeurs sur toute la côte est des États-Unis. Là aussi, le marché est en forte croissance, et c’est pourquoi on a dû s’ajuster pour augmenter notre capacité de production et améliorer notre productivité. On peut augmenter notre présence là-bas.

Est-ce la raison pour laquelle vous avez décidé de construire une nouvelle usine à Lachute ? Qu’est-ce que vous allez y fabriquer ?

On a converti une ancienne usine de 250 000 pieds carrés pour y aménager deux lignes de production. Nos fournisseurs de moulages de plastique n’arrivent pas à répondre à tous nos besoins.

On va continuer à faire affaire avec eux, mais on va commencer le mois prochain à produire nos propres composants en plastique pour pouvoir atteindre les 30 % de hausse de capacité dont on a besoin.

On va utiliser 100 000 pieds carrés pour les moulages de plastique, et 100 000 pieds carrés vont aussi être consacrés à la fabrication de spas.

On vient de lancer une nouvelle gamme de spas, baptisée Lacus, et on souhaite en fabriquer 3000 par année qui vont s’ajouter aux 7000 fabriqués par notre partenaire américain. Lui aussi était incapable de combler tous nos besoins.

Cette nouvelle ligne de spas va donc s’ajouter à la dizaine de modèles que l’on offre déjà dans nos magasins Trévi et chez nos détaillants Maître Piscinier.

Est-ce qu’il n’y a pas un risque que vous vous retrouviez en surcapacité si le marché commence à se contracter après la forte année que vous anticipez ?

Non, on voit bien que le marché va continuer sa progression. Déjà, pour l’année qui s’en vient, on a un très gros carnet de commandes avec une hausse de 30 % qu’on veut livrer. Mais on prévoit déjà que 2022 va être une autre grosse année.

Écoutez, pour les seuls magasins Trévi au Québec, on va commencer à installer au cours des prochains jours nos piscines creusées à une cadence de 35 piscines par jour, et on a des livraisons jusqu’en août ; pour les spas, on est programmés jusqu’en septembre.

À partir de la mi-avril, on va commencer l’installation des piscines hors terre au rythme de 130 par jour, et ce, pour tout l’été. On se prépare déjà pour 2022 ; l’industrie n’est pas capable de répondre à 100 % de la demande.

Quel est votre plus gros défi pour faire face à cet appétit insatiable des consommateurs ?

C’est de trouver la main-d’œuvre nécessaire. On a 1300 employés au Québec et on a plus de 100 postes ouverts qu’on n’arrive pas à pourvoir, dans tous les secteurs — que soit à l’usine, en distribution, en magasin, à l’informatique.

L’an dernier, on disait que la pénurie de main-d’œuvre était un fléau, avec un taux de chômage de 3 %. Là, on est à 8 % de chômage et c’est encore plus difficile de trouver des employés. C’est assez incroyable.